Affaiblis physiquement mais toujours aussi déterminés, les enseignants contractuels, en grève de la faim depuis quatorze jours, sont réduits à compter le nombre des grévistes évacués à l'hôpital dont trois dans un état comateux. Souvent la raison se rapproche de la folie. Il faut être fou ou courageux, dira-t-on, pour se lancer dans une grève de la faim illimitée afin de se faire entendre par un gouvernement qui joue à la sourde oreille. Alors que les grévistes sont à leur quatorzième jour de protestation rien n'a été fait pour dénouer le conflit, même pas une proposition de dialogue. “Faut-il qu'un enseignant décède pour réveiller la conscience du ministre de l'Education nationale ou d'un membre du gouvernement ?” s'indigne une enseignante gréviste. Depuis le dixième jour de grève de la faim, le nombre d'évacuations ne cesse d'augmenter. En effet, sur les 45 grévistes venus des quatre coins du pays, 15 ont été évacués d'urgence vers différents hôpitaux, dont 3 dans un état comateux durant trois jours. Le siège du syndicat du Snapap est devenu désormais un lieu de rendez-vous pour les ambulances du Samu qui se déplacent chaque jour pour des évacuations. Essoufflement, baisse de tension artérielle, hypoglycémie... Malgré tout cela, ils tiennent le coup et continuent leur combat. En dépit de leur état physique, les enseignants contractuels ne comprennent toujours pas ce mutisme face à leurs revendications. Selon Mme Ghozlane Nassira, secrétaire générale du Conseil national des enseignants contractuels (Cnec), le mouvement de protestation a été déclenché pour porter haut les revendications des 45 000 enseignants contractuels. Rappelons alors que les titulaires ont déserté leur noble métier, ces ingénieurs et licenciés, fraîchement diplômés étaient les premiers à accepter des postes vacants de l'éducation nationale dans les régions les plus reculées durant les années de terrorisme, maintenant ils sont considérés comme les parias de l'éducation nationale et ils ont été révoqués de leur poste sous prétexte qu'ils n'ont pas le diplôme requis. “Nous refusons l'inacceptable. Alors que certains parmi nous ont 14 ans de service dans l'éducation, ils nous jettent dehors comme des parias. Le combat n'est pas fini, nous le continuerons jusqu'à ce que nous soyons hospitalisés un par un”, précise-t-elle. Ils déclarent tous qu'ils sont déterminés à aller jusqu'au bout et que leur combat se poursuivra jusqu'à la mort. “Nous sommes déjà des morts-vivants. Désormais rien ne nous fait peur”, déclare une enseignante hospitalisée, il y a trois jours, mais qui est revenue continuer son combat malgré le diagnostic des médecins. “C'est le mépris total de la part du ministère de l'Education qui n'a même pas désigné une commission médicale pour faire le constat”, ajoute-t-elle. En l'absence d'une réaction du département de Benbouzid, le conseil national des enseignants contractuels, affiliés au Snapap, s'accroche à une initiative qui devrait venir de quelques partis politiques et de certaines personnalités solidaires de leur action. Un comité de soutien a été déjà installé tandis que les messages de solidarité affluent de plusieurs organisations mondiales. Réconfortés par cette solidarité, les enseignants contractuels restent cependant sans voix face au silence assourdissant des pouvoirs publics. Ils s'attendaient à ce que leur situation soit évoquée lors d'un conseil des ministres. Force est de constater que le gouvernement a d'autres priorités. En dépit de ce mépris affiché, la volonté des grévistes n'a pas été altérée. Bien au contraire, hier encore, les syndicalistes attendaient l'arrivée d'un nouveau contingent d'enseignants venus des différentes wilayas pour prendre part à la grève de la faim, devenue l'ultime recours après avoir usé de tous les moyens. Nabila Afroun