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La dérive inflationniste

Le ministre des Finances a déclaré officiellement le 6 juin 2011 que le déficit budgétaire serait en réalité de 10% et non de 33,9% et le gouverneur de la Banque d'Algérie que l'inflation est maîtrisée. L'objet de cette présente analyse est de contribuer à un débat productif.
Le ministre des Finances fait un pari hasardeux sur un cours du pétrole supérieur à 110/120 dollars à prix constants, seuil minimum pour combler l'actuel déficit budgétaire et comprimer artificiellement l'inflation par des subventions, devant être attentif également aux fluctuations monétaires tant du dollar (exportation) que de l'euro, plus de 60% de nos importations. Ces propos contredisent l'abc des fondements de l'économie publique qui a ses propres lois, applicables à tous les pays sans exception comme en témoignent récemment les crises grecque, portugaise et espagnole et les politiques d'austérité budgétaire de l'ensemble des pays développés ou émergents. Monsieur le ministre, que serait l'économie algérienne sans hydrocarbures ? L'économie algérienne est une économie totalement rentière avec 98% d'exportation d'hydrocarbures et important plus de 70% des besoins des ménages et des entreprises. Tout est irrigué par la rente des hydrocarbures, donnant ainsi des taux de croissance, de chômage et d'inflation fictifs. La richesse nationale créée puise sa source dans la relation du triptyque stock physique (stock ressources naturelles d'hydrocarbures) - stock monétaire (transformation : richesse monétaire) - répartition (modalités et mécanismes de répartition : investissement-consommation-fonds de régulation). La monnaie est avant tout un rapport social traduisant la confiance entre l'Etat et le citoyen et se pose cette question : pourquoi ce dérapage du dinar depuis six mois sur le marché parallèle avec une distorsion de plus de 45% par rapport au cours officiel de la Banque d'Algérie (1 euro coté entre 140 et 150 dinars), pouvant d'ailleurs démonter qu'existe une corrélation statistique entre le cours des hydrocarbures et la valeur du dinar algérien de plus de 70 %. En 2011, sans hydrocarbures qui contribuent à l'épongement artificiel (ne s'étant pas attaqué aux causes) tant de la dette extérieure qu'intérieure via les assainissements répétées des entreprises publiques et des services collectifs, des bonifications des taux d'intérêts et donc directement et indirectement à 80 % du produit intérieur brut via le couple dépenses publiques-hydrocarbures, le dinar flotterait avec un cours qui dépasserait 450 dinars un euro, soit une dévaluation de 300%, et le taux d'inflation non comprimé serait supérieur à 15% en référence au taux officiel. La société des hydrocarbures ne créée pas de richesses ou, du moins, très peu, transforme un stock physique en stock monétaire (champ de l'entreprise) ou contribue à avoir des réserves de change qui, du fait de la faiblesse de capacité d'absorption, sont placées à l'étranger (80% des 157 milliards de dollars, selon la déclaration en 2010 du ministre des Finances), avec un taux d'inflation et des taux directeurs des banques centrales très bas donnant un rendement très faible, voire négatif. De plus en plus d'économistes avertis se demandent alors pourquoi continuer à épuiser les réserves sachant qu'à ce rythme, on ne dépassera pas 15 ans pour le pétrole et 25 ans pour le gaz en tenant compte de la forte consommation intérieure pouvant découvrir des milliers de gisements mais non rentables économiquement. L'Algérie n'étant pas un pays pétrolier (épuisement prévu par les instances internationales dans au maximum 16 ans), le département d'Etat à l'Energie américain estime, en ce mois de mai 2011, dans un rapport que l'Algérie détient 2,37% des réserves mondiales prouvées de gaz naturel conventionnel avec des réserves estimées à 4 502 milliards de mètres cubes, loin de la Russie, classée première, qui détient plus de 47 570 milliards de mètres cubes, l'Iran, le Qatar (ces trois pays totalisant plus de 50%), le Turkménistan, l'Arabie saoudite, les Etats-Unis, les Emirats arabes unis, le Nigeria et le Venezuela, et il faudra compter à l'avenir sur la Libye. Le calcul de la durée des réserves est fonction du coût (les coûts algériens sont élevés) du prix international, qui doit être supérieur à 9/10 dollars le milliard de BTU pour le gaz naturel par canalisation (GN) et 14 dollars pour le gaz naturel liquéfié (GNL), dont les contrats à moyen terme arrivent en 2012/2014 à expiration. Or, au vu de la concurrence du gaz non conventionnel qui se commerce actuellement à 4/5 dollars le milliard de BTU, entraînant avec la technique du forage horizontal une révolution dans le domaine gazier, des exportations prévues de 85 milliards de mètres cubes gazeux et de 60/70 de milliards de mètres cubes de consommation intérieure, si l'on maintient tous les projets prévus et le bas prix actuel, n'ayant pas découvert depuis 8 ans de grands gisements malgré des dépenses de recherche colossales de la part de Sonatrach, l'épuisement prévu des réserves est à moins de 25 ans et moins de 20 ans si le cours international entre 2011 et 2020 est en dessous de 9 dollars. En conclusion, que sera alors l'Algérie avec une population en 2011 de 36 millions et en 2020/2025 de plus de 40 millions et à l'horizon 2030 de plus de 50 millions sans hydrocarbures ? Le sacrifice devant être partagé, avec cette concentration excessive du revenu national au profit d'une minorité rentière, peut-on continuellement assister à une redistribution passive de la rente des hydrocarbures, des distributions de revenus sans contreparties productives pour calmer le front social en hypothéquant l'avenir du pays qui implique l'approfondissement de la réforme globale en panne ? Cela pose toute la problématique de la sécurité nationale, du passage d'une économie rentière à une économie hors hydrocarbures tenant compte des importants bouleversements géo-stratégiques du monde que les responsables algériens évitent d'aborder sereinement assistant à des replâtrages conjoncturels au lieu de s'attaquer à l'essentiel. (Suite et fin)

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