L'actuel ambassadeur de France à Alger devrait être nommé, cet été, à un poste-clé à l'Elysée : coordonner les services de renseignements sous l'autorité directe du président français, Nicolas Sarkozy. Le diplomate est, en effet, pressenti pour coordonner les activités des services de renseignements français. Bernard Bajolet, 59 ans, est en poste à Alger depuis fin 2006. Ce diplomate devrait inaugurer en juillet cette fonction hautement stratégique, créée dans le cadre d'une réforme destinée notamment à améliorer la lutte antiterroriste. Avant l'Algérie, il était ambassadeur de France à Bagdad durant deux années. Spécialiste du monde arabe où il a fait l'essentiel de sa carrière, il a notamment géré à deux reprises, lorsqu'il était en fonction en Irak, une crise provoquée par l'enlèvement de journalistes français. Dans les deux cas, la prise d'otages a connu un dénouement heureux. Il sera chargé, à l'Elysée, de coordonner les activités des quelque 14 000 hommes et femmes des services de renseignements français, à la fois extérieurs et intérieurs, qui relèvent de plusieurs ministères. Ce nouveau poste est prévu dans un Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale qui sera publié courant juin. La structure, qui sera dirigée par M. Bajolet, assumera les tâches dévolues actuellement à un Comité interministériel du renseignement (CIR), dépendant du Premier ministre. Au cours de leurs travaux, les participants au Livre blanc avaient désigné le renseignement, notamment en matière antiterroriste, comme l'une de leurs priorités, marquées par la création de ce “M. Renseignement” à l'Elysée. M. Bajolet a rencontré, au cours des dernières semaines, les directeurs des services de renseignements et de contre-espionnage, relevant des ministères de l'Intérieur et de la Défense. Au niveau intérieur, il s'agit de la Direction de la surveillance du territoire (DST) et des Renseignements généraux, qui seront regroupés dans un mois au sein de la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI). Pour la Défense, il s'agit de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), la Direction du renseignement militaire (DRM), la Direction de la protection et de la sécurité de la défense (DPSD, ex-Sécurité militaire). Bernard Bajolet a marqué de son empreinte les relations algéro-françaises, qui traversaient une grave zone de turbulences au moment où il rejoignait son poste à Alger. Ce diplomate chevronné a multiplié les gestes pour tenter d'apaiser les tensions entre Alger et Paris, qui tentent depuis 2005 d'enterrer leur querelle sur la mémoire. L'histoire retiendra sans doute que c'est durant le passage de M. Bajolet en Algérie que l'hymne national algérien Qassaman a été exécuté, en 2007, pour la première fois depuis l'indépendance du pays, à la Résidence de France à Alger à l'occasion de la traditionnelle fête du 14 Juillet. Ce jour-là, Bernard Bajolet a réservé une “surprise” à ses hôtes algériens parmi lesquels plusieurs ministres, anciens ministres et généraux d'active et de réserve, ainsi que d'anciens moudjahidine réunis dans les jardins de la Résidence. Fin avril, le diplomate français s'est une nouvelle fois distingué en qualifiant la répression sanglante par les autorités françaises de manifestations d'Algériens en faveur de l'indépendance de leur pays, le 8 Mai 1945, d'“épouvantables massacres”. C'était la première fois qu'un responsable français qualifiait de “massacres” cette répression. M. Bajolet a commencé sa carrière diplomatique à Alger de 1975 à 1978. Le nom de son successeur à Alger n'a pas encore été dévoilé. Rafik Benkaci