Malgré les démonstrations de force des islamistes, les Tunisiens continuent à se mobiliser contre «la dictature d'Ennahda». Les pages Facebook officielles de la Jeunesse du parti islamiste Ennahda ont lancé un appel à un sit-in, aujourd'hui, au Bardo, devant le siège de l'Assemblée constituante tunisienne. Les militants et sympathisants du parti islamiste veulent démontrer à travers cette manifestation que leurs élus à l'Assemblée constituante ont «le soutien du peuple» et que les contestataires ne sont que «minoritaires». Bref, la confrontation continue et le Palais du Bardo est encore le théâtre, depuis le scrutin 23 octobre dernier, de multiples actions de protestation pour rappeler, la plupart, aux vainqueurs des élections qu'ils ne disposent que d'une «majorité relative». En effet, pour nombre de Tunisiens, il ne saurait y avoir une Assemblée constituante mono-céphale ni de nouveau parti unique en Tunisie. Et pour cause les Tunisiens restent attachés à une Tunisie démocratique. «Il ne s'agit pas de se faire confisquer notre révolution par des islamistes qui ont pris le train en marche !» nous confie une consœur Nadia qui refuse de se plier à l'arrogance des islamistes. Pendant que les élus de la Constituante négocient à l'intérieur du Palais du Bardo, l'avenir du pays, des centaines de manifestants hommes et femmes, certains accompagnés de leurs enfants, viennent se rassembler ainsi quotidiennement pour dire que l'heure est grave et qu'il ne faut pas badiner avec l'avenir de la Tunisie plurielle. «Ennahdha : non au retour de la dictature !» est le slogan le plus entendu ces derniers jours. Ainsi, les Tunisiens continuent d'être mobilisés contre «la dictature islamiste» qui semble poindre réellement son nez chez nos voisins. Pour preuve, au moment où nous mettons sous presse, un groupe d'étudiants salafistes continue à prendre en otage la faculté des lettres, des arts et des humanités d'El-Manouba. Ils en étaient hier à leur 6e jour d'occupation de cette enceinte universitaire. «Ils réclament notamment l'inscription des filles en niqab, une salle de prières dans l'enceinte du campus, la non-mixité des cours, l'interdiction pour des femmes d'enseigner à des étudiants hommes, et vice-versa», a indiqué M. Kazdaghli, doyen de la faculté qui espère un dénouement pacifique «sans intervention» extérieure, espère-t-il. D'autres incidents tels que des professeures insultées en raison de leur tenue vestimentaire ou des cours de dessin empêchés car les représentations sont proscrites par l'islam ont été rapportés dans la presse tunisienne. Autant d'entorses à la liberté dont se réclament les islamistes eux-mêmes. Il faut noter enfin que c'est la première fois que les choses prennent une telle tournure en Tunisie un pays jusque-là très apprécié pour son sens de la tolérance et de la modération.