Si l'emploi féminin est en nette progression, il demeure concentré dans les zones urbaines. Uniquement 8% des femmes chefs d'entreprise ont contracté un crédit bancaire. La majorité compte sur des fonds propres ou des prêts familiaux. Le ministère délégué chargé de la Famille fait, depuis hier, une halte de deux jours à l'hôtel Hilton pour débattre de l'entreprenariat féminin en Algérie. Un créneau sous-exploité dans un pays où la femme continue à être, au regard du code de la famille, une citoyenne de second ordre. Les intervenants au colloque de l'hôtel Hilton se sont accordés à reconnaître que les Algériennes entreprennent, depuis le début des années 1990, une percée avérée dans le monde du travail. Selon la ministre chargée de la Famille, Nouara Djaffar, la proportion des femmes travailleuses est passée de 3% en 1966 à 17% en 2007. Pour l'heure, évidemment, leur présence est plus marquée dans certains secteurs comme l'enseignement (plus de 50% de l'effectif global) ; la santé (58% du personnel) ou la justice qui compte 35,33% de magistrates dans le corps. Il convient d'admettre que l'Etat a mis en œuvre de multiples formules d'aide (microcrédits sans intérêts, pour encourager l'emploi féminin, notamment dans les activités professionnelles indépendantes. Elle a précisé qu'il faut distinguer entre “l'entreprenariat des femmes professionnellement et socialement reconnues et qui sont de véritables chefs d'entreprise, et les initiatives des femmes en chômage, visant à créer une activité génératrice de revenus”. Le colloque s'intéresse à la première catégorie, qui incarne la frange des femmes qui ont acquis leur autonomie et qui ont réussi une carrière professionnelle. Massika Boufama, enseignante à l'université d'Alger, a justement affirmé que les mentalités d'une société qui ne s'est pas affranchie du poids des traditions ancestrales freinent le travail des femmes rurales. Yamina Rahou, sociologue, a corroboré cette réalité par une enquête menée par le Crasc (Centre national de recherche en anthropologie sociale et culturelle, sous l'égide du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique) pour le compte du ministère délégué chargé de la Famille, qui a conclu que 72,9% des femmes chefs d'entreprise vivent dans des agglomérations urbaines. C'est entre 25-39 ans (60%) que les Algériennes lancent leur entreprise. L'ambition s'émousse à partir de 40 ans, a soutenu la conférencière. Contrairement aux idées reçues ou certainement une vérité d'il y a quelques années, “le statut matrimonial ne constitue pas un frein ou un blocage à l'exercice de l'activité des femmes entrepreneurs”. 44,7% d'entre elles sont mariées, 42,4% célibataires, 8,23% divorcées et 4,41% sont veuves. Le niveau d'instruction est également relativement élevé, puisque 66% des chefs d'entreprise sont universitaires ou sont parvenues à l'enseignement secondaire. Uniquement 7% n'ont pas dépassé le cycle primaire. “La moitié des femmes entrepreneurs enquêtées, soit 50,6% considèrent que leur rôle de professionnel est plus important, contre 27,1% qui considèrent le rôle de mère important. Et 10,6% celui de citoyenne”, a indiqué Mme Rahou. Elle a poursuivi que plus de 60% fondent leur société sur un fonds propre, un prêt familial ou la combinaison des deux possibilités. 16,5% recourent au fonds propre plus le crédit bancaire et 8,2% se basent uniquement sur crédit bancaire sans participer avec un apport personnel. Les femmes interrogées disent buter, dans leurs initiatives sur des contraintes liées aux impôts (34,12%) ; difficultés d'accès au crédit 22,35% et des responsabilités familiales (17,6%) ou manque d'offres de marché ou de vente (15,29%). En conclusion, elle a déclaré que le tiers des femmes admettent qu'elles ont plus d'obstacles dans leurs activités professionnelles. Katrien Verbrruegen, experte au CTB (Coopération technique belge) a parlé succinctement du partenariat entre son organisme et le ministère délégué chargé de la Famille. Le CTB gère des projets en exécution dans 270 pays, dont le nôtre. Souhila H.