Les indemnités des parlementaires ont été considérablement revalorisées par ordonnance présidentielle, adoptée hier à la majorité des membres de l'APN. De 180 000 dinars, elles sont relevées à près de 300 000 dinars, sans les primes liées au poste. Les députés ont adopté, hier, à la majorité des 255 présents à l'exception des élus du RCD et du Parti des travailleurs, le projet d'ordonnance n°08-03 modifiant la loi 01-01 du 31 janvier 2001 relative au membre du Parlement. À vrai dire, les membres de l'Assemblée nationale réalisent ainsi une vieille revendication qu'ils avaient toute latitude de satisfaire par eux-mêmes à travers une proposition de loi. Afin de ne pas rééditer l'épisode de 1998, qui a mis en scène l'affrontement entre Ahmed Ouyahia, alors Chef du gouvernement, et les membres de la première chambre au désavantage de ses derniers, les députés de l'actuelle législature ont préféré laisser l'initiative au gouvernement ou mieux au président de la République. C'est finalement le chef de l'Etat qui a légiféré par ordonnance sur l'amendement de l'article 19 de la loi relative au membre du Parlement. Il a indexé le calcul de l'indemnité mensuelle de base sur le point indiciaire 15505 alors qu'il était à 5438 à raison de 19 DA par point. “C'est la valeur maximale appliquée aux salaires de la Fonction publique”, a précisé le ministre chargé des Relations avec le Parlement, Mahmoud Khoudri. Dans sa présentation du projet d'ordonnance, il a justifié la revalorisation des indemnités des parlementaires par un effet d'ajustement par rapport aux augmentations opérées sur les salaires des fonctionnaires. “Cette disposition permettra aux parlementaires de mieux accomplir leurs missions”, a-t-il conclu. Plus concrètement, l'indemnité de base du parlementaire est relevée d'environ 100 000 dinars à 215 000 dinars. À cette somme, il faudra additionner la prime d'hébergement de l'ordre de 63 000 dinars par mois et celle liée à la restauration fixée à 20 000 dinars. Ce qui revient à dire que les élus de la nation percevront, chaque fin du mois, presque 300 000 dinars. Les présidents et les rapporteurs des commissions permanentes, ainsi que les vice-présidents de l'Assemblée nationale et du Conseil de la nation, bénéficient, en outre, de primes de postes variables (20 000 dinars de prime de responsabilité et 10 000 dinars de prime de téléphone), qui agrémenteront leurs fiches de paie d'une rallonge de 30 000 dinars, voire davantage. L'ordonnance présidentielle précise que les augmentations adjugées aux parlementaires prennent effet à compter du 1er janvier 2008. Ce qui signifie que chaque élu recevra plus d'un million de dinars en rappel pour les huit mois écoulés. Evidemment, les députés se défendent de toucher des salaires faramineux. L'on affirme que le salaire de base d'un ministre délégué est de 340 000 dinars, sans compter les primes et autres avantages attribués aux membres du gouvernement. Un ministre et un ministre d'Etat sont encore mieux nantis. Plusieurs députés expliquent que leur statut requiert, par ailleurs, de grosses dépenses à l'instar de la prise en charge à Alger des électeurs de leurs circonscriptions quand ils les sollicitent pour le règlement d'un problème. Des directions politiques exigent de leurs élus de reverser une partie de leurs indemnités au parti en guise de cotisation. Si dans l'absolu, l'augmentation du régime indemnitaire des parlementaires peut paraître justifiée eu égard à leur statut de hauts fonctionnaires de l'Etat tout en faisant l'abstraction sur le rendement insignifiant de la majorité d'entre-eux, elle demeure disproportionnée par rapport aux salaires perçus par les citoyens, parmi lesquels des cadres de la nation. Par un simple calcul mental, les députés et les sénateurs ont désormais un pouvoir d'achat 25 fois supérieur à celui du smicard (12 000 dinars) et au moins 10 fois à celui du cadre moyen, considérant une rémunération à 30 000 dinars. Souhila Hammadi