Une journée d'étude sur la protection et les droits des journalistes a été organisée ce mercredi dernier par la majorité des cours de justice du pays. Présidées conjointement par un procureur général et un président près la Cour, elles ont vu la participation de magistrats et représentants des titres de la presse écrite et audiovisuelle. La démarche est à apprécier à sa juste valeur car il s'agit de la compréhension par les uns et les autres de la liberté de presse. Celle que les journalistes algériens ont acquise de haute lutte et à laquelle ils continuent de croire à l'aune de ses acteurs souvent intimidés, parfois menacés. Avec courage et détermination, beaucoup de journalistes n'avaient pas mâché leurs mots pour dénoncer des hauts responsables qui avaient contribué à spolier les richesses du pays. Ce qui leur a valu des tracasseries judiciaires et des intimidations. Dans les tribunaux et les commissariats où ils étaient convoqués et où ils passaient et repassaient, on leur faisait subir des humiliations aux côtés des délinquants et autres criminels. Cette journée d'étude sur la communication et la justice a été boycottée par les professionnels de l'information. Une manière pour eux de dénoncer les condamnations et les intimidations de plusieurs de leurs confrères dont le seul tort est d'accomplir leur métier. Ce qui explique le fait que le ministère de la Justice ait établi un ordre du jour sur mesure au point où les journalistes n'avaient d'autre droit que celui d'écouter les communications des magistrats. Eux-mêmes, ces derniers ne croyaient certainement pas à ce qu'ils disaient. Et pourtant, en organisant cette rencontre, c'est précisément cette recherche d'une meilleure compréhension de la liberté de presse que les initiateurs de la manifestation paraissaient cibler. Avaient-ils raison de le faire, eux qui avaient été investis de la mission de préciser que le journaliste est mis dans l'obligation de se soumettre à une exigence de la vérité et de l'information objective ? Au contact de la réalité du terrain, force est de dire que ce n'est pas le cas. Actuellement la presse algérienne donne l'impression de tirer sa raison d'être dans la recherche du sensationnel et la diffusion d'informations douteuses. La vérité étant tout autre, il s'agirait tout simplement d'insinuations malveillantes, tendancieuses, partisanes et mensongères. Ce qui, en cette veillée de Journée mondiale de la presse et de la liberté d'expression, interpelle et contraint les uns et les autres, ne serait-ce que par honnêteté morale et intellectuelle, de fustiger ce journalisme d'un genre nouveau qui n'hésite plus à contourner les règles éthiques, déontologiques et de simple bon sens. Pour de nombreux observateurs, il est temps pour les journalistes de s'unir, de recréer le Conseil de l'éthique et de la déontologie. Ce n'est qu'à cette condition qu'ils pourraient prétendre retrouver un peu de crédibilité et de mettre un terme à cette spirale de surenchère médiatique qui a installé une sorte d'anarchisme au sein de la corporation. Celle-ci est majoritairement animée par ceux qui monnayent leurs sources. Par aussi, ceux qui cherchent à s'attirer les bonnes grâces de telle ou telle personnalité en insérant sous leur propre signature ou en publiant, sous leur dictée, des articles laudateurs ou manipulateurs. Il y a les journaux qui se sont mués en caisses de résonnances des acteurs politiques, au point de relayer des actions de déstabilisation des institutions. Ceux-là mêmes qui se sont spécialisés dans la diffusion des ragots notamment contre les autorités légales du pays et ceux qui pratiquent un journalisme brutal et revanchard sur fond de cabale médiatique, de stigmatisation et de diabolisation. Quelles que soient les différentes sensibilités politiques des uns et des autres, les journalistes n'ont pas à croire devoir jouir de leur statut de leaders d'opinion pour semer la confusion, accuser de pratiques mafieuses ou mystiques ou clouer au pilori la gestion de telle ou telle institution, sans en apporter un début de preuve. Il faut avoir le courage de reconnaître que le manque d'éthique et de civilité professionnelle dont certains confrères font montre est malheureusement en train de contaminer l'information, de détruire la fiabilité des médias nationaux et de transformer plusieurs en mercenaires sans foi ni loi. Ce qui donne droit à cette justice de frapper comme elle entend. Est-ce à dire que ces rencontres sont une autre mise en garde, que le temps de durcir le ton contre les journalistes soit alors venu et que des menaces de sanctions planent au-dessus des hommes et des femmes des médias ? Est-ce que l'image du journaliste algérien va changer? Cet autre 3 mai constituerait-il une occasion de remettre en cause des habitudes de remplissage qui portent atteinte à la profession ? Est-ce à dire que ce 3 mai servira de tremplin pour imposer le changement de tout un chacun de nos confrères et de là permettre à l'opinion publique de disposer d'informations vraies et vérifiées ? «Le journalisme est un moyen de débattre de manière éclairée sur un large éventail de questions de développement depuis les défis environnementaux et le progrès scientifique jusqu'à l'égalité des genres, en passant par la participation des jeunes et la consolidation de la paix. Ce n'est que lorsque les journalistes sont libres de surveiller, d'enquêter et de critiquer les politiques et les actions qu'une bonne gouvernance peut exister», avaient souligné dans leur message commun le secrétaire général des Nations unies, M. Ban Ki-moon, et la directrice générale de l'Unesco, Mme Irina Bokova