Abusant de la crédulité de leurs victimes, ces usurpateurs, dont des femmes, se font souvent passer pour des officiers de l'armée. Les criminels diversifient leurs méthodes en s'adaptant aux mutations de la société. L'objectif reste le même : gagner le plus d'argent possible par le truchement de stratagèmes, de ruses et un appel à l'imagination. Un phénomène s'est largement développé ces dernières années. L'usurpation. Usurpation d'identité, de fonction, faux et usage de faux qui relèvent de la même famille criminelle. Opérant selon des scénarios dignes des polars bien élaborés, les usurpateurs ne lésinent pas sur les moyens pour s'attirer la confiance de leurs victimes par le recours à la patience et d'autres instruments de persuasion. Les victimes sont des demandeurs d'embauche, des demandeurs de logement, des entrepreneurs en quête de contrat ou des porteurs de projets. De 2006 jusqu'à février 2008, la Gendarmerie nationale a eu à traiter 143 affaires liées à différents types d'usurpation et d'usage de faux dans lesquelles sont impliquées 160 personnes dont des femmes. Dans les cas courants, les criminels utilisent les identités des officiers des services de sécurité, rarement la qualité de haut fonctionnaire de l'administration, et proposent leur coup de main moyennant “une tchipa” consistante. Le mode opératoire est souvent le même : repérer la victime, bien l'identifier, la mettre en confiance avant d'agir. D'emblée, le criminel a adopté son personnage qu'il jouera parfaitement jusqu'à l'accomplissement de son forfait. La détresse des victimes devant les problèmes, les tracasseries bureaucratiques, sont les facteurs qu'exploite le criminel qui contournerait tous les problèmes en usant ses connaissances. Argument imparable. Contre 20 000 DA un homme se faisait passer pour un officier de l'ANP à Béchar et promet d'engager les jeunes dans l'armée. À Boumerdès, c'est un autre qui se faisait passer pour un commandant pour extorquer 120 000 DA à un commerçant qu'il a réussi à “adopter” en le côtoyant pendant des jours. Prétextant une panne de sa voiture, il réclama cette somme pour la faire réparer. Un autre s'est pris pour un colonel de la gendarmerie à Blida et tenta d'escroquer un dépanneur sur lequel il s'est bien renseigné. L'informant que son fils a eu un accident à Tébessa, il lui proposa son aide pour les formalités et le dépannage moyennant 90 000 DA qu'il devait remettre à une autre personne. La victime accepte et se rend avec la personne, arrivés devant un immeuble, lieu du rendez-vous, la personne y entre avec l'argent pour ne plus revenir. Les cas similaires sont légion, et si ce n'est la prise de conscience des citoyens qui informent les services de sécurité, il n'existe pas de parade sécuritaire à ce phénomène. Pourquoi cet accent sur les officiers de l'ANP ou de la gendarmerie ? Vrai ou faux, l'armée est créditée d'un pouvoir dépassant toutes les institutions et d'une capacité à répondre à n'importe quelle sollicitation. D'où l'afflux d'une clientèle, une faune de criminels et de victimes, tentée de contourner tous les obstacles, pour les uns ramasser de l'argent facilement par le biais d'une escroquerie, pour les autres avoir accès à des marchés, avoir un contrat ou simplement un logement. La connaissance d'un officier, selon la rumeur, ouvre la voie à tous les avantages quitte à piétiner la loi. Cela permet, pense-t-on, de gagner du temps et de l'argent. Cela sans compter sur la prise de conscience de certains citoyens ou de victimes qui alertent désormais les services de sécurité, qui d'ailleurs appellent au respect des procédures légales pour éviter de tomber dans les filets des escrocs, qui arrêtent ces criminels. Géographiquement, ce crime est l'apanage des grandes villes, à l'instar d'Alger qui prône en tête ou d'Oran qui lui emboîte le pas. Les criminels utilisent surtout les identités des services de sécurité, la GN et l'ANP, ce qui représente un argument de taille pour convaincre les victimes. Ce crime n'est toutefois pas précisément défini. Il peut aller du plagiat en littérature au téléchargement Internet illégal en passant par l'usage du faux. Au regard de la loi, quels qu'en soient les dégâts ou la valeur extorquée, l'usurpation demeure un délit puni par le code pénal. Les peines varient selon les cas, la qualité des auteurs et l'identité usurpée ou le document falsifié et son usage, de un an de prison jusqu'à la perpétuité. Djilali B.