Ni Moscou ni les Occidentaux ne souhaitent aller au pire dans la crise du Caucase. Après les bruits de bottes, voici le temps des appels au calme. La Russie se tient totalement au plan de paix en six points parrainé par la France, a affirmé le président russe Dmitri Medvedev lors de conversations téléphoniques avec le Premier ministre britannique Gordon Brown. Le successeur de Poutine a même appelé au déploiement de davantage d'observateurs de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) dans la zone tampon, ainsi qu'à la supervision impartiale internationale de la direction géorgienne. Moscou souhaite maintenir le dialogue constructif avec l'Union européenne et d'autres organisations internationales, a relevé le président russe, après avoir expliqué la raison pour laquelle la Russie a décidé de reconnaître l'indépendance de l'Ossétie du Sud et de l'Abkhazie. La semaine dernière, Medvedev a signé un décret reconnaissant l'indépendance de ces deux provinces qui se sont séparées du pouvoir central géorgien durant les guerres du début des années 1990. La Géorgie, une ancienne république de l'ex-Union soviétique, pensait forcer la main de ses alliés américains et européens et de l'Otan, dont elle est candidate, en envoyant début août des troupes en Ossétie du Sud pour en reprendre le contrôle, ce qui a conduit à une contre-offensive militaire de la part de la Russie. Le conflit s'est terminé par un accord de cessez-le-feu entre Tbilissi et Moscou sous l'égide de la France, en tant que présidente de l'UE. Et l'Occident a accusé Moscou de poursuivre ses rêves impériaux. Cependant, sans pousser trop loin le bouchon. Le Kremlin, de son côté, a également tenté de calmer le jeu avant le sommet européen extraordinaire consacré à la crise géorgienne, d'où les garanties de Medvedev. Pour rassurer, le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov a discuté avec son homologue allemand Frank-Walter Stein Meier de la possibilité d'une participation de représentants de l'UE dans la surveillance des zones de sécurité autour de l'Ossétie du Sud et de l'Abkhazie. Tbilissi a beau exhorter l'Europe à adopter des sanctions contre le régime russe, les Européens préfèrent marquer le pas pour ne pas réveiller l'ours russe. Si Brown a promis de défendre lors du sommet de l'UE à Bruxelles la nécessité pour la Russie d'accepter l'intégrité territoriale de la Géorgie et de retirer ses troupes sur les positions qu'elles occupaient avant l'offensive sur la province séparatiste géorgienne d'Ossétie du Sud, Nicolas Sarkozy et Angela Merkel jouent apparemment une carte raisonnable. La présidence française de l'UE a laissé entendre que les sanctions n'étaient pas à l'ordre du jour. Une position partagée par la chancelière allemande. Le ministre allemand des Affaires étrangères a déclaré que l'UE ne devrait pas isoler la Russie en raison de sa politique envers la Géorgie : “Le gouvernement russe mérite d'être critiqué pour son attitude mais cela ne change pas le fait que la sécurité et la stabilité en Europe ne peuvent être assurées qu'avec et non sans Moscou.” “Cessons cette frénésie quotidienne d'émotions, la situation est déjà assez mauvaise comme cela”, a-t-il lancé à la veille du Conseil européen extraordinaire. “L'heure des sanctions n'est pas venue”, a appuyé son homologue français. L'UE semble flancher devant son premier fournisseur de gaz et de pétrole ont écrit les journaux européens. Par ailleurs, la Pologne et les trois pays Baltes, les critiques les plus ardents de Moscou au sein de l'UE, ont également baissé le ton afin d'éviter, selon leurs propres responsables, “des divisions qui seraient aussitôt exploitées par les Russes”. Ne nous concentrons pas sur comment nuire à la Russie mais comment aider la Géorgie et les voisins de l'UE à l'Est, a expliqué le ministre polonais des Affaires étrangères Radoslaw Sikorski, la veille de l'ouverture du sommet extraordinaire de Bruxelles sur la crise géorgeo-russe. Pour les Géorgiens, déçus du manque d'empressement des Occidentaux, le sommet européen ainsi que la visite du vice-président américain Dick Cheney, mardi à Tbilissi, doivent répondre à la question : jusqu'où leurs alliés sont-ils prêts à aller pour défendre cette ex-république soviétique de près de 5 millions d'habitants contre la Russie ? Une chose est sûre, personne ne veut d'un retour à la guerre froide. D. B.