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Le déclin de l'impérialisme contemporain (2e partie)
Publié dans La Nouvelle République le 02 - 03 - 2013

Le stade ultime - impérialiste - du système d'économie politique capitaliste se particularise par huit caractéristiques, dont nous avons présenté les six premières la semaine dernière. Voici les deux derniers traits spécifiques de l'impérialisme contemporain.
La Grande Guerre (1914-1918) a entraîné l'élimination d'une immense force productive (20 millions de morts et autant de blessés), une baisse de plus du tiers des capacités de production des puissances européennes et un repartage des zones coloniales d'exploitation dont l'Allemagne a été exclue. L'Allemagne nazie tentera vingt ans plus tard de se tailler un nouvel empire colonial en Europe de l'Est et en Union soviétique socialiste, avec le succès que l'on sait. Un jour, à Stalingrad, les peuples soviétiques ont brisé, pour toujours, la machine de guerre impérialiste nazie des Krupp, Messerschmitt et de l'IG Farben. Le krach boursier de 1929 et la grande dépression qui suivit entraîna une chute de production encore plus sévère, soit 30% des forces productives dilapidées aux Etats-Unis seulement. La Seconde Guerre mondiale, avec 50 millions de morts, des dizaines de millions d'estropiés et d'énormes destructions civiles et militaires provoqua l'élimination d'immenses forces productives, une chute drastique de la production de marchandises et le repartage des zones d'influences à travers le monde. Le mouvement de libération nationale et de décolonisation qui suivit la Seconde Guerre mondiale, 1949, libération de la Chine,1959, libération de Cuba, 1962, libération de l'Algérie, 1975, victoire du peuple vietnamien, 1979, Révolution iranienne,1989, effondrement du social-impérialisme soviétique, marquant le deuil définitif de l'utopique coexistence pacifique (entre deux systèmes sociaux antagonistes, doctrine que l'Union soviétique avait proclamée vers 1956), modifia l'équilibre des forces géostratégiques mondiales et entraîna la redistribution des sphères de contrôle, d'exploitation et de militarisation. Les agressions impérialistes visant la néo-colonisation de ces pays provoquèrent un brassage des alliances et des zones de contrôle des ressources naturelles et énergétiques, des marchés, des secteurs d'exportation de capitaux et de surexploitation du travail salarié et de confiscation de la plus-value – toujours se rappeler : s'il n'y a pas exploitation du travail salarié, il n'y a pas de plus-value et par conséquent il n'y a pas de profits. La source de toute la richesse sous l'impérialisme contemporain Sous le système d'économie politique impérialiste, le produit du travail salarié se divise en deux parts inégales, pas davantage : A) le «travail nécessaire» : La valeur de la partie de la journée de travail de l'ouvrier qui assure la reproduction étendue de la force de travail social. Le salaire de l'ouvrier doit donc couvrir à la fois le coût de sa propre reproduction et le coût de son renouvellement en tant que classe sociale (coûts associés à l'entretien de sa famille ainsi que les coûts associés à la survie de l'armée de réserve des travailleurs). La valeur du «travail nécessaire» se divise donc en deux parts inégales : le salaire net encaissé par le travailleur pour sa survie immédiate et celle de sa famille et les taxes et retenues, assurances, cotisations, fonds de pension et impôts en tout genre dont une partie servira à défrayer le coût des immobilisations et des services publics (soins de santé, écoles, universités, garderies, transport, culture, loisirs, etc.). B) Le «surtravail» est l'autre portion de la valeur produite par le travail salarié. C'est la portion non payée de la journée de travail de l'ouvrier que l'on appelle «plus-value» (ce que le travail vivant de l'ouvrier ajoute en valeur à la marchandise-matière première morte) avec laquelle, le capitaliste paiera lui-même ses impôts et charges sociales et qui comprend finalement toutes les formes de profits capitalistes (redevances, rente foncière, bénéfices sur actions, profit commercial, etc.). L'impérialisme, c'est la crise économique systémique Avec la résurgence de la crise économique lors du krach boursier de 2008, on constate une surcapacité de production de biens et de services, d'où l'inévitable destruction des forces productives (fermetures complètes ou partielles d'usines, délocalisation d'entreprises industrielles et de services, chômage catastrophique, emploi à temps partiel et travail précaire ou au noir, destruction ou dilapidation en pays développé d'une portion des aliments pendant que les populations des pays sous-développés sont affamées, etc.). On observe également, une baisse drastique des taux d'intérêt payés sur les placements, ce qui entraîne souvent des rendements peu intéressants sur les investissements et les placements boursiers – pendant que certains monopoles s'en tirent convenablement, on observe une baisse générale des taux de profits moyens et un grand nombre d'entreprises capitalistes déposent leur bilan ou se font absorber par leurs concurrents. Comment les pontes impérialistes ont-ils tenté de faire face à ces défis économiques récurrents ? Selon les pays, ils ont implanté l'une ou l'autre ou les quatre mesures suivantes : I) Afin d'enrayer la baisse moyenne de profitabilité et pour redresser leur barque économique en train de sombrer, le premier axe des efforts des oligarchies financières internationales – à travers les politiques économiques et sociales des gouvernements à leur solde – a été de rejeter sur le dos des travailleurs, le coût total des services publics qui pourvoient à la reproduction de la force de travail social (travailleurs et aussi armée de réserve des chômeurs). Il a suffi pour les gouvernements de réduire la part du «travail nécessaire» – c'est-à-dire, en définitive, de réduire la valeur relative des salaires des ouvriers en laissant monter les prix inflationnistes en haussant les soi-disant «tickets modérateurs» et les coûts des services publics assumés par les consommateurs et en augmentant les charges fiscales et les retenues à la source grevant les salaires des travailleurs et de tous les employés. II) Le deuxième axe des attaques menées par les gouvernements au service des riches en vue de réduire la part du «travail nécessaire» par rapport au «surtravail» – générateur de plus-value – consiste à réduire drastiquement les services en saquant du personnel public et parapublic en éliminant parfois complètement certains services collectifs nécessaires à la reproduction étendue de la force de travail. La privatisation des services publics (traitement de l'eau potable, des déchets et des eaux usées) et l'adjudication exclusive aux entreprises privées des projets pharaoniques de construction d'infrastructures publiques sous mode de PPP (partenariat-public-privé) sont également des mesures de cette nature – c'est-à-dire des mesures de transfert des fonds publics aux capitalistes privés. Toutes ces mesures ont pour effet de diminuer globalement la portion du «travail nécessaire» et d'augmenter d'autant la portion du «surtravail» et donc la portion de la plus-value (et des profits) produite par l'ouvrier pendant sa journée de besogne, sans pour autant augmenter ni la durée de la journée de travail, ni la quantité de marchandises produites, ce qui serait nuisible, puisque de toute façon, les marchés sont encombrés de marchandises invendues... Inutiles d'en rajouter... Augmenter les profits sans augmenter la production. III) Le troisième axe des efforts menés par les nababs financiers malins pour se sortir du pétrin et mettre fin à la baisse tendancielle des taux moyens de profits – s'extirper de la difficulté d'accumuler le capital nécessaire à la reproduction élargie de leur système déconfit – consiste à prêter des montants astronomiques aux Etats créanciers de manière à plomber le service de la dette servant à rembourser le capital et les intérêts aux banquiers-créanciers. Environ 75% des revenus des Etats impérialistes occidentaux proviennent des salariés alors que les charges fiscales des entreprises comptent généralement pour moins de 15% et vont en diminuant. Ce stratagème a été rendu possible, sinon grandement facilité, par l'abrogation en 1971 des Accords de Bretton Woods (signés en 1944 par 44 nations alliées – excluant l'URSS) qui structuraient le système monétaire impérialiste mondiale autour du dollar américain assujetti à la convertibilité du dollar US en valeur-refuge-or. En abrogeant cette contrainte de convertibilité-or, il devenait loisible aux Etats-Unis d'émettre autant de dollars qu'ils le souhaitaient sans avoir à en garantir la conversion en valeur-or, ce qui leur était devenu impossible, les réserves d'or des Américains étant largement insuffisantes. Les oligarques financiers se préparaient ainsi à hypothéquer l'économie du monde «libre» (sic) en repoussant plus avant le jour de l'effondrement. Depuis quelques années, l'euro s'est engagé sur le même sentier dévoyé pour obtenir les mêmes résultats délurés. Vous ne devez pas vous étonner si aujourd'hui la France, l'Allemagne, l'Equateur, le Venezuela, la Roumanie, l'Iran et la Libye tentent tous de récupérer leur or. Chacun de ces pays se prépare à la grande dévaluation du dollar américain en faillite. IV) Le quatrième axe des efforts déployés par les riches pour se sortir de la dépression économique et pour contrer la diminution de la plus-value extraite du travail salarié dans les centres impérialistes plus anciens (par rapport aux pays impérialistes dits «émergents» ou «ascendants» où les salaires sont pour le moment, inférieurs à leurs concurrents), consiste à pousser au maximum la recherche-développement, la mécanisation, l'informatisation et la robotisation de la production. Observant ce phénomène, qui n'est pourtant pas récent, les intellectuels bourgeois ont inventé les frauduleux concepts d'«économie du savoir et des connaissances» et d'«économie des nouvelles technologies», deux fumisteries. L'économie politique, l'infrastructure de production et la superstructure idéologique, politique, juridique et militaire ainsi que les classes sociales spécifiques à «l'économie politique du savoir et des technologies» n'existent tout simplement pas. La connaissance – la science et la technologie – ont toujours fait partie de
l'infrastructure du système de production et de circulation capitaliste, particulièrement en phase impérialiste. L'innovation n'est pas une nouveauté et a toujours accompagné le développement impérialiste. Le soi-disant miracle industriel allemand dans les années trente, s'est construit sur cette capacité d'innover. Le soi-disant miracle japonais et le miracle étatsunien dans les années soixante et pendant les Trente Glorieuses ont été basés sur cette capacité d'innover et de surproduire (accaparant la plus-value extra) en augmentant la part de capital constant (mécanisation-robotisation-informatisation) dans la composition organique du capital, ce qui occasionne justement, la baisse tendancielle du taux moyen de profit. Par l'innovation scientifique et technologique, les capitalistes monopolistes tentent de repousser les limites physiques de l'exploitation du temps de travail et de l'effort salarié en faisant produire davantage de «valeur marchande» en moins de temps, ce qui réduit d'autant la portion de «travail nécessaire» par rapport à la portion de «surtravail» au cours d'une journée de travail normale, accroissant ainsi, la part de plus-value relative et extra qui s'ajoute à la plus-value absolue et augmente de ce fait la portion des profits pour une accumulation supplémentaire de capital préalable à sa reproduction étendue... espèrent-ils... Nous verrons qu'il en va autrement dans le monde réel. (Suite et fin)


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