Des allées d'arbres nous sont tellement familières qu'on a fini par ne plus les voir. Pourtant, la disparition de nombreux alignements qui ornaient les routes de commune ou les entrées des agglomérations a rendu plus précieuse encore leur présence en ville, d'autant que les innombrables agressions dont sont victimes les arbres en milieu urbain en font un des éléments les plus fragiles du patrimoine urbain. Stendhal, au siècle dernier, souhaitait qu'on applique la peine capitale à quiconque abattait un arbre centenaire, contrairement à ce qui se passe dans notre pays, où il est devenu «légal» de brûler des forêts sans que les autorités compétentes ne bougent d'un iota. Sans en venir à de telles extrémités, à Mascara, des espaces verts, à l'exemple de la place Ibn-Badis, qui ne cesse de se transformer en «béton», ou le jardin Sidi-Mohamed-Boudjelelen face à la mosquée El-Islah, mitoyen avec le nouveau siège de la daïra, complètement abandonné, ont pris rapidement un décor lunaire où la dégradation est visible. Dans la wilaya de Mascara, plus un espace vert est détérioré, moins le public est enclin à le respecter. Dans ce jardin, à l'exemple d'autres qui résistent à la dégradation, durant la nuit, qui ne porte plus, d'ailleurs, conseil, des couples sans domicile fixe et autres exhibitionnistes confondent buissons touffus et nids d'amour. Le cas le plus flagrant a été un petit square, où jusqu'à 1975 les poissons rouges ornaient ce lieu de rêve, qui a vu les chaisières d'antan, au charme désuet, ne faire guère le poids face aux jeunes voyous et dépravés en chasse, qui l'ont complètement dénaturé. Pour le moment, la prudence reste de rigueur, car, semble-t-il, des personnes savent dilapider le patrimoine par le biais de mains occultes. Le jardin Pasteur, un véritable poumon, construit par un Français, aura la facture salée pour le remplacement des arbres victimes du délaissement, particulièrement les platanes. Quelques mesures ont été appliquées, comme la taille estivale, qui permet d'éliminer une grande quantité du sel accumulé dans les feuilles, même si l'utilisation de produits moins agressifs reste une solution idéale ; en vérité, un escadron de travailleurs dans ce havre de presque sept hectares où rien n'a été fait. Le fond du problème, c'est que les plus grands utilisateurs d'espaces verts ont des demandes contradictoires, on est revenu de l'utopie des urbanistes novices qui prônent l'interpénétration de la ville et de la nature et l'ouverture libre des jardins jour et nuit, avec suppression des murs et des grilles, une cause perdue d'avance, vu qu'on n'habite pas en Suisse. Une réserve prudente, juste au cas où le fantôme de Stendhal, inconnu à Mascara, viendrait déambuler sous les platanes saccagés par la main de l'homme. Le diagnostic est sans appel pour les autres espaces verts qui se sont transformés en de véritables prisons, avec baraudages inutiles et coûteux pour le contribuable, où des jets d'eau sans eau ont été complètement défigurés par une soudure de fortune pour colmater les brèches de l'argent dilapidé avec persévérance dans des marchés et autres gré à gré. Les deux ex-champs pédestres, sis à Khessibia (ex-St André) reflètent, quant à eux, des parcs qui n'en sont plus comme ceux d'antan, clos et calmes où les personnes âgées retrouvent le calme ; rien ne dissuade des couples sans vergogne,de confondre lieu de détente et lieu de débauche. Des sommes démesurées sont actuellement engagées pour en faire des lieux d'obscénités et autres comportements de dépravation à ciel ouvert. Un autre site, objet de toutes les convoitises, au lieudit Chaab El-Hamra, déçoit les espérances des amoureux de la nature et du paysage du fait du non-renouvellement de ses milliers d'arbres, qui faisaient de lui un énième poumon de la ville, sans omettre de citer la forêt, communément appelée Zaccour qui continue de subir les affres d'un pillage ignominieux. Près de la direction de la Protection civile du chef-lieu, des arbrisseaux qui ont été mis en plants de part et d'autre de cette route, ces deux dernières années, se sont vu déraciner par des sauvageons, etc. Dans des pays qui se respectent, les conséquences seraient d'une incidence palpable où les responsables, chez nous, ont oublié de penser aux adolescents, grands oubliés depuis toujours où les toboggans manquaient d'intérêt. Mais combien faudra-t-il de temps pour combler ce retard de presque six décennies ? Et surtout comment éviter les considérations financières, la dérive des gloutonneries des entreprises ramenées hors wilayas trop influentes et facilement dociles au mode de la corruption qui fait des ravages dans la wilaya de Mascara où les malfaçons reflètent ce deal malsain entre le corrompu et le corrupteur. Les exemples ne manquent pas, et nous nous refusons d'en faire un thème de propagande, car ce n'est ni le moment ni le lieu de faire propager ces observations honteuses. Enfin, les arbres, du moins ce qui en reste au niveau de la wilaya de Mascara, ne peuvent se passer de l'homme, sans ses soins constants, ils disparaîtraient. Il fut un temps où des résidents de la cité Bekkar-Mustapha, sise au chef-lieu de la wilaya, ont estimé le bon prêche d'un ancien maire ou DEC, qui a donné son accord de principe pour abandonner un lit d'oued à des particuliers pour en faire un joli jardin, qui ne servait qu'à faire des espaces de bronzette à des élus du Front de libération nationale, majoritairement imposés dans l'APC et l'APW. Où va-t-on dans la wilaya de Mascara ? Peut-on célébrer la Journée mondiale de l'arbre dans de pareilles circonstances?