Pour la première fois, une grande conférence politique de l'opposition s'est tenue en Algérie, légalement, avec l'autorisation des pouvoirs publics. Elle s'est déroulée à l'hôtelMazafran, à Zéralda, localité balnéaire à l'ouest d'Alger. Préparé depuis de longs mois par la Coordination nationale pour les libertés et la transition démocratique (CNLTD), ce qui est qualifié de Sommet de l'opposition n'a pas été facile à organiser non seulement pour réunir lemaximumde partis et personnalités politiques influentesmais y compris pour obtenir l'autorisation de la wilaya d'Alger qui a fini par l'accorder. La rencontre était prévue, au départ, à l'hôtelHilton, ensuite à l'hôtelMazafran, avec une petite péripétie qui a laissé croire à son empêchement, puis la confirmation de la salle a été donnée aux animateurs de la CNLTD. Le pôle des forces du changement animé par Ali Benflis, composé d'une dizaine de formations politiques qui ont soutenu sa candidature à l'élection présidentielle du 17 avril dernier, a participé à cette conférence.AliBenflis a voulu certainement utilisé ce cadre pour donner sa visionde la situationpolitique nationale,desperspectives, telles qu'il les voit et la démarche qu'il compte proposer et emprunter pour arriver à introduire des changementsdémocratiquesdans le système de pouvoir en place. Il a longtemps hésité avant de se décider mais il semble avoir été convaincu par les arguments de la CNLTD. La conférence de la transition démocratique se veut une alternative au débat lancé par le pouvoir autour de la révision de la Constitution. Les participants ont d'ailleurs, quasiment tous, du moins pour ceux qui y ont été invités, refusé de prendre part aux consultationsmenées par Ahmed Ouyahia, ministre d'Etat et directeurde cabinetde laprésidencede la République. L'objectif du pouvoirqui estd'arriver à unprojetde révisionde laConstitution élaboré de façon consensuelle n'est pas différentde celui visépar laCNLTD qui cherche également à construire unconsensusnationalmais autour d'une démarche de changement. Mais si l'intention de réunir un consensus national est commune, lebut est totalementdifférent entre consolider le système, côté pouvoir, et le changer, côté opposition. Cette profonde divergence s'exprime dans la revendication d'une transitiondémocratique, chez l'opposition, et par son rejet chez le pouvoir. Elle se traduit aussi dans une autre revendication de l'opposition, partagée celle-là par des partis liés au pouvoir, qui est la dissolution desAssemblées élues, particulièrement l'Assemblée populaire nationale et organiser de nouvelles élections, qui devraient être plus transparentes et plus sincères, selon ce point de vue, ce que le pouvoir refuse également. Pour lemoment, c'estdonc undialogue de sourds qui s'est instauré. L'attitude à l'égard du pouvoir divise l'opposition entre ceuxqui estimentque lepouvoirdoit êtrepartie prenante des changements à venir et ceux qui ne veulent pas en entendre parler. L'avantage de laCNLTDest de porter unmessagequi a un écho dans la population, dans lamesure où il consiste en un constat que tout le monde fait à propos du pouvoir et du système qu'il utilise pour gérer les affaires du pays. La nécessitéde changer la façonde gouverner est de toute évidence très largement partagée dans la population. Or, si une telle intention existe dans le pouvoir, elle n'est pas du tout perceptible. Au contraire, l'impression qui se dégage estque rienn'a changémalgré le discours officiel qui appelle par exemple à promouvoir la participation des citoyens. Il reste, comme l'ont fait remarquer certaines personnalités politiques, qu'il s'agit d'un moment historique dans la vie du pays.Des partis et personnalités aux programmes différents, aux opinions opposées sur nombre de questions, sont arrivés à s'entendre sur la nécessité de se réunir et de discuter dans un but qu'ils considèrent aller dans l'intérêt national.