L'information avait déjà circulé, c'est maintenant officiel, Ahmed Ouyahia, ministre d'Etat, directeur de cabinet de la Présidence de la République, a adressé aux partenaires à la concertation sur la révision constitutionnelle des invitations accompagnées des propositions dégagées par un comité d'experts ainsi que d'une note explicative de la démarche. Cette note est importante dans la mesure où elle confirme la volonté politique de ne tracer aucune ligne rouge à cette consultation. Les propositions dégagées par le comité d'experts ne sont que des indications, elles n'ont pas la fonction de baliser le débat qui est totalement ouvert et ne fait l'objet d'aucune limite préalable, «hormis celles relatives aux constantes nationales ainsi qu'aux valeurs et principe de notre société», tient-on tout de même à préciser du côté de la présidence de la république dans un communiqué rendu public jeudi. Ces principes fondateurs de notre société, comme le rappelle la note de «présentation générale des propositions d'amendements pour la révision constitutionnelle», «sont immuables et ne sont pas révisables», et doivent par conséquent «être à l'abri de toute atteinte éventuelle». Les amendements projetés portent sur quatre aspects de la Loi fondamentale : son préambule, les principes généraux régissant la société algérienne dont «les droits et libertés des citoyens et leurs devoirs», «l'organisation des pouvoirs» et le «contrôle constitutionnel». Ce sont, au total, 150 invitations qui ont été envoyées à des destinataires dont la liste comprend aussi bien des partis politiques que des associations de la société civile, en plus de personnalités nationales et de professeurs d'université, ces derniers sollicités pour leurs compétences. Tout, en dehors des «constantes» nationales, est susceptible de modification. Le but est d'ordre stratégique : la révision de la Constitution vise en particulier, comme l'a expliqué Ahmed Ouyahia, «à adapter la loi fondamentale aux exigences constitutionnelles suscitées par l'évolution rapide de notre société et les mutations profondes actuellement en cours à travers le monde». Comment cela va-t-il se traduire dans les discussions et, plus tard, dans le projet consensuel qui doit en résulter ? L'opération est appelée révision constitutionnelle mais d'après les premières indications, il s'agit d'approfondir des dispositions qui existent dans la Constitution actuelle : renforcer la séparation des pouvoirs, conforter l'indépendance de la justice et le rôle du Parlement, affirmer la place et des droits de l'opposition et garantir les droits et libertés des citoyens. Les nouvelles normes et l'architecture destinés à régir la société algérienne sur le long terme consisteront à adapter ce qui existe et à le projeter sur un futur prévisible. La réforme profonde de la Constitution voulue par le président de la république va dans ce sens. Elle se base certainement sur l'expérience des pratiques constitutionnelles passées qui ont laissé peu de place aux contre-pouvoirs et à l'opposition, même si dans les textes actuels, des dispositions sont prévues pour qu'un pouvoir de contrôle puisse s'exercer sur les institutions par l'Assemblée populaire nationale notamment. Il faudra attendre début juin et le commencement des consultations entre Ahmed Ouyahia et les partenaires invités à la concertation, pour savoir quelle tournure pourrait prendre l'amendement de la Constitution et pouvoir répondre à la question concernant l'ampleur des modifications qui seront apportées. En même temps que pourra être appréciée la sincérité de la démarche participative qui préside à l'élaboration du texte qui servira à formuler le projet de Constitution.