L'Algérie disposait, avant 2001, de textes de lois sur les crimes économiques datant des années 1960 et 1970. Il lui fallait, par conséquent, réadapter ces textes au contexte d'ouverture économique et prendre en compte désormais ses engagements vis-à-vis de la communauté internationale en matière de prévention et de lutte contre le terrorisme et la corruption. Le ministère de la Justice a abrité, hier, une journée d'étude autour des “mécanismes des pôles judiciaires spécifiques”, à laquelle ont participé notamment des présidents de cours et des procureurs généraux, ainsi que des magistrats et des officiers de police. Cette manifestation intervient après l'inauguration, le 19 mars dernier, du siège de la 4e juridiction à compétence étendue (JCE) à Ouargla, qui vient après celle des JCE d'Alger (26 février 2008), de Constantine (3 mars 2008) et d'Oran (5 mars 2008). Il faut surtout savoir que la rencontre survient dans le cadre de la consolidation des dispositions de prévention et de lutte contre “les différentes formes de criminalité menaçant l'économie nationale et la sécurité des personnes”. Dans son allocution d'ouverture, le secrétaire général du ministère de la Justice, Messaoud Boucherfa, a qualifié la journée d'étude de “nouveau pas”, non sans rappeler les nouveaux aménagements introduits dans le code de procédure pénale, à travers l'extension de la compétence des tribunaux, du procureur de la République et du juge d'instruction aux six groupes d'infractions : le trafic de drogue, le crime transnational organisé, le terrorisme, l'atteinte aux systèmes de traitement automatisé de données, le blanchiment d'argent et, enfin, les infractions relatives à la législation des changes. “La prévention contre ces crimes passe nécessairement par la formation spécialisée des magistrats”, a précisé M. Boucherfa, avant de céder la parole à Mokhtar Lakhdari, membre de la Cour suprême. Ce dernier, dans son exposé consacré particulièrement à l'utilité des pôles judiciaires spécifiques, a expliqué les raisons de la spécialisation du juge, qui sont liées, selon lui, à un certain nombre de facteurs, parmi lesquels figurent “le nouveau contexte” national et mondial, l'entrée de l'Algérie dans “le marché libre ou l'économie de marché”, “la modernisation de la justice” et l'exigence d'une “plus grande clarification” par rapport aux délits. Pour l'intervenant, l'Algérie disposait, avant 2001, de textes de lois sur les crimes économiques datant des années 1960 et 1970. Il lui fallait, par conséquent, réadapter ces textes au contexte d'ouverture économique et prendre en compte désormais ses engagements vis-à-vis de la communauté internationale en matière de prévention et de lutte contre le terrorisme et la corruption. Le directeur des affaires pénales et des procédures de grâce a également établi une relation entre la création des pôles spécialisés et l'enquête préliminaire, affirmant que le système judiciaire national a besoin d'un “parquet présent avec force”, capable de traiter des affaires bancaires, financières, douanières, de circulation de capitaux, etc. “Nous allons basculer peut-être vers un nouveau système où l'enquête préliminaire sera déterminante”, a annoncé M. Lakhdari. Au cours d'un point de presse, le directeur des affaires juridiques et judiciaires, Mohamed Amara, a rappelé que l'installation des pôles judiciaires spécifiques s'inscrit dans le cadre de la réforme de la justice et sert à “rassembler les compétences des magistrats”. “Ces pôles auront une efficacité dans le cadre de la coopération internationale et grâce à des juges spécialisés, cela nous simplifiera le traitement des dossiers”, a-t-il révélé, insistant sur “le caractère transfrontalier” des délits. Interrogé sur les compétences des juges et l'existence des tribunaux nationaux habilités à demander des comptes aux hauts responsables de l'Etat sur leur gestion des affaires publiques, M. Amara a répondu que l'Algérie “n'a pas ce genre de tribunaux”, mais il a, cependant, assuré que l'adaptation de notre système judiciaire “permettra d'avoir un procès pénal équitable”, ainsi que des “magistrats spécialisés pour plaider des affaires économiques et financières”. De son côté, le directeur de la formation, M. Si Hadj, a abordé “la stratégie de formation” du ministère de tutelle en direction des magistrats. Selon lui, trente-sept juges des pôles spécifiques ont bénéficié de “cinq sessions au moins de formation à l'étranger”, sans oublier “les huit sessions de formation en Algérie”. M. Si Hadj a, par ailleurs, informé d'une série de formations qui seront lancées à partir du 19 avril 2008, dont les techniques bancaires (en mai 2008), la cybercriminalité (en juin 2008) et la lutte contre le terrorisme (deux sessions en juin 2008). Outre les magistrats, la formation est dispensée aussi aux greffiers travaillant avec ces derniers : trente-cinq greffiers ont déjà bénéficié d'une formation et vingt-cinq autres seront formés prochainement en Algérie (1re session) et en Espagne (2e session). Le directeur de la modernisation, Abderrazak Hanni, a, pour sa part, annoncé la création, bientôt, d'une école pour la formation des auxiliaires de justice. H. Ameyar