Pendant que le président Obama rend visite à Sa Majesté la reine d'Angleterre, sanctionne des entreprises qui ont continué de traiter avec le régime de Téhéran et soutient un Netanyahou qui a exposé sa vision étroite de la paix devant le Congrès US, Nicolas Sarkozy et David Cameron surfent sur une autre vague. Bien qu'Alain Juppé ait déclaré qu'un consensus international, au sujet du dossier syrien, pourrait se dégager prochainement au sein du Conseil de sécurité des Nations unies, l'affaire est loin d'être dans la poche. D'abord, il faut parvenir à convaincre le président russe, Dmitri Medvedev, de la nécessité de condamner son propre allié syrien pour sa mauvaise conduite et la répression qu'il continue de mener contre ses opposants, de prétendus «terroristes». Après les maints conseils du Premier ministre turc à propos du lancement du grand chantier de la réforme chez son voisin syrien, au tour du locataire du Kremlin de décrocher son téléphone et de s'entretenir avec Bachar Al Assad. Nul ne sait si le premier a invité le second à se dépêcher à mettre en œuvre toutes les réformes promises lors de son discours-fleuve. Ce qui est avéré, l'héritier du trône des Assad a soufflé à l'oreille de Medvedev qu'il allait poursuivre son entreprise de matage de l'opposition. Et les libertés politiques que devait consacrer en partie la levée de l'état d'urgence ? Si les réformes ont attendu onze longues années, elles peuvent encore patienter le temps que le parti Baath reprenne son souffle et retrouve toute son énergie, avec qu'une seule idée au programme : s'accrocher au pouvoir, voire s'y éterniser si l'Occident vient à relâcher son actuelle pression. Que le régime de Damas n'y compte pas trop, le colonel Kadhafi ne passe plus une nuit sans les bombardements intensifiés de l'Otan. A en croire France Soir, le colonel est même prêt à quitter le pouvoir si la chance de rester dans la Jamahiriya venait à lui être offerte. Sa dernière partition, autrement dit son renoncement à nettoyer la Libye maison par maison, ne daterait pas d'hier. Le vieux maître de Tripoli aurait perdu complètement le moral le jour de la mort de son fils Seïf Al Arab et trois de ses petits-fils. «Nous ne sommes pas des éternels», l'avait pourtant prévenu Reccep Tayyip Erdogan. Le président yéménite qui préfère assister à sa guerre civile qu'à la cérémonie de signature du plan du CCG et son homologue syrien qui a choisi la voie de la répression à celle de l'alternative politique doivent le savoir également. Ce ne serait qu'une histoire de temps que beaucoup avaient trouvé long en Côte d'Ivoire. Le «boulanger» d'Abidjan, qui avait tenté à sa manière de souffler sur le brasier de la guerre civile, se retrouve aujourd'hui aux mains de la justice ivoirienne bien qu'une future grâce présidentielle n'est pas à exclure. Ali Saleh se réveillera-t-il demain avec des commandos étrangers au pied de son lit présidentiel ? Le scénario paraît peu probable, l'Occident répétant à ceux qui veulent bien le croire que la démocratisation revient au seul choix des peuples. Mais à additionner le nombre d'assauts de la coalition en Libye et l'entrée récente dans l'arène libyenne des Tigres français, la libéralisation est aussi une affaire militaire qu'autorise le droit à la protection des populations civiles. N'arrivant toujours pas à se faire entendre au sujet d'un cessez-le-feu dans la Jamahiriya -Sergueï Lavrov a été rabroué par l'opposition libyenne-, la Russie associera-t-elle sa voix à celle des Occidentaux dans leur quête de condamnation de la Syrie ? Après l'Irak et la Libye et face à un soviétisme arabe agonisant, les intérêts économiques deviendraient plus déterminants que tout pour le géant énergétique russe…