Le président égyptien a nommé officiellement l'économiste Hazem El-Beblaoui comme Premier ministre intérimaire du gouvernement de transition. Cette fois-ci, les salafistes du parti Al-Nour, deuxième mouvement islamiste d'Egypte après les Frères musulmans, ont assuré qu'ils ne s'opposeraient pas à cette nomination, alors qu'ils avaient refusé celle de Mohamed El-Baradei. Ce dernier deviendrait vice-président en charge des Affaires étrangères. Hazem El-Beblaoui n'est pas un inconnu pour les Egyptiens. En 2011, après la chute de Hosni Moubarak, cet économiste de renom international a géré les affaires de l'Etat au plus haut niveau – en tant que vice-Premier ministre et ministre des Finances. Mais après seulement quelques mois au gouvernement, il quitte son poste pour protester contre la mort de plusieurs coptes, tués par les forces de l'ordre. Agé de 76 ans, Hazem El-Beblaoui a fait une partie de ses études à Paris et à Grenoble, avant d'enseigner l'économie à l'université d'Alexandrie à partir de 1965. En 1980, il quitte son pays pour entamer une carrière internationale – d'abord dans une banque de Koweït, ensuite aux Nations unies, en tant que secrétaire exécutif de la Commission économique et sociale pour l'Asie occidentale. Grand connaisseur des affaires économiques du Proche-Orient, Hazem El-Beblaoui a écrit de nombreux ouvrages sur le commerce international. Il a toujours défendu l'idée du libre-échange et le respect de l'Etat de droit. Hazem el-Beblaoui a été fait chevalier de la Légion d'honneur française. La formation salafiste était la deuxième force politique du Parlement avant la chute du président Morsi, avec une grande puissance de mobilisation. Plus tôt, le chef de l'Etat par intérim, Adli Mansour, avait fixé un calendrier pour l'organisation d'élections législatives avant 2014, que les Frères musulmans ont dénoncé. Selon le président, des élections parlementaires auront lieu une fois que des amendements à la Constitution, actuellement suspendue, auront été soumis à référendum, dans un délai maximal de quatre mois et demi. Ce scrutin sera ensuite suivi d'une élection présidentielle, qui devrait avoir lieu après la réunion du Parlement nouvellement élu. La Constitution adoptée en décembre dernier et accusée par l'opposition d'ouvrir la voie à l'islamisation de la législation a été suspendue la semaine dernière après la destitution du président Mohamed Morsi par l'armée. Mercredi dernier, l'armée a nommé M. Mansour, président de la Haute Cour constitutionnelle, au poste de président intérimaire. La chambre haute, qui assurait le travail législatif et était dominée par les islamistes, a été dissoute. Essam El-Erian, numéro deux de l'aile politique de la confrérie, a dénoncé «un décret constitutionnel écrit par un homme nommé par des putschistes [qui] ramène le pays à la case départ». Au lendemain d'une manifestation durement réprimée par les militaires, dans laquelle 51 personnes sont mortes, les Frères ont appelé à une nouvelle journée de manifestations. Cet état de fait intervient au moment où les islamistes des Frères musulmans ont organisé une manifestation grandiose au Caire. Sur la place de «Rabiaa Al-Adawiya» où des milliers de manifestants islamistes se sont rassemblés, des dizaines de jeunes s'adonnent à des entraînements paramilitaires. Des chefs islamistes refusent toujours de quitter les rues, indiquant qu'ils n'ont pas peur d'être arrêtés par les forces de sécurité. «Si nous refusons de quitter la rue, ce n'est pas parce que nous avons peur des forces de l'ordre. Nous sommes ici pour mourir en martyrs et gagner une place au paradis», a indiqué un leader des Frères musulmans devant les caméras de télévision. En réaction à la crise égyptienne, l'Algérie et par la voix du porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Amar Belani, a affirmé qu'elle est profondément préoccupée par les évènements sanglants qui se sont produits lors des dernières manifestations en Egypte. «Nous exhortons toutes les parties prenantes égyptiennes à faire preuve de la plus grande retenue pour conjurer le spectre de la violence qui met en jeu la stabilité et la sécurité de ce pays frère», a-t-il ajouté. «Nous les encourageons vivement à œuvrer résolument en faveur d'une transition pacifique fondée sur la recherche d'un règlement consensuel et durable à la crise actuelle», a conclu le porte-parole du ministère des Affaires étrangères. En fin de soirée d'hier, un communiqué des forces armées égyptiennes lu à la télévision d'Etat a appelé les Egyptiens à rejeter la violence et d'adhérer à la feuille de route pour sortir le pays de la crise. Dans le même message, les forces armées souhaitent que le mois de Ramadhan puisse apporter la paix et la réconciliation entre les Egyptiens.