Un recueillement à la mémoire du réalisateur algérien Abderrahmane Bougermouh a eu lieu, samedi après-midi, au niveau de l'association El-Djahidia, à Alger. Décédé la semaine dernière, suite à une maladie, Abderrahmane Bouguermouh est et restera une figure de proue du cinéma algérien. Ce recueillement a eu lieu en présence d'une foule nombreuse, composée essentiellement de réalisateurs et d'artistes. Ces compagnons de longue date sont revenus sur le riche parcours de cet artiste hors du commun. Ils ont évoqué son professionnalisme en tant que cinéaste ainsi que son esprit poétique. L'acteur Saïd Hilmi s'est remémoré avec nostalgie et émotion à la fois ses anecdotes avec feu Bouguermouh, notamment lors du tournage du film La colline oubliée. De son côté, le réalisateur Lamine Merbah a mis en exergue l'importance qu'occupait le défunt sur la scène cinématographique algérienne. Il a également rappelé les difficultés que rencontrait le défunt pour la réalisation de ses projets. Khadra Boudhane, membre du comité de l'organisation du Festival du film amazigh, a mis l'accent sur le côté humain de Bouguermouh. «C'était, dira-t-elle, une personne qui n'hésitait pas à aider les jeunes talents à percer dans le monde du cinéma.» Pour rappel, Abderrahmane Bouguermouh est né le 25 février 1936 à Ouzellaguène, à Béjaïa. Fils d'un instituteur de la sévère Ecole normale française et d'une mère analphabète qui ne connaît que les poèmes et chants kabyles. Etudes secondaires à Sétif où il voit de près l'horreur et la mort lors des événements de 1945. En 1957, il rencontre l'écrivain Mouloud Mameri ! Début d'une longue amitié. Après un passage à l'IDHEC (Institut des hautes des études cinématographiques) en 1960, Bouguermouh réalise des émissions de variétés pour la télévision, à Cognacq Jay. En 1963, il retourne au pays et participe à la création du CNCA (Centre national cinématographique algérien). Il en est exclu en 1964, à cause de ses idées. En 1965, sur un texte de Malek Haddad, il tourne Comme une âme, un moyen métrage en berbère. Le film est refusé par le ministère qui exige une version arabe. Le film ne sera jamais diffusé. De 1965 à 1968, il réalise une série de documentaires de commande et prend contact avec les premiers intellectuels de la revendication berbère, Hannouz, Taous Amrouche, Mouloud Mameri, Batouche Mouloud et Bessaoud Mohand Arab. Le réalisateur s'intéresse à un documentaire archéologique avant de tourner un autre moyen métrage, La grive, en 1967. Plusieurs fois primé, le film constitue, selon les journalistes, l'une des premières anthologies cinématographique algériennes. A partir de la fin des années 1960, il tourne plusieurs courts métrages et contribue par la réalisation d'un épisode au film collectif L'enfer à dix ans (1968). En 1968, il dépose La colline oubliée à la commission de lecture. Dans une lettre d'intention, il précise que ce film ne peut se faire qu'en kabyle. Le projet sommeillera dans les tiroirs. Commence alors une longue traversée du désert au cours de laquelle il collabore avec Mohamed-Lakhdar Hamina, comme assistant réalisateur, dans Chronique des années de braises, en 1973. Il réalise successivement pour la télévision (la RTA) deux longs métrages : Les Oiseaux de l'été (1978) et Kahla wa beida (1980), grand succès populaire. En 1987, il tourne son premier long métrage en 35 mm Cri de pierre, plusieurs fois primé à l'étranger. En 1989, on lui accorde, enfin, l'autorisation de tourner en berbère La Colline oubliée (1997). Abderrahmane Bouguermouh décède le 3 février 2013, à l'hôpital de Birtraria (Alger) à l'âge de 77 ans, des suites d'une longue maladie.