Le secrétaire d'Etat américain, John Kerry rencontre dimanche, le président islamiste égyptien Mohamed Morsi, au dernier jour d'une visite au Caire où il a appelé pouvoir et opposition à s'entendre pour sortir le pays de l'impasse politique et de la crise économique. Arrivé samedi dans une capitale égyptienne sous tensions, le nouveau patron de la diplomatie américaine a vu, hier, le ministre de la Défense Abdel Fattah al-Sissi avant de s'entretenir avec M. Morsi, puis de s'envoler vers Ryad pour la septième étape de sa première tournée internationale. Il a prévenu à l'avance qu'il discuterait avec le président égyptien de la façon dont Washington peut aider le pays le plus peuplé du monde arabe à se sortir du marasme économique. «Je parlerai au président Morsi des moyens spécifiques par lesquels les Etats-Unis, le président (Barack) Obama, voudraient être impliqués, qu'il s'agisse d'aide économique, d'appui au secteur privé ou de soutien aux exportations égyptiennes vers les Etats-Unis», a déclaré M. Kerry. Il a jugé «essentiel» de remettre en marche l'économie égyptienne, en plaidant pour un accord avec le Fonds monétaire international (FMI). L'Egypte est en négociations avec le FMI pour un prêt de 4,8 milliards de dollars, jugé capital pour restaurer la confiance dans l'économie, qui a pâti d'un effondrement des investissements étrangers et de la chute du tourisme en raison de l'instabilité politique. Un accord préliminaire avait été conclu en novembre 2012, mais ce prêt a été reporté en raison des troubles politiques. M. Obama avait promis en 2011 un allègement de la dette de l'Egypte vis-à-vis des Etats-Unis, à hauteur d'un milliard de dollars, dont 450 millions sont en négociations entre Le Caire, l'administration américaine et le Congrès. Deux ans après la chute du régime autoritaire et pro-occidental de Hosni Moubarak, renversé par une révolte populaire, l'Egypte reste le deuxième récipiendaire de l'aide extérieure américaine – derrière Israël – avec 1,5 md USD par an, surtout pour l'armée. Samedi, M. Kerry avait lié la crise économique à l'impasse politique, appelant régime et opposition à faire «des compromis significatifs». Depuis l'élection en juin 2012 de Mohamed Morsi, premier chef d'Etat islamiste et civil d'Egypte, le pays est plongé dans des crises à répétition, et le Front du salut national (FSN), principale coalition de l'opposition, a appelé à boycotter les législatives qui débutent en avril. M. Kerry avait vu samedi des opposants et a rencontré dimanche des représentants de la société civile. Mais deux des principaux chefs du FSN, Hamdeen Sabbahi et Mohamed ElBaradei ont boycotté l'entrevue, invoquant des pressions américaines pour les convaincre de participer aux législatives. Il a néanmoins téléphoné à M. ElBaradei et rencontré Amr Moussa, lui aussi un dirigeant du FSN. M. Kerry a assuré que les Etats-Unis «ne s'ingér(aient) pas, ne pren(aient) pas position pour un gouvernement, une personne, un parti, une idéologie» en Egypte. La crise se traduit également depuis des semaines par des violences entre manifestants et forces de l'ordre qui se sont poursuivies au cours du week-end à Mansoura (nord) ainsi qu'à Port Saïd (nord-est). Allié pendant 30 ans au régime Moubarak, Washington marche sur des oeufs avec «la nouvelle Egypte» de M. Morsi, M. Obama semblant privilégier sa relation avec le président égyptien. Pour les Américains, le dilemme est de soutenir les aspirations démocratiques des Egyptiens sans fâcher l'un de ses principaux alliés régionaux lié à Israël par un traité de paix. M. Kerry a d'ailleurs exprimé sa «reconnaissance au président Morsi» pour avoir contribué au cessez-le-feu de novembre 2012 à Gaza entre Israël et le Hamas. Un responsable du département d'Etat s'est félicité d'une «constante bonne conversation entre Israéliens et Egyptiens», qu'il s'agisse de Gaza ou du Sinaï.