Consacré par les observateurs, comme la cristallisation des divisions interarabes, le Sommet de Damas, qui a débuté hier, se distinguait à ses balbutiements par un événement qui peut augurer de bonnes perspectives pour les pays du Maghreb arabe. En effet, au journal de la mi-journée, la Télévision algérienne montrait des séquences où le président algérien, Abdelaziz Bouteflika, le président tunisien Zine El-Abidine Benali, le Guide de la Révolution libyenne Mouammar Al-Kadhafi, le chef de l'Etat mauritanien, Sidi-Ould Cheikh Abdallahi, et le ministre des Affaires étrangères marocain, étaient en discussion sous les feux de la rampe. L'on connaît les intentions du président de la République, lequel, selon le ministre des Affaires étrangères, Mourad Medelci, “œuvre sérieusement avec certaines parties arabes pour assainir le climat interarabe et unifier la vision arabe”. Mourad Medelci ne manquait pas de préciser à l'agence de presse syrienne, en marge de ce Sommet arabe, que le “le plus important est que les pays arabes fassent des concessions sur certaines de leurs prérogatives nationales au profit de la question de la sécurité arabe”. Et c'est donc, sommes-nous tentés de dire, presque tout naturellement que l'Algérie veut donner l'exemple, dans son espace immédiat, autrement dit le Maghreb. Est-ce à dire que les pays du Maghreb arabe, à la faveur de cette rencontre inattendue, pour le commun des observateurs, vont amorcer des discussions, enfin délestées de certaines pesanteurs, et grosses “de concessions sur certaines de leurs prérogatives nationales” ? Il faut bien avouer qu'aujourd'hui plus que jamais, un resserrement des liens entre pays maghrébins se fait de plus en plus sentir et plus particulièrement dans le domaine sécuritaire où la coopération se révèle inévitable pour éloigner la menace terroriste sur toute la région. L'enlèvement sur le territoire tunisien des deux touristes autrichiens est toujours là pour démontrer que les groupes terroristes veulent donner un contenu concret à la dénomination Al-Qaïda au Maghreb arabe ; reste donc aux pays maghrébins pour les contrer, ne serait-ce que sur ce chapitre de donner du concret à cette union qui ressemble depuis sa création à une arlésienne dont tout le monde parle, mais que personne ne connaît vraiment. Que ce soit l'Algérie, la Tunisie, la Libye, le Maroc ou la Mauritanie, chacun plaide de son côté en faveur de l'Union du Maghreb arabe (UMA) ; mieux encore, on souhaite la tenue rapide d'un sommet des chefs d'Etat membres de cette union, tout en donnant l'impression de prêcher dans le désert. Une question : depuis combien de temps les chefs d'Etat maghrébins ne se sont pas réunis autour d'une même table ? Le dernier sommet des chefs d'Etat de l'UMA, ensemble fondé en 1987, remonte à 1994 et le processus d'union et d'intégration reste désespérément bloqué. Ceci pour dire qu'il aura fallu que ces chefs d'Etat saisissent l'opportunité d'un sommet arabe, qui s'annonce controversé, pour tenter dans l'adversité d'accorder leurs violons. Peu importe si les discussions ont porté sur l'ordre du jour du Sommet de Damas, l'essentiel c'est que les chefs d'Etat maghrébins ont montré qu'ils sont capables de s'asseoir à une même table. Jusqu'à maintenant que l'on a assisté à des rencontres bilatérales qui ne font qu'exacerber la méfiance au sein de la grande famille du Maghreb ? Et les communiqués qui en résultent ressemblent, à s'y méprendre, à la langue de bois destinée à rassurer en toute transparence les autres partenaires sur les nobles intentions. Car si l'on vient à qualifier les relations entre les Etats du Maghreb, on ne trouvera pas mieux que le qualificatif “méfiance” des uns envers les autres. C'est d'ailleurs le handicap que traîne comme un boulet l'Union maghrébine. Preuve en est cette course au surarmement, les déclarations peu amènes et parfois belliqueuses, cette promptitude à refouler sans ménagement les ressortissants au moindre incident avec tel ou tel membre de l'UMA… Ce qui tranche paradoxalement avec une volonté affichée d'“impulser les mécanismes de l'Union maghrébine et d'en dynamiser les institutions” destinées bien sûr à la consommation des partenaires étrangers et bailleurs de fonds de la région. Zahir Benmostepha