A Annaba, tous les moyens sont bons pour gagner vite de l'argent, et le commerce du pain est devenu, de nos jours, l'un des créneaux les plus florissants dans cette région de l'Est. Ici le consommateur doit se lever tôt pour avoir son pain parceque, dès les premières heures de l'après-midi, il ne reste plus de pain chez les boulangers de la ville malgré les nombreuses boulangeries ouvertes un peu partout dans les quartiers de la wilaya. Le mois de juin 2012 avait connu deux journées de grève générale déclenchée par tous les boulangers de la wilaya, qui avaient ainsi répondu au mouvement national mais l'«anomalie» suivante avait été constatée : le pain se préparait derrière des rideaux baissés avant d'être confié à des jeunes marchands au noir. Ceux-là le revendaient dans la rue aux citoyens à raison de 20 et même 30 DA la baguette. Selon les services de la police économique, la grève a été suivie à un taux de 98 %. Suite à cela, les représentants des boulangers s'étaient entretenus avec le secrétaire général de la wilaya et le directeur du commerce pour trouver une solution à leurs revendications, relatives notammen à une augmentation pour du prix du pain, sachant que la farine coûte actuellement 2 000 DA et la levure 3 000 DA. Or, selon certains commerçants, cet aliment populaire est un produit très prisé par toute la population annabie et surtout très rentable en matière de gain. La majorité des boulangers ont essayé d'augmenter le prix du pain à tout prix mais le ministère du Commerce qui a l'œil sur le marché s'oppose à toute augmentation, qui ne pourrait que contrarier le consommateur algérien. L'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture estime dans une étude faite que les Algériens consomment presque 49 millions de baguettes par jour. L'Algérie, selon le clasement établi par l'organisme onusien, occupe la quatrième place mondiale en termes de qualité de pain après la France, les Etats-Unis et les Philippines. Le gouvernement a administré un prix de 7,5 dinars pour le pain simple et de 8,5 dinars l'amélioré. Certainement presque tous les boulangers en activité à Annaba trompent l'Etat avec des magouilles qu'ils provoquent au vu et au su de tout le monde, en trichant par exemple sur le poids. Au lieu de respecter le poids réglementaire de la pâte, qui est de 250 grammes, ils en mettent 180 grammes seulement. Tout ceci avec la complicité des vendeurs clandestins de rues qui se sont emparés des ruelles du marché couvert de la ville et ceux de la Colonne. Les boulangers s'arrangent pour «livrer» les revendeurs qui exposent leur «marchandise» sur le trottoir , avec tous les risques que cela comporte pour la santé humaine, à des prix prohibitifs. Ainsi, une baguette est proposée à 20, voire 30 dinars alors que son prix réel est de 7,5 dinars. Ce sont au total 280 boulangeries sur les 20 000 existant à l'échelle nationale qui exercent au niveau de la ville soit, estime-t-on, une moyenne de 10 tonnes de farine produisant près de 5 000 baguettes par jour, une trentaine de boulangeries produisent 300 tonnes de farine près de 150 000 baguettes par jour dont la moitié est revendue au marché noir pour le prix deux fois plus que son prix faisant un gain évalué à 50 millions par jour dont une marge bénéficiaire revient aux marchands clandestins et le reste c'est le gain réel des boulangers en activité. Il est impardonnable pour un père de famille qui ne trouve pas de pain chez le boulanger au milieu de la journée et que juste en face des cartons remplis de pains se vendent sur la rue avec un prix cher devant les yeux de ces boulangers, constate-t-on. Désormais cet aliment, particulièrement stratégique, se retrouve aussi chez l'épicier, le laitier, dans les supérettes et surtout chez les marchands ambulants dans des conditions d'hygiène, ces derniers trimbalent leurs corbeilles d'un endroit vers un autre causant un risque d'altération avec une totale absence de conditions d'hygiène. A ce sujet, il est à noter qu' une certaine tension est ressentie actuellement sur la vente de la farine notamment sur l'approvisionnement en cette matière de base pour les boulangers dont plusieurs d'entre eux avaient stocké une bonne partie pour leur activité, dit-t-on. Malgré cette situation les familles algériennes continuent de jeter le pain rassis aux poubelles. Des jeunes gens ramassent ce pain sec trouvé dans les ordures pour le revendre de nouveau à l'éleveur de bétail à un prix qui varie entre 150 dinars à 200 dinars le sachet de 20 Kg. Dès 7 heures du matin ils sillonnent les quartiers en criant «pain sec, pain sec» d'une fenêtre ou d'un balcon, des sachets de ce pain sont jetés du haut des immeubles pour cette catégorie de ramasseurs et revendeurs du pain. Un contrôle strict dans cette filière est tout à fait nécessaire pour faire cesser toutes ces pratiques frauduleuses et immorales.