Alors que la Ligue arabe a donné trois jours à Damas pour mettre fin à la répression de la contestation, les tractations diplomatiques se poursuivent et l'idée d'une intervention étrangère continue de créer la polémique. En visite à Moscou, la chef de la diplomatie de l'Union européenne, Catherine Ashton, a appelé, jeudi 17 novembre, à la «démission» le chef de l'Etat syrien, Bachar Al-Assad. La puissante confrérie des Frères musulmans syriens a, pour sa part, assuré qu'elle accepterait une «intervention» turque en Syrie. Selon leur leader en exil, Mohammad Riad Shakfa, «le peuple syrien acceptera une intervention [en Syrie] venant de Turquie plutôt que de l'Occident, s'il s'agit de protéger les civils. (...) Nous pouvons avoir besoin de demander davantage de la Turquie, car c'est un voisin», a-t-il dit, sans préciser la nature de l'intervention que la confrérie pourrait considérer comme acceptable. Le quotidien progouvernemental Sabah a rapporté, jeudi dernier que le Conseil national syrien (CNS), qui regroupe l'opposition syrienne, dont les Frères musulmans, avait demandé à la Turquie qu'elle établisse une zone d'interdiction de vol le long de sa frontière, côté syrien, pour protéger la population. Interrogé sur ces allégations, Mohammed Farouk Tayfour, responsable politique des Frères musulmans et membre du CNS, a refusé de s'exprimer, indiquant seulement avoir discuté avec plusieurs gouvernements de «tous les moyens possibles» pour arrêter les violences. «La Syrie ne possède pas assez de pétrole» Le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, a de son côté reproché à la communauté internationale de ne pas s'élever assez fermement contre la répression de l'opposition en Syrie. «Il semble que la Syrie ne soit pas suivie par la communauté mondiale avec l'attention et la sensibilité qu'elle mérite parce qu'elle n'est pas suffisamment riche en ressources énergétiques», a estimé M. Erdogan. Il a affirmé que la Syrie n'attirait pas autant l'attention que la Libye, car «elle ne possède pas assez de pétrole». Il a accusé des puissances internationales, sans les nommer, de manifester leur «appétit» pour la Libye et d'observer le mutisme vis-à-vis des «massacres» en Syrie. Attendu en Turquie avant une tournée au Moyen-Orient, le ministre des Affaires étrangères français, Alain Juppé, a estimé jeudi dernier que le Conseil national syrien devait «s'organiser» avant toute reconnaissance officielle. «Il faut que le CNS s'organise. On a des contacts avec eux, j'ai vu à Paris M. (Burhan) Ghalioun, qui en est le président. Nous les aidons, nous avons des contacts avec eux et nous les encourageons à s'organiser», a-t-il déclaré, excluant dans l'immédiat une reconnaissance officielle par la France du CNS. Russes et chinois pour l'arrêt des violences La Chine et la Russie, alliées traditionnelles de la Syrie, ont appelé successivement à l'arrêt des violences du régime comme de l'opposition. «Nous appelons les parties concernées en Syrie à mettre un terme à la violence, à restaurer la stabilité nationale et un ordre normal dès que possible», a indiqué le porte-parole du ministère des Affaires étrangères chinois, Liu Weimin, qui a rappelé que son pays demandait à Damas de mettre en œuvre le plan arabe prévoyant la libération des manifestants et le retrait des forces armées des villes. Quant à d'éventuelles actions au niveau des Nations unies et de son Conseil de sécurité, Pékin souhaite qu'elles «aident à trouver une solution aux tensions en Syrie, à faciliter la résolution des conflits par le dialogue politique et à maintenir la paix et la stabilité au Moyen-Orient». Le ministre des Affaires étrangères russe, Sergueï Lavrov, a quant à lui indiqué que «l'initiative de la Ligue arabe du 2 novembre, que nous avons soutenue, comporte plusieurs points. Le premier déclare qu'il faut faire cesser la violence, d'où qu'elle vienne». «C'est un constat important, car la violence en Syrie ne vient pas seulement des structures gouvernementales», a-t-il ajouté.