La Turquie a obtenu jeudi le feu vert de son Parlement pour continuer ses représailles militaires contre la Syrie au lendemain du bombardement syrien meurtrier sur le village turc d'Akçakale, mais a assuré qu'elle ne voulait pas faire la guerre à son voisin. Après plusieurs heures de débats à huis clos, l'Assemblée nationale turque, où le parti du Premier ministre islamo-conservateur Recep Tayyip Erdogan dispose d'une confortable majorité, a officiellement autorisé le gouvernement à réaliser des opérations militaires en Syrie au nom de la «sécurité nationale». M. Erdogan s'est cependant efforcé de rassurer ceux qui ont vu dans cette autorisation le risque d'une dangereuse escalade militaire en affirmant que la Turquie n'avait pas pour objectif de déclarer la guerre à la Syrie. «Tout ce que nous voulons dans cette région, c'est la paix et la sécurité. C'est ça notre intention. Nous n'avons pas l'intention de déclencher une guerre avec la Syrie», a-t-il déclaré à Ankara au cours d'une conférence de presse commune avec le premier vice-président iranien Mohammad-Reza Rahimi. Le Premier ministre a souligné le rôle dissuasif de la résolution votée par le Parlement, estimant qu' «un des meilleurs moyens d'empêcher la guerre est une dissuasion efficace». «La République turque est un Etat qui est capable de protéger ses citoyens et ses frontières. Que personne ne s'avise de mettre notre détermination à l'épreuve sur ce point», a-t-il toutefois prévenu. Le vice-Premier ministre turc Besir Atalay a pour sa part souligné que la Syrie avait reconnu sa responsabilité dans les tirs de mercredi, qui ont provoqué la mort de cinq civils turcs, et présenté ses excuses. «La partie syrienne admet ce qu'elle a fait et présente ses excuses. Elle assure qu'une tel incident ne se reproduira pas», a-t-il insisté. Et l'ambassadeur syrien à l'ONU, Bachar Jaafari, d'affirmer pour sa part que la Syrie «ne cherche pas l'escalade avec aucun de ses voisins, y compris la Turquie». Ces déclarations sont intervenues après que l'armée turque a procédé jeudi matin, à la suite de sa première riposte la veille, à une nouvelle série de tirs d'artillerie sur des positions de l'armée syrienne dans les environs du poste-frontière syrien de Tall al-Abyad, juste en face d'Akçakale (sud-est). Selon une source sécuritaire locale, ces bombardements se sont interrompus dans la matinée. Mais ils pourraient reprendre à tout moment «si nécessaire», a averti un responsable turc. Selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), la riposte militaire turque, qui a notamment visé le secteur de Rasm al-Ghazal, près de Tall al-Abyad, a entraîné la mort de «plusieurs soldats syriens». Comme la veille, l'incident d'Akçakale, le plus grave survenu entre les deux pays depuis la destruction d'un avion de chasse turc par la Syrie en juin, a été fermement condamné par les alliés de la Turquie, qui ont affiché une solidarité sans faille avec ce pays membre de l'Otan. Le chef de la diplomatie française Laurent Fabius a estimé que les tirs syriens constituaient «une menace sérieuse à la paix et à la sécurité internationales», tandis que son homologue allemand Guido Westerwelle a recommandé «une réponse raisonnable à cette situation qui se détériore». La représentante de l'UE pour les Affaires étrangères, Catherine Ashton, a elle aussi «fermement» condamné les tirs syriens, tout en appelant «toutes les parties à faire preuve de retenue». Les 15 membres du Conseil de sécurité de l'ONU, saisis par la Turquie, devaient publier jeudi une déclaration condamnant vigoureusement les tirs syriens et demandant à Damas de respecter le territoire de ses voisins.