Apparemment déçu par les lenteurs dans la concrétisation des “Etats unis d'Afrique”, le leader libyen dénonce les “traîtres et réactionnaires” qui bloquent ce projet, tout en menaçant de tourner le dos à l'Afrique pour se tourner vers une autre alternative, “arabo-méditerranéenne ou euro-méditerranéenne”. Après les dirigeants arabes, qu'il a maintes fois critiqués et traités de tous les noms à l'occasion des sommets de la Ligue arabe où il ne ratait jamais l'occasion de menacer de quitter cette institution, le colonel Mouammar El Kadhafi s'en est pris cette fois-ci à ses pairs du continent africain. Devant plus de 5 000 personnes lors d'un meeting au stade de Kégué de la capitale togolaise, le chef de l'Etat libyen a lancé en présence du président Faure Gnassingbé, ainsi que plusieurs ministres togolais : “Il y a parmi nous des réactionnaires et des traîtres qui estiment qu'il faut d'abord bâtir nos régions avant de penser à la construction des Etats unis d'Afrique.” Selon lui, ces “réactionnaires et traîtres tapis dans l'ombre” ne veulent pas des “Etats unis d'Afrique”. Il affirmera que “les rapports des experts africains ont affirmé l'échec de ces régions. Aujourd'hui, tous les autres continents s'unissent, sauf l'Afrique”. Continuant sur sa lancée, Kadhafi menace de dénoncer les “traîtres” et les “hésitants” qui “trahissent l'Afrique”, si des “décisions cruciales” ne sont prises lors du prochain sommet de l'Union africaine (UA) en juillet prochain. Ne mâchant pas ses mots, le leader libyen préviendra : “Aujourd'hui, on les avertit : ou bien ils prennent une décision cruciale ou alors je vais les clouer au pilori devant les masses populaires, car l'unité africaine est pour les peuples et non pour une poignée de dirigeants”. Rappelons qu'il avait déjà donné un perçu de ce qu'il entendait faire avant son départ pour la capitale éthiopienne, où il avait assisté en janvier dernier au sommet de l'Union africaine, qu'il avait menacé de quitter. “Si l'unité ne se réalise pas, la Libye va tourner le dos à l'Afrique et se tournera vers une autre alternative, arabo-méditerranéenne ou euro-méditerranéenne”, avait-il déclaré. Pour information, Mouammar El Kadhafi est le principal artisan de cette idée, alors que la majorité des Etats membres de l'Union africaine (UA) prônent un renforcement préalable des structures régionales. Ceci étant, le président libyen, le colonel Kadhafi, a quitté Lomé pour assister au sommet de la Communauté des Etats sahélo-sahariens (Cen-Sad), aujourd'hui et demain à Cotonou où il va encore défendre son ambition de réaliser les “Etats unis d'Afrique”. Arrivé du Togo par la route, vêtu de vert avec la carte de l'Afrique imprimée sur sa chemise, Kadhafi a été accompagné à la frontière entre les deux pays par le président togolais Faure Gnassingbé et a été accueilli de l'autre côté par le chef de l'Etat béninois Boni Yayi. Après un bain de foule, il est parti en direction de Cotonou. Fidèle à son habitude, le colonel Kadhafi dormira sous sa tente, plantée non loin de la présidence togolaise. Créée le 4 février 1998 à Tripoli, qui abrite son siège, la Cen-Sad vise à “établir une union économique” grâce à “la suppression des entraves” liées à la libre circulation de leurs ressortissants et des capitaux dans ses Etats membres. Cet ensemble régional regroupe la Libye, le Burkina Faso, le Mali, le Soudan, le Tchad, le Niger, l'Erythrée, la Centrafrique, le Sénégal, la Gambie, Djibouti, le Nigeria, la Tunisie, le Maroc, la Somalie, le Togo, la Guinée, le Comores, le Bénin, l'Egypte, la Guinée-Bissau, la Côte d'Ivoire, le Liberia, le Ghana et le Sierra Leone. K. ABDELKAMEL