Le Pr Boulassel, médecin-chef du service de médecine légale du Centre hospitalo-universitaire Nedir-Mohamed de Tizi Ouzou, a plaidé pour un nouveau cadre juridique adapté à chaque souffrance en tenant compte du nouvel ordre économique à même de permettre aux victimes de surmonter les difficultés d'accès à la réparation et à l'indemnisation et donc à une prise une charge efficiente. Un cadre juridique qui posera le principe d'une indemnisation systématique, rapide, intégrale et précisera les normes et modalités de financement. «L'accompagnement des victimes de violence, tous types confondus, doit être la règle à chaque niveau du processus de victimisation, soit depuis l'avènement traumatique jusqu'à la réparation et l'indemnisation, en prenant en compte les aspects psychosociaux et juridiques», a-t-il dit. «Le parcours de ces victimes commence par un événement traumatique, traverse l'étape de soins, s'enlise dans le labyrinthe administrativo-judiciaire pour aboutir à une indemnisation réparatrice, souvent, tardive.» S'appuyant sur un bilan d'activité de consultation de médecine légale clinique et expertises de dommages corporels, au niveau du CHU de Tizi Ouzou, ce spécialiste a relevé que «les difficultés liées à la prise en charge et l'accompagnement des victimes de violences, surgissent durant l'étape de réparation et d'indemnisation ou l'étape post-hospitalière». Durant cette période, a-t-il fait observer, de multiples obstacles peuvent survenir, notamment la lenteur dans la préparation des dossiers médico-administratifs, la lenteur du dépôt de plainte, de la programmation du procès, et, les reports multiples de l'affaire au niveau de la juridiction de jugement. «Toutes ces difficultés, source de survictimation des victimes et facteurs aggravants des troubles psychologiques post-traumatiques, retardent le dépôt de plainte, la tenue du procès judiciaire, la désignation de l'expertise et le dépôt du rapport au tribunal et/ou à la cour en vue d'une réparation et d'une indemnisation», fait-il observer. Sur 248 dossiers d'expertise de victimes de violence sur jugement judiciaire pour statuer sur l'évaluation des différents préjudices et infirmités résultants d'un acte de violence volontaire ou involontaire, la majorité des victimes de violence, expertisées, 58, 47% ont vu leur affaire jugée en un délai de deux à trois années et seulement 4, 3% dans un délai inférieur à une année, a indiqué encore Pr Boulassel. Ce spécialiste a également plaidé pour la mise en place d'un réseau d'intervenants impliqués dans l'accompagnement des victimes depuis l'avènement traumatique jusqu'à la réparation et l'indemnisation. «A l'instar des pays européens, nous proposons la création d'un réseau type Inavem (Institut national d'aide aux victimes et à la médiation) qui s'adresse à toute personne qui s'estime victime d'infraction qu'elle ait déposée plainte, ou pas, qu'une procédure judiciaire ait été engagée ou pas», a encore indiqué Pr Boulassel rappelant que «toutes les victimes, quelque soit la cause de leur douleur, ont le droit à la considération et à la solidarité». Au premier trimestre de l'année en cours, ce même service de médecine légale du CHU Nedir Mohammed de Tizi Ouzou a procédé 193 expertises médico-légale dont 173 pour les hommes, 15 pour les femmes et cinq pour enfants alors que sept cas de violences sexuelles dont cinq sur enfants, deux sur femmes et un sur homme ont été enregistrés à la période indiquée.