Le rythme d'inflation annuel a connu une tendance baissière, passant de 3,9 % à 3,5 % en juin 2011, selon l'ONS, contre 3,9% en 2010 et 5,7% en 2009. Pourtant, en l'absence de mécanismes de régulation et de contrôle, les prix des produits de large consommation connaissent, comme de coutume, notamment à la veille de chaque mois de Ramadhan, des fêtes religieuses ainsi qu'à l'approche des rentrées sociales, des augmentations sans précédent, les organisations censés sensibiliser les commerçants ayant peu d'impact. Et ce, malgré les efforts de l'Etat qui consacre 10% du produit intérieur brut, soit plus de 10 milliards de dollars et des subventions concernant l'huile, le sucre, la semoule, la farine, le lait et d'autres produits comme les légumes secs. Nous assistons à une flambée des prix qui touche surtout le panier essentiel de consommation du ménage moyen algérien, comme les fruits et les légumes, les viandes rouges et blanches qui obéissent au marché libre, contribuant au malaise social, ce qui pousse l'Etat à la distribution de couffins du Ramadhan, passant de 1,2 million en 2010 - opération qui avait coûté 300 milliards de centimes - à 1,5 million en 2011. Reconnaissons que pour l'instant l'inflation est comprimée transitoirement par des subventions toujours grâce aux hydrocarbures pour calmer le front social, expliquant l'important déficit budgétaire pour 2011 ap- prochant 34% du produit intérieur brut. Quelles sont les causes de l'inflation s'agissant pour toute analyse scientifique d'aller à l'essence et non aux apparences ? Je recense quatre raisons à l'inflation en Algérie. La première est la non-proportionnalité entre la dépense publique et les impacts économiques et sociaux : 200 milliards de dollars annoncés entre 2004/2009 (pas de bilan à ce jour) et 286 milliards de dollars (Mds) entre 2010/2014 dont 130 Mds de restes à réaliser des projets de 2004//2009 pour un taux de croissance ne dépassant pas 2/3 % moyenne 2004/2010 (donc plus de 400 milliards de dollars, soit presque le programme de relance US et chinois) alors qu'il aurait dû dépasser 10% en fonction de l'importance de la dépense publique. Cela a évidemment un impact tant sur le taux d'inflation que sur le taux de chômage réel qui est largement supérieur au taux officiel. La deuxième raison, liée à la première, est la faiblesse d'une politique salariale cohérente privilégiant les créateurs de valeur ajoutée, le travail et l'intelligence au profit d'emplois-rente, ce qui fait que la productivité globale est l'une des plus faibles au niveau de la région méditerranéenne. Le ratio masse salariale sur le PIB pour 2009/2010 est inférieur à 20% contre plus de 45% à la fin des années 1976/1980 contre une moyenne mondiale supérieure à 60%, démontrant que les augmentations de salaires pour les secteurs à valeur ajoutée (y compris la santé et l'enseignement) ne sont pas la cause essentielle de l'inflation mais que celle-ci réside plus dans les emplois improductifs. La troisième raison est l'extension de la sphère informelle qui contrôle 65% des circuits des produits de première nécessité, quatre segments : celui des fruits et légumes, de la viande rouge et blanche, du poisson et du textile/cuir, ce dernier à travers les importations de valises avec plus de 40% de la masse monétaire en circulation, où plus de 80% des transactions se font en cash alors que la base de l'économie moderne repose sur le contrat et le crédit, entraînant une évasion fiscale estimée à plus de 3 milliards de dollars US dans le commerce. Mais cela concerne également le secteur productif puisqu'une enquête menée par le CREAD (Centre de recherche en économie appliquée pour le développement) révèle que sur 7 500 PME, 42% des effectifs ne sont pas déclarés et 30% de leur chiffre d'affaires échappent au fisc. D'une manière générale, en matière d'emploi, la part qui revient à l'économie informelle, pour le ministre du Travail plus de 25% de la population active avec une contribution dans la formation du PIB (produit intérieur brut) hors hydrocarbures de 20 à 25%. Et selon d'autres estimations hors hydrocarbures, ce taux dépasse 40/50 %. Idem pour la valeur ajoutée. L'allongement des circuits de commercialisation à travers leur désorganisation entre le producteur et le consommateur favorise les rentes de monopoles, donc la hausse des prix. Le contrôle s'effectue souvent sur les détaillants où d'ailleurs, selon le recensement 2010 du Centre national du registre du commerce en dix ans, de 2001 à 2010 le nombre des commerçants déclarés a plus que doublé en Algérie, passant de 697 275 en 2001 à 1 407 449 en 2011, le nombre de personnes morales (entreprises) s'élevant au 31/12/2010 à 157 158 et pour les personnes physiques (commerçants), elles sont au nombre de 1 325 417 concentrés dans le commerce de détail. Or, le nombre de commerçants non déclarés dépasserait 1,5 million selon l'UGCAA, données de 2009. La quatrième raison est l'inflation importée du fait des prix internationaux, l'Algérie important, selon les statistiques douanières algériennes, 70/75% des besoins des ménages et des entreprises, accentuée par le dérapage du dinar, les taxes au niveau des douanes s'appliquant à un dinar dévalué.