Le secrétaire d'Etat américain John Kerry a entamé dimanche une visite de quelques heures en Egypte, la première chez le grand allié arabe des Etats-Unis depuis la destitution il y a quatre mois du président islamiste, Mohamed Morsi par l'armée. M. Kerry est arrivé au Caire à la mi-journée, à la veille de l'ouverture du procès du chef d'Etat déposé, avec pour objectif de resserrer les liens entre Washington et l'Egypte, alliée de longue date, bousculés par le coup de force contre le premier président élu démocratiquement et la répression meurtrière de ses partisans qui a suivi. Washington a, ainsi, gelé partiellement son aide, essentiellement militaire, à l'Egypte en mesure de rétorsion, aggravant la «phase délicate» des relations bilatérales, selon la diplomatie égyptienne. Les Etats-Unis ont soutenu durant ces trois décennies de présidence le prédécesseur de M. Morsi - Hosni Moubarak, renversé par une révolte populaire début 2011 - faisant du plus peuplé des pays arabes un allié de poids pour tenter de maintenir la stabilité dans la région. En octobre, le «recalibrage» de l'aide à l'Egypte -1,5 milliard de dollars par an dont 1,3 milliard d'aide militaire - a jeté un froid sur les relations entre les deux pays. L'Egypte affirme désormais vouloir «élargir (ses) options» pour «servir (ses) intérêts nationaux», selon le porte-parole du ministère des Affaires étrangères Badr Abdelaty. M. Kerry doit rencontrer dans la journée son homologue Nabil Fahmy, le président par intérim Adly Mansour, ainsi que le nouvel homme fort du pays, le chef de l'armée, le général Abdel Fattah Al-Sissi, lors de sa première étape d'une longue tournée au Proche-Orient et dans le Golfe. Leurs discussions porteront entre autres sur la transition politique promise par la feuille de route rédigée par les militaires et ses avancées afin de déterminer quand «il sera possible de lever le gel (de la livraison) de certains équipements», a indiqué un haut responsable du département d'Etat. M. Kerry doit aussi plaider, a-t-il ajouté, pour que cette transition soit «viable», «démocratique» et qu'elle «inclut toutes les parties», alors que les autorités poursuivent leur implacable répression des Frères musulmans, la confrérie de M. Morsi qui avait remporté haut la main les élections législatives organisées fin 2011. Plus d'un millier de personnes - en majorité des manifestants pro-Morsi - ont été tuées depuis son éviction, et les autorités ont arrêté quelque 2.000 islamistes, dont la quasi-totalité des dirigeants des Frères musulmans. M. Morsi lui-même sera jugé à partir de lundi avec 14 co-accusés - dont des dirigeants de la confrérie - pour «incitation au meurtre» de manifestants devant son palais présidentiel fin 2012. M. Kerry, qui doit passer six heures au Caire, doit également rencontrer des acteurs de la société civile et évoquer avec eux - à huis clos - les inquiétudes des défenseurs des droits de l'Homme. La feuille de route prévoit un référendum sur une nouvelle Constitution, actuellement en cours de rédaction, puis des élections législatives et présidentielle d'ici mi-2014. Mais à la veille du procès de M. Morsi, certains responsables évoquent, sous le couvert de l'anonymat, d'autres requêtes de l'administration américaine, sans toutefois donner plus de détails. Si Washington a demandé la libération de M. Morsi et la fin des procès politiques, les Etats-Unis se sont toujours refusé à qualifier sa déposition de «coup d'Etat». Le gel de l'assistance américaine au Caire a également reçu un accueil glacial à Ryad - autre grand allié stratégique des Etats-Unis - où M. Kerry doit se rendre plus tard dimanche pour des discussions, qui s'annoncent houleuses, avec le roi Abdallah. Le Caire est la première étape d'une tournée de 12 jours qui doit mener M. Kerry en Arabie saoudite, en Israël, dans les Territoires palestiniens, en Jordanie, aux Emirats arabes unis, en Algérie et au Maroc.