Le tout nouveau bédéiste algérien Amine Mohamed Rahmani signe Algerian Love (Un amour algérien), une première œuvre burlesque dans le style japonais du manga sur le thème des relations amoureuses chez les jeunes, qui paraît aux éditions algériennes «Z-Link». Présentée comme un «Shônen», une catégorie destinée aux adolescents (garçons et filles) dans la culture manga, Algerian Love explore sur le ton de la satire sociale, l'univers de Nouri, un lycéen timide qui reçoit un jour une mystérieuse lettre de rendez-vous amoureux, en réalité un canular que lui font ses camarades de classe. Ecrite en arabe algérien, cette bande dessinée en cinq chapitres à l'humour décapant s'inspire des codes du manga japonais (prédominance de l'action sur la narration, accentuation des traits des personnages, scènes délirantes, découpage particulier des planches, etc.), que l'auteur utilise pour décrire un contexte local et parler des travers de la société algérienne. Grâce à un scénario aux rebondissements multiples, le lecteur est embarqué avec le héros dans ses tentatives de contrecarrer les plans de la diabolique Rania, une fille qui veut le piéger, en publiant sur les réseaux sociaux une photo de lui et de Leïla, l'exposant aux foudres de sa brute de frangin, surnommé «Rabiâ el kital» (le printemps du combat). Amine Mohamed Rahmani évoque avec ce scénario les nombreuses difficultés que peut rencontrer un jeune lycéen dans son développement amoureux, à cause des pressions sociales et des «racontars» qui nuisent à la réputation des uns et des autres, tout en mettant en avant la solidarité entre amis, une des valeurs les plus véhiculées par le genre du manga. Privilégiant la créativité à la finesse du trait, les planches en noir et blanc de l'auteur se caractérisent, quant à elles, par leur aspect foisonnant et dynamique, qui convient mieux au ton humoristique du scénario et aux imbroglios parfois loufoques auxquels le héros est confronté. Les personnages, bien que présentés de la manière la plus manichéenne qui soit entre méchants et gentils suivant les règles de l'art japonais de la BD, offrent l'avantage d'être plus nuancés pour certains, à l'exemple de Rania dont le bédéiste dépeint les propres difficultés familiales, sans doute à l'origine de sa jalousie et sa méchanceté. Algerian Love contient également des dessins, placés en intermèdes des chapitres, reproduisant des scènes de «drague» à l'algérienne à travers des formules typiques aux métaphores parfois douteuses avec lesquels les jeunes tentent d'aborder des passantes dans la rue. Fraîchement diplômé en préparation physique de l'université de Biskra, Amine Mohamed Rahmani enrichit, avec Algerian Love, le catalogue de la maison d'édition de «Z-Link» qui propose, depuis sa création en 2007, de rassembler tous les talents algériens de la BD, encore inconnus, afin de redynamiser le 9e art en Algérie. Amine Mohamed Rahmani expose, par ailleurs, jusqu'au 10 juillet des planches extraites de cette bande dessinée aux côtés d'un dizaine d'auteurs, à la galerie du centre commercial de Bab Ezzouar (Alger), dans le cadre de «Dz-Manga», une manifestation qui propose des ateliers de dessin pour enfants en plus de stands dédiés à la vente des publications de la même maison d'édition. Phénomène de masse au Japon, le manga est très ancré dans la culture japonaise où son apparition remonte à la fin du XIXe siècle, avant de connaître une audience mondiale à partir des années 1980. Popularisé en Algérie grâce aux adaptations en dessins animés, diffusés sur les chaînes de télévision françaises, puis algériennes dans les années 1990, et grâce à internet aujourd'hui, le manga apparaît dans le paysage éditorial local dans les années 2000 avec des dessinateurs bédéistes qui adaptent cette forme d'expression à la culture de la bande dessinée algérienne.