Partira, partira pas ! La tension s'est accentuée au Zimbabwe où le parti au pouvoir devait se réunir vendredi pour définir une stratégie en vue d'un second tour à la présidentielle afin de sauver le chef de l'Etat, Robert Mugabe, après l'humiliation de la défaite aux législatives. Les proches de Mugabe se sont déclarés prêts à un second tour alors que la Commission électorale nationale n'avait toujours pas publié les résultats de l'élection présidentielle de la semaine dernière, visiblement embarrassée, tandis que le principal parti d'opposition, le Mouvement pour le changement démocratique (MDC), assure que son chef, Morgan Tsvangirai, a gagné dès le premier tour. Les pressions régionales et internationales se sont accentuées sur Mugabe pour qu'il quitte le pouvoir sans effusion de sang, L'Union européenne et les Etats-Unis ont pressé les autorités de publier les résultats de la présidentielle rapidement, laissant entendre que l'opposition avait gagné. Le président sud-africain, Thabo Mbeki, a été sollicité par les capitales occidentales pour convaincre Mugabe de lâcher les rênes d'un pays qu'il a ruiné. Mais, au Zimbabwe, beaucoup doutent que le vieil homme de 84 ans, muré dans le silence depuis le scrutin de samedi dernier, quitte le pouvoir de lui-même. Des observateurs craignent que la tenue d'un éventuel second tour soit l'occasion d'un déchaînement répressif. Tout dépend du degré d'allégeance ou de dissensions au sein du parti au pouvoir, la Zanu-PF, qui, lors des législatives tenues également samedi dernier, a déjà perdu la majorité au Parlement au profit du MDC. Anticipant la possibilité de manipulation électorale, le MDC avait revendiqué dès mercredi la présidence pour son chef, tout en se disant prêt à se soumettre à un second tour si les résultats officiels différaient des siens. Selon le MDC, l'ancien syndicaliste et bête noire du régime a obtenu 50,3% des voix, contre 42,9% à Mugabe et 6,8% à un ancien ministre dissident, Simba Makoni. Mugabe a fini par paraître à la télévision mais il serait surprenant qu'il s'abaisse à se présenter à un second tour face à celui qu'il taxe de “laquais” de l'Occident, estime-t-on dans les milieux diplomatiques à Harare. S'il va au second tour, c'est qu'il entend gagner, quel qu'en soit le prix, plaident-ils. Il reste que son engagement dépend de l'armée, laquelle, dit-on à Harare, serait aujourd'hui divisée, affectée comme toute la population par le marasme économique qui a conduit le pays, autrefois grenier à grain de la région, à dépendre de l'aide alimentaire. Des sources affirment que la Communauté de développement d'Afrique australe (SADC) tentait de convaincre l'ancien héros de la lutte contre le régime ségrégationniste de Ian Smith de se retirer dans la dignité. Selon un diplomate de la SADC basé en Zambie, la région doit se mobiliser pour éviter un scénario comme au Kenya, où des violences ont fait 1 500 morts après l'élection contestée de décembre. D. B.