Quel bilan tirer de la visite du président français qui a pris fin hier ? D'ores et déjà, les observateurs des rives de la Méditerranées, ont noté deux avancées notables : le premier pas de conciliation historique et le rapprochement des deux pays sur des questions d'actualités qui divisaient, jusque là Paris et Alger. Les deux préoccupations ont presque occulté le volet économique (signature de contrats, l'installation de l'usine Renault, l'exploitation du gaz de schiste...) qui semblait pourtant vital, pour les deux parties. Sur le contentieux historique entre l'Algérie et son ancien colonisateur, il faut bien reconnaître, en effet, que François Hollande a surpris son monde –ici et surtout ailleurs- en annonçant reconnaître la «brutalité» de la colonisation, même s'il a bien pris soin de ne citer que les événements du 8 Mai 1945. A noter que lors de son arrivée, il avait averti qu'il n'était pas venu «présenter des excuses ou demander pardon». Cette grande première «concession» justifiera bien le faste avec lequel il a été accueilli, à Alger, puis à Tlemcen. Le hôte français a eu plusieurs petits gestes qui vont dans le sens d'une réconciliation (dépôt d'une gerbe de fleurs au Sanctuaire des Martyrs, hommage rendu à Maurice Audin, un indépendantiste français mort pour l'Algérie...). Des gestes qui en appelleront certainement d'autres, sauf si, du côté français, on décide d'adopter une autre lecture ; ce qui n'est pas à exclure, tant que rien n'est consigné noir sur blanc. Cela dit, le litige sur la colonisation est loin d'être résolu. Il appartiendra aux deux parties de donner une forme à cet acquis et qui n'est pour l'instant pas envisagé. Autre volet des discussions algéro-françaises à cette occasion : la crise malienne. Là encore, le rapprochement entre les deux pays, est bénéfique pour toute la région du Sahel qui traverse une situation explosive, depuis l'apparition des groupes islamistes liés à Al-Qaïda dans le nord du Mali. Il faut dire qu'avant cette visite, Alger et Paris n'étaient pas sur la même longueur d'onde. Cette visite du président Hollande aura donc permis de rapprocher les deux pays, qui seraient désormais en «convergence», selon le chef de l'Etat français. Paris a fait un pas en direction des Algériens. «Il convient de faire du dialogue politique, de faire tout pour qu'une négociation puisse permettre au Mali de recouvrer son intégrité territoriale», a reconnu le président Hollande. Ce qui a toujours été, fait-il rappeler, la devise algérienne sur cette question. C'est aussi le résultat des efforts déployés par Alger, envers notamment les représentants du groupe islamiste touareg Ansar Dine, l'un des «maîtres» du nord du Mali. Alger a réussi à convaincre ce mouvement de rompre ses liens avec les groupes terroristes affiliés à Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), qui imposent leur loi dans le Nord de ce pays. Mais il reste des zones d'ombre qui font que toute cette convergence peut s'estomper. Plus porté sur la solution militaire, Paris a déjà lancé une offensive diplomatique qui a abouti jeudi à l'adoption, par le Conseil de sécurité de l'ONU, d'une résolution ouvrant la voie au déploiement de troupes étrangères au Mali. Alger qui défend légitimement ses intérêts dans cette affaire, continue ses démarches pour éviter l'embrasement, et veut avoir des garanties sur les conséquences d'une pareille offensive militaire sur la situation à nos frontières sud, qui risquent ainsi d'être débordées en cas d'opération massive.