Si c'est de la Turquie que nous sont parvenues les confrontations pacifiques entre l'armée et les islamistes, prenant peut-être en otage la société turque, c'est de l'Egypte que nous parvient maintenant la course vers une redéfinition des relations entre l'armée et les islamistes. Suprême défi, le président égyptien s'est engagé sur le processus de montée en cascade des états de crise. Retour de l'armée à la caserne ? Toutes les doctrines militaires dans le monde impliquent les armées régulières dans la sécurité intérieure. Elles les impliquent davantage dans l'évaluation des menaces et la nature des répliques à mettre en œuvre. Existe-t-il une armée qui n'a pas son mot à dire en ce domaine précis ? Si jusque-là, dans les pays arabes, les armées sont incontournables, qu'en serait-il désormais que les Frères musulmans vont entrer dans un choc frontal avec l'armée ? La lutte contre le terrorisme qui se prévaut de la religion est menée par les armées qui découvrent quand même qu'elles sont en retard d'une réflexion, car une telle lutte ne se mène pas exclusivement sur le terrain du recours aux armes avec en plus des méthodes et un armement conçu pour des scénarios dépassés. Alors que les pays européens croyaient n'avoir plus d'ennemis à leurs frontières, ils découvrirent que l'ennemi est à la fois loin des frontières, mais aussi à l'intérieur de celles-ci. Il est connu que l'objectif des armées est de détruire l'adversaire, de gagner mais pas de disperser les foules. Les armées ne savent pas disperser les foules. Toutes les armées. Un président islamiste, une Assemblée nationale majoritairement islamiste, un exécutif fatalement islamiste, que resterait-il de la démocratie, à moins que l'on confonde démocratie avec exclusivement le processus électoral. Fatalement, on ne peut plus dire qu'en Egypte, il y a séparation entre les pouvoirs exécutif et législatif. Qui devrait défendre le caractère républicain de l'Etat si le pouvoir islamiste égyptien refondait la Constitution à son image ?