Le verrouillage politique, économique et social que vivait l'Algérie a conduit aux événements du 5 octobre 1988. Une série de manifestations et d'émeutes violentes ont secoué le pays pendant plusieurs jours. La situation devenue incontrôlable, les autorités ont intervenu mais de manière brutale. Résultats : des centaines de morts et destructions des infrastructures de l'Etat et des biens civils, dans plusieurs grandes villes du pays à l'instar d'Alger, Annaba, Oran, Constantine et Tizi Ouzou. Ces événements, rappelons-le, ont été précédés par plusieurs éclatements populeux. En effet, il y a eu les événements du printemps berbère en 1980 à Tizi Ouzou, les manifestations d'Oran en 1984, Constantine et Sétif en 1986. L'inflation, le chômage et les mesures d'austérité, - ajoutant à cela, le désintéressement du gouvernement aux besoins vitaux du citoyen-, ont poussé des jeunes à des grèves et des protestations indémontables à travers tout le territoire. L'ordre étant rétabli le 10 octobre, le nombre de morts a été estimé à 500 avec 3 500 arrestations et des dégâts évalués à 250 millions de dollars. Dans une interview accordée à Ennahar TV, le général en retraite, Khaled Nezzar, est sorti de sa réserve et revenu sur les événements d'Octobre 88, en tenant à préciser, que le nombre de morts est de 169 à travers tout le pays. Le ministre de la Défense à l'époque des faits, a indiqué que la demande de Chadli Bendjedid d'amender la Constitution de sorte à enclencher quelques changements et réformes politiques, n'a pas était du goût de l'aile conservatrice du parti unique, le FLN, d'où son fameux discours ayant précédé les événements en question. Il a relaté qu'au même titre que les islamistes, le FLN avait «émis» le vœu d'occuper la rue. Les éléments de l'ANP, a-t-il continué, se sont alors confrontés à des groupes de manifestants, bien organisés, confirmant la thèse que des parties tiraient les ficelles au milieu de ce désordre. Khaled Nezzar a expliqué, en ce sens que l'armée se devait de protéger le pays, qui entrait dans une phase dangereuse, comme c'était le cas, en 1965, 1988, 1990 et 1991, a-t-il dit, fustigeant par la même, la classe politique d'antan en les sommant d'assumer leurs responsabilités. Dire qu'il n'y a pas eu de changements après les événements d'Octobre, serait faire abstraction du pluralisme politique, de l'ouverture du champ médiatique qui a permis la naissance de la presse indépendante ainsi que des réformes entamées par le gouvernement Hamrouche. La crise institutionnelle survient tout de suite après la démission de Chadli et l'apparition du terrorisme, deux choses qui ont bloqué le processus du changement, pour un laps de temps. Avec l'arrivée de Zeroual, le changement a repris avec l'amendement de la Constitution, qui a limité le mandat présidentiel à deux quinquennats, et pour la liberté d'expression. On a reconnu à la presse, une liberté de ton extraordinaire, qui ne verra plus le jour en Algérie, selon des observateurs. Après le départ de Zeroual, ces réformes ont été stoppées et ont fait basculé le pays dans la crise. Plus de 20 ans après... Au lieu d'avancer, le pays a reculé d'infinité de pas. Rien ne paraît changer, puisque la situation socioéconomique du citoyen algérien, n'a pas évolué d'un iota. Le 3 janvier 2011, l'Algérie renoue, encore une fois, avec les émeutes, où des violentes manifestations ont éclaté contre la flambée des prix, le chômage et le logement. L'Algérie a vécu, également, des grèves cycliques dans, pratiquement, tous les secteurs sensibles. L'Etat et pour éviter la continuité dans le contexte du printemps arabe, comme dans les pays voisins, a procédé à des réformes politiques économiques et sociales pour calmer la grogne populaire. Le 15 avril donc, le chef de l'Etat avait annoncé qu'il lancerait des réformes politiques pour renforcer le pluralisme et la démocratie, citant la révision de la Constitution, la loi sur les partis politiques, celle sur le code de l'information, sur le régime électoral, les associations et le code de l'information, la suppression de l'état d'urgence, en plus d'une batterie de mesures en faveur du front social. Il décidera de l'entame des réformes par les législatives, qu'il a fixé au 10 mai 2012. Outre la commission de surveillance des élections composée de représentants des partis politiques, participant aux élections, la nouveauté dans ces législatives est la commission de supervision qui est composée exclusivement de magistrats, dans le seul souci, de garantir la régularité et la transparence. Seulement, en dépit de toutes les garanties fournies par l'Etat, lassés, les Algériens ne seront pas nombreux au rendez-vous du 10 mai. Appelés à élire un nouveau Parlement, ils préféreront s'abstenir pour protester contre la classe politique, qui n'a pas cessé de faire des promesses sans lendemain et tourner le dos à un système verrouillé et incapable de se réformer. Pourtant, l'Etat compte bien asseoir une légitimité à partir de ces législatives et consolider les réformes entamées, lesquelles n'ont convaincu personne. Moins de trois mois, après l'installation de la nouvelle Assemblée populaire nationale (APN), le 3 septembre, la présidence annonce la nomination de Abdelmalek Sellal à la tête du nouveau gouvernement. Ce dernier, rejeté par la majorité de la classe politique, n'a pas reçu la bénédiction du citoyen, non plus, le qualifiant «de vieux nouveau gouvernement» qui ne va rien changer. Cependant, sa composante s'est engagée à poursuivre les réformes promises par le président de la République. Outre, la continuité dans l'action gouvernementale, dans le plan d'action du gouvernement Sellal, est question de combattre le terrorisme, continuer le financement des programmes et des infrastructures publiques et relancer l'économie nationale. Combattre, également, la corruption, la prolifération de la criminalité et l'adoption de nouvelles politiques de gestion dans les secteurs de l'éducation, la santé, le tourisme, de l'emploi et du logement. Dès son installation, le gouvernement s'est attaqué à l'éradication des marchés informels et au nettoyage des villes et quartiers des ordures ménagères. Une lourde taâche qu'attendent les membres du gouvernement, qui doivent s'en défaire dans pas moins de 18 mois. Réussiront-ils à faire ce que le précédent gouvernement n'a pas pu faire en 4 ans ? Eviteront-ils à l'Algérie un retour aux grèves, aux manifestations, voire même, aux émeutes, alors que les signes d'une crise sociale sont déjà palpables ?