«Ses jours sont comptés » dit le mage. C'est en ces termes qu'Alain Juppé a fait sa «prédiction» au micro de France Info lundi dernier. Vous l'avez bien sûr deviné, il s'agit des «jours» du régime syrien. Une déclaration qui s'inscrit sans doute dans la riche tradition française déjà illustrée par Nostradamus. Relégué au rôle de figurant lorsque BHL l'a supplanté pour traiter avec le CNT en Libye, voilà le devin des Affaires étrangères qui semble voir plus loin que le bout de son nez. Brandissant l'idée de «corridors humanitaires». Aider officiellement les populations syriennes en détresse, et dans les faits à entamer la souveraineté de ce pays, ne sera «pas totalement écartée». Sur ce point au moins, l'optimisme «militant» d'Alain Juppé risque d'être soumis à rude épreuve : «La situation en Syrie ne justifie pas pour l'instant la création de couloirs humanitaires pour venir en aide à la population civile». Cet avis émane de Valérie Amos, secrétaire générale adjointe de l'ONU aux affaires humanitaires. Qui ajoute : «Avant d'approfondir les discussions sur ces options, il est essentiel d'obtenir une meilleure évaluation des besoins exacts de la population et à quels endroits». Cela dit, ce que «Nostradamus» ne nous dit pas et qui a été révélé récemment par le Canard enchaîné, c'est que des agents de la DGSE pourraient encadrer bientôt, en territoire turc, les «combattants de l'opposition syrienne». L'hebdomadaire, pas seulement satirique, nous informe également que Sarkozy et consorts projetteraient de participer à une «intervention limitée» de l'OTAN contre la Syrie, et ce, à partir de la Turquie qui «pourrait être la base arrière» de cette «intervention limitée, prudente et humanitaire de l'OTAN, sans action offensive». Que peut bien être une intervention de l'OTAN «sans action offensive» ? Eh bien, selon le Canard, «Ankara proposerait d'instaurer une zone d'interdiction aérienne et une zone tampon à l'intérieur de la Syrie, destinée à accueillir les civils qui fuient la répression et les militaires qui déser-tent». Selon certaines sources, le principe de la «zone de protection» se situerait, évidemment, «dans la partie nord de la Syrie». Ce serait alors aux Français, aux Britanniques et aux Turcs d'assurer «un soutien éventuel à l'Armée syrienne libre». On appréciera le mot «éventuel». Un soutien «discret» com-me en Libye ? On nage en plein surré-alisme : les Libyens, pro ou anti-Kadhafi, ont déjà eu l'occasion d'apprécier la «discrétion» de l'implication occiden-tale! Décidément, le concept d' «ingérence humanitaire» cher à Bernard Kouchner est devenu le violon d'Ingres de l'OTAN. Si comme disait Clausewitz, « la guerre est la continuation de la politique par d'autres moyens », on peut dire que l'ingérence humanitaire est, sans conteste, la mascarade de l'impérialis-me ! Quant au mage, il peut manger son chapeau !