Ni l'ordonnance d'interdiction d'accès au complexe ArcelorMittal El-Hadjar, qui lui a été adressée par le président du tribunal correctionnel de la même commune, ni les menaces qui pèsent sur lui quant aux soucis judiciaires qu'il va devoir affronter dans les prochains jours, et encore moins son exclusion de l'UGTA et sa mise à la retraite, n'ont réussi à dissuader Aïssa Menadi de cesser ses actes de perturbation. Il est toujours aussi déterminé qu'au premier jour de sa rébellion à l'organisation de travail mise en place par la direction générale ArcelorMittal. Menadi est accompagné par le même groupe de cinquante personnes qui presque quotidiennement assiège le complexe sidérurgique El-Hadjar, le siège de la direction générale et celui du conseil syndical. Bien qu'exclu de la centrale syndicale UGTA – il n'a plus la qualité de membre du conseil syndical de l'entreprise Arcelor depuis 2007, date de son élection à la députation – et mis à la retraite, Menadi n'en demord pas. Il veut revenir à la tête du secrétariat général laissé pour l'heure vacant avec le départ de son titulaire légitime élu député le 10 mai dernier. Cette revendication, Menadi l'a répétée à plusieurs reprises à qui veut l'entendre y compris aux médias. Et même devant les magistrats, les journalistes et les autorités locales et nationales qui tentent de le sensibiliser sur la nécessité de laisser faire la justice. Hier, il est passé à une étape supérieure. Ainsi après avoir menacé de s'immoler devant le portail principal où il avait placé bien en évidence des banderoles appelant au départ des cadres expatriés et à la renationalisation du complexe, il a une nouvelle fois forcé l'entrée de l'usine. Il était accompagné des mêmes personnes. Armes blanches et gourdins en main avec en sus un jerrican d'essence que Menadi a menacé de déverser sur son corps pour s'immoler, le groupe a pris la route du haut fourneau à l'intérieur de l'enceinte. Il s'agit de l'élément incontournable dans la production de l'acier, car approvisionnant les laminoirs et les aciéries en coulées continues de fonte. «Ils ont interpellé le responsable de cette installation pour l'informer qu'ils allaient la mettre à l'arrêt jusqu'à la réintégration de Menadi et le recrutement ou la confirmation à leur poste de travail de plusieurs jeunes chômeurs. Le directeur général informé a aussitôt saisi les structures concernées à l'effet de mettre un terme à cette anarchie», ont affirmé des membres du conseil syndical de l'entreprise. La situation a pris une autre tournure avec le départ précipité de nombreux cadres dirigeants à destination du siège du groupe au Luxembourg. Le staff directorial s'est pratiquement vidé de la totalité de ses cadres expatriés. A l'exception du directeur général qui est resté pour suivre l'évolution de la situation, il n'y a plus personne dans les locaux de la direction générale. Même les cadres locaux ne sont pas visibles. «Si rien n'est fait dans les prochaines 24 heures pour remettre de l'ordre dans le complexe, je m'en vais. ça ne peut plus continuer et l'abandon total de la société ArcelorMittal Algérie pourrait être décidée par le groupe dans les prochains jours», telle serait la menace exprimée par Joe Kazadi, le directeur général ArcelorMittal El-Hadjar, en présence des syndicalistes. Ces derniers étaient venus s'inquiéter de la menace que faisaient peser sur eux et sur les installations de production Menadi et son groupe d'individus. Contactés, des syndicalistes ont dénoncé le laxysme des autorités. Pour eux, il est inadmissible que dans une République nantie de textes et lois, un groupe d'énergumènes puissent impunément imposer son diktat. D'autres syndicalistes et des travailleurs ont estimé qu'à défaut de réaction des forces de l'ordre, ils vont devoir intervenir pour défendre leur outil de travail. Cette tendance à la confrontation est de plus en plus discutée. C'est dire que la situation pourrait atteindre le paroxysme au complexe sidérurgique d'El-Hadjar avec l'usage de la violence. Certes, l'on dira que la production poursuit son bonhomme de chemin et que pour l'heure rien n'est venu la perturber. Mais jusqu'à quand ? La menace exprimée par le groupe quant à mettre à l'arrêt le haut fourneau est à prendre très au sérieux. Fort de l'impunité qui semble le couvrir alors qu'il ne jouit d'aucune qualité et encore moins de titre, Menadi poursuit un combat perdu d'avance. Mais il aspire à reprendre les rênes d'un syndicat qui, il faut le préciser, est générateur de beaucoup d'avantages. Et c'est ce qui fait bouger l'ex-secrétaire général de ce syndicat qui, après avoir perdu son immunité parlementaire, n'a plus rien d'autre à perdre si ce n'est sa liberté.