Dans le cadre de la clôture des rencontres intitulées «Esprit Frantz Fanon» qui se sont déroulées du 1er au 10 juillet , un récital poétique a été à l'honneur dernièrement à la villa Dar Abdellatif à Alger. Depuis le début du mois, une rencontre, intéressante à plus d'un titre, sur l'esprit de Frantz Fanon, a permis à des universitaires et écrivains de revenir sur l'œuvre du psychiatre et militant de la cause algérienne. Frantz Omar Fanon est né le 20 juillet1925 à Fort-de-France et est mort le 6 décembre 1961 à Bethesda (Washington DC, USA). Il était un psychiatre et essayiste français martiniquais et algérien. Il est l'un des fondateurs du courant de pensée tiers-mondiste. «Comment guérir le colonisé de son aliénation ?» Telle est la question à laquelle n'aura cessé de répondre ce penseur engagé. Durant toute sa vie, il cherchait à analyser les conséquences psychologiques de la colonisation à la fois sur le colon et sur le colonisé. Dans ses livres les plus connus, il analyse le processus de décolonisation sous les angles sociologique, philosophique et psychiatrique. Il a également écrit des articles importants dans sa discipline : la psychiatrie. Les différents participants ont profité de ce rendez-vous ponctuel pour déclamer à la villa Dar-Abdellatif leurs poèmes. Ils ont également brillé en reprenant certains textes célèbres signés par des figures de proue de la littérature et de la poésie, à l'image de Kateb Yacine ou encore Léopold Sedar Senghor. Cette coulée de déclamations de poèmes a été accompagnée par un orchestre chaâbi composé de jeunes musiciens du quartier de Bologhine. Dans une parfaite alternance entre morceaux châabis et lectures poétiques, le récital a été l'occasion de rendre hommage à Fanon mais aussi à d'autres figures à l'exemple de l'écrivain et poète algérien Hamid Skif disparu en 2011 ou encore de Mouloud Feraoun, mort, comme Frantz Fanon, juste avant l'indépendance de l'Algérie. Pour sa part, l'écrivain togolais Sami Tcha, un habitué de la scène littéraire algérienne, a lu des passages de Peau noire, masques blancs, une des œuvres marquantes de Frantz Fanon. «C'est l'œuvre la plus littéraire de Fanon», a-t-il indiqué. Pour rappel, dans Peau noire, masques blancs, l'illustre psychiatre avait convoqué de nombreux poètes, tels qu'Aimé Césaire, pour construire sa réflexion autour du racisme. Le poète irakien Fawzi Karim a, quant à lui, levé le voile sur la destruction de la ville de Baghdad durant la deuxième guerre du Golfe en 2003 en écho aux mises en garde de Frantz Fanon concernant le retour du colonialisme sous de nouvelles formes. Une appréciation que les nombreux participants aux rencontres de Frantz Fanon n'ont pas manqué d'insister sur cette portée gravissime. Pour rappel, les rencontres, placées sous le slogan «Esprit Frantz Fanon», se sont déroulées du 1er au 10 juillet et ont été organisées par les Editions APIC. Cette manifestation littéraire s'est ponctuée par un imposant colloque et des activités littéraires aussi riches que diverses. Le colloque a réuni du 2 au 4 juillet des universitaires d'Afrique et d'Asie. Selon les organisateurs, ces rencontres ont été l'occasion idoine pour relire Fanon «à la lumière de la crise financière mondiale et ses conséquences sur les couches sociales les plus démunies ainsi que sur les révoltes dans le monde arabe, convoquant l'apport de la pensée de Fanon pour répondre aux défis d'un monde globalisé où l'oppression perdure». Il va de soi que ce genre de rencontres a réuni des intellectuels notoires, à l'image de l'économiste égyptien Samir Amin ou de la fille de l'auteur des Damnés de la Terre, Mireille Fanon Mendès-France. Des romanciers ont animé les 7 et 8 juillet des rencontres littéraires autour de phrases célèbres de Fanon dont «il ne suffit pas de rejoindre le peuple dans ce passé dans lequel il n'est plus», un extrait Des damnés de la terre.