C'est près d'un siècle de l'histoire du théâtre algérien qui est exploré, à travers les 455 pages de l'ouvrage d'Achour Cheurfi, intitulé «Petit dictionnaire du théâtre algérien de 1920 à nos jours», paru chez les Editions Dalimen. Pour faire le point sur ce parcours qui prend racine au début du XXème siècle, l'auteur fournit des notices bibliographiques des auteurs dramatiques, des comédiens et des metteurs en scène, alors que d'autres notices résument des pièces de théâtre suivies d'éclairages des critiques. Ce dictionnaire est conçu pour être accessible aux professionnels et aux amateurs, aux spécialistes et aux critiques du 4e art, mais également et surtout au grand public des lecteurs qui pourront apprendre que le début du théâtre algérien est à mettre à l'actif de Allalou, Ksentini, Dahmoune et Bachetarzi. Toutefois, la première pièce intitulée «Nouzhat el mouchtaq», date de 1847, même si elle n'eut pas la chance d'être produite sur scène. Elle est l'œuvre du traducteur Brahim Daninous (1798-1872) et fait figure d'exception car elle ne sera suivie de productions théâtrales qu'après la Première Guerre mondiale. Dans l'introduction de l'ouvrage, l'auteur indique que les premières représentations artistiques dans le domaine du théâtre entre deux guerres n'intéressaient qu'un public restreint, composé de l'élite des médersiens car jouées en arabe classique. La langue dialectale a élargi par la suite l'audience du théâtre. Le dialectal n'a rien perdu de son pouvoir attractif, même des décennies après l'indépendance. C'est ce que constate l'auteur à ce propos en présentant un des humoristes contemporains en vogue à l'image de Abdelkader Secteur, de son vrai nom Abdelkader Abderrahmane. Avec lui, «le courant passe en public» lors de ses monologues au cours desquels il n'hésite pas à improviser dès qu'il est sur scène, écrit M. Cheurfi dans la notice réservée à ce comédien. Quant aux sources d'inspiration des auteurs, elles trouvent leurs racines dans les mêmes registres étant donné que ce sont les événements puisés dans la vie de tous les jours qui les préoccupent. Les parcours des hommes de théâtre sont tout aussi incomparables car certains d'entre eux ont fréquenté le Conservatoire d'Alger, à l'instar de Hamid Achouri, alors que d'autres ont tout simplement découvert leur passion lors de soirées entre amis, tandis que les anciens, comme Mohamed Adjaïmi, ont été admis au métier suite à un concours. Le public des comédiens et des acteurs peut également être très large et différent, car certains artistes ont eu comme théâtre pour décliner leur art leur propre pays, alors que d'autres ont pu évoluer à l'étranger, notamment en France, comme c'est le cas de Sid Ahmed Agoumi. M. Cheurfi affirme, à propos d'Agoumi, qu'il sait adapter la couleur de son jeu «à l'atmosphère que dégage son public». D'autres noms du théâtre ont eu droit à une description de leurs parcours contenus dans le dictionnaire comme Abdelkader Alloula, auteur de «Hammam Rabbi» et de «HoutYakoul Hout» ou encore «Ladjoued». Kateb Yacine, qui a écrit «L'Homme aux sandales de caoutchouc» et bien d'autres pièces, est décrit comme celui qui a rêvé «d'un théâtre de combat» qui écrit en arabe dialectal «pour être compris par ses frères». Toutes ces légendes du théâtre ne doivent pas éclipser le rôle de la femme dans ce domaine, à l'instar de Fouzia Aït El Hadj metteur en scène de la pièce «Le Royaume des prophètes» et «la Mort d'un vendeur ambulant». Le lecteur trouve, aussi, dans le Dictionnaire des notices sur Nesrine Aitout qui joue le rôle de Brigitte dans la pièce «Foehn» de Mouloud Mammeri et sur Djamila Arrès qui campe le rôle de Leïla dans «Kaïs wa Leïla», lorsqu'elle avait 15 ans avant de s'illustrer en tant que comédienne et scénariste. De nombreux autres comédiens et comédiennes ainsi que leurs travaux sur les planches sont crédités d'éclairages utiles pour les amoureux du théâtre dans cet ouvrage unique dans les annales de l'édition en Algérie.