“Le gouvernement français accorde une importance capitale aux relations algéro-françaises”, avait déclaré la ministre française de l'Intérieur, de l'Outre-mer et des Collectivités locales, Michèle Alliot-Marie. N'est-ce pas qu'on ne saurait mettre en doute la sincérité du propos, quand l'émissaire de Nicolas Sarkozy qualifie notre pays de “partenaire-clé pour la France” , sans jeter le soupçon sur les déclarations du président français pour lequel l'Algérie devrait jouer un rôle de locomotive dans son projet de l'Union pour la Méditerranée. Les Marocains, eux aussi dirons-nous, n'ont aucune raison de mettre en cause la sincérité de hauts responsables français, quand ceux-ci parlaient d'une relation privilégiée à laquelle la France tenait comme à la prunelle de ses yeux et surtout quand ils leur laissaient entendre que leur pays abriterait le secrétariat de l'Union pour la Méditerranée. Les Tunisiens ne peuvent, quant à eux, qu'être flattés quand des officiels français de haut rang leur font miroiter l'installation du siège de l'UPM dans leur pays. Enfin, le président Hosni Moubarak aura sûrement la courtoisie de prendre pour argent comptant, l'allusion du ministre des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, aux contours très nets, à une coprésidence avec le président français de l'Union pour la Méditerranée. À moins de parler de politique à géométrie variable, avec cette fausse naïveté qui voudrait que Nicolas Sarkozy s'attelle à une opération de charme qui consiste à promettre tout et rien, pour faire aboutir son projet coûte que coûte avec une adhésion en masse des pays du Sud, on sera tenté de dire que c'est plutôt une démarche réfléchie, mais surtout tortueuse dont on ne peut pas nécessairement attribuer la paternité à la personne du président français, et qui consisterait à déblayer le terrain à la présence du Premier ministre israélien Ehoud Olmert, à Paris le 13 juillet prochain, date prévue de l'acte de naissance de l'UPM. Dans cette démarche, certains pays comme l'Algérie, la Syrie ou encore la Libye constituent une donne qui pourrait compromettre l'adhésion d'Israël à cette union. Personne, en effet, n'écarte l'éventualité que le projet de Sarkozy soit mis à mal, comme cela a été le cas du “processus de Barcelone” lancé par les Européens en 1995 en direction des pays de la rive sud par ce qui se passe actuellement au Proche-Orient, et surtout par la défiance de certains dirigeants arabes à l'égard d'Israël. Et il faut bien admettre que le choix s'imposera à un moment ou à un autre entre sacrifier Israël ou des pays arabes qui sont contre sa participation. C'est peut-être en ce sens qu'il faut envisager un activisme de lobbys juifs en France qui manœuvrent pour assurer la présence de Ehoud Olmert à Paris le 13 juillet prochain. Rappelons donc que la ministre française de l'Intérieur a démenti les informations selon lesquels le siège de l'Union pour la Méditerranée (UPM) serait basé en Tunisie et le secrétariat général de l'Union pour la Méditerranée reviendrait au Maroc. “Il faut toujours se méfier des rumeurs”, déclarait-elle. “Méfiez-vous des rumeurs”, insistait-elle encore. L'émissaire de Nicolas Sarkozy ne croyait pas si bien dire. Car la manœuvre consiste à pousser l'Algérie à renoncer à sa participation au sommet de Paris. Car il sera difficile pour les responsables algériens de faire de la simple figuration au moment où ses voisins, chacun pour sa part, se taillent une place de choix dans cette Union pour la Méditerranée. Et on croit savoir que la mission de Michèle Alliot- Marie auprès d'Abdelaziz Bouteflika était surtout de convaincre que tout ce qui est en train de se dire autour du siège, de la coprésidence et du secrétariat de l'union n'était pas fondé. Et peut-être aussi de persuader le président algérien à participer au sommet de Paris en présence d'Ehoud Olmert. Rappelons que certains chefs d'Etat arabes ont fait part de leurs réticences à participer à un sommet auquel doit être convié le Premier ministre israélien, Ehoud Olmert, au moment où ce dernier a mis le processus de paix dans l'impasse et que l'armée israélienne massacre la population palestinienne à Gaza. Abdelaziz Bouteflika n'a, certes, pas exclu d'aller à Paris, mais il a indiqué que sa décision dépendrait de la situation au Proche-Orient. En se sens, l'annulation du voyage à Alger de Bernard Kouchner prend un sens quand on sait que le ministre des Affaires étrangères français est connu pour ses tendances pro-israéliennes. Et il serait donc vraiment mal venu qu'il se charge de la mission qui a été finalement confiée à Alliot-Marie qui allait confirmer le rôle stratégique de l'Algérie dans le projet de l'union. À travers cette lecture, on peut supposer qu'il y a une volonté manifeste de Nicolas Sarkozy de contrer les lobbys juifs qui veulent pousser l'Algérie à abandonner la partie au profit d'Israël. Si on réfléchit bien, on peut s'interroger sur le choix de la rumeur de la Tunisie, du Maroc et de l'Egypte pour avoir les honneurs de l'Union pour la Méditerranée. Aucun de ces trois pays ne manifeste d'animosité à l'égard d'Israël et ne voit aucun inconvénient à s'asseoir à la même table que l'Etat hébreu. On connaît les relations qui lient le Maroc à Israël et on sait aussi que l'Egypte est un véritable partenaire économique et commercial de l'Etat juif. Trois pays de la rive sud qui peuvent faciliter l'intégration de l'Etat hébreu dans le futur ensemble méditerranéen. Zahir Benmostepha