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Face à la baisse du cours des hydrocarbures, quel est le rôle futur de l'Etat algérien dans le développement économique et social ?
Publié dans La Nouvelle République le 26 - 08 - 2015

«Au XXIe siècle, les batailles économiques de l'Algérie se remportent grâce à la bonne gouvernance et la valorisation du savoir», préambule du rapport établi sous la direction du professeur Abderrahmane Mebtoul- transmis au Premier ministre : « Face à la mondialisation, bilan et axes de développement 2015/2025» -15 janvier 2013 (8 volumes-980 pages).
1.-Le patriotisme économique s'assimile t –il au tout Etat ? L'assainissement des entreprises publiques en Algérie a coûté au Trésor public plus de 70 milliards de dollars entre 1971/2014, 70/80% étant revenues à la case de départ. Cela montre que ce n'est pas du essentiellement dû au capital-argent, étant entendu qu'en économie de marché concurrentielle le rôle de l'Etat régulateur est important largement influencé par l'internationalisation, devant tenir compte donc de cette dure réalité, malgré la crise mondiale, d'une économie de plus en plus globalisée. L'Etat doit favoriser la bonne gouvernance condition de l'efficacité économique pour une croissance durable reposant sur l'entreprise quelle soit publique ou privée dans une économie ouverte et son fondement le savoir tout en garantissant le principe d'équité. Aussi, je déplore, en cette période d'incertitudes dues à la baisse du cours des hydrocarbures que l'on se focalise uniquement sur la rente alors que l‘objectif essentiel est l'urgence d'une vision stratégique ainsi qu'un débat sérieux n'ait eu lieu sur le futur rôle de l'Etat en Algérie, débat indispensable pour éclairer la future politique économique et sociale. C'est une des explications fondamentales du changement périodique du cadre juridique des investissements, du manque de cohérence et de visibilité, du fait de la neutralisation des rapports de forces, la politique gouvernementale se trouvant ballottée entre deux forces sociales antagoniques, la logique rentière épaulée par les tenants de l'import et de la sphère informelle malheureusement dominante et la logique entrepreneuriale minoritaire. Cela explique également que l'Algérie est dans cette interminable transition depuis 1986, ni économie de marché, ni économie administrée, expliquant les difficultés de la régulation, l'avancée des réformes étant inversement proportionnelle au cours du pétrole et du cours du dollar, les réformes depuis 1986 étant bloquées ou timidement faites avec incohérence lorsque que le cours baisse. La question qui se pose est donc celle là : pourquoi avec l'importance des entrées en devises de Sonatrach entre 1965/2015, il faudrait faire un bilan, montant en termes de parité de pouvoir d'achat devant être ramené aux prix constants 2015, l'Algérie a été incapable d'asseoir une économie productive dans le cadre des valeurs internationales ? Aussi, le compromis des années 2009/2015 devra concilier l'impératif de productivité et la cohérence sociale, les principes d'une société ouverte et le devoir de solidarité, en un mot l'efficacité et l'équité. Il faut éviter toute ambiguïté. L'égalité n'est pas celle du modèle de l963-2015 mais recouvre la nécessité d'une transformation de l'Etat providence de l'Etat gestionnaire à l'Etat régulateur, par la formulation d'un nouveau contrat social, renvoyant à la nécessaire refondation de l'Etat. Favoriser la croissance au niveau d'une économie ouverte Une économie ouverte, la dure réalité, comme le montre l'actuelle crise mondiale ne signifie pas la fin du rôle de l'Etat régulateur car le marché a besoin d'être encadré. Aussi La nouvelle politique socio-économique algérienne devra reposer sur trois éléments fondamentaux complémentaires. - Premièrement, elle doit tenir compte de l'adaptation aux mutations mondiales irréversibles. Les négociations futures avec l'organisation mondiale du commerce et les Accords pour une zone de libre échange avec l'Europe applicable depuis le 01 septembre 2005, doivent correspondre aux avantages comparatifs du pays. Je pense fermement que l'Algérie ne dispose pas d'autres alternatives que l'adaptation à la mondialisation dont les espaces euro-méditerranéens, africains et euro-méditerranéens constituent son espace naturel. Prétendre que la mondialisation aliène le développement du pays et les libertés c'est ignorer une évidence: sans insertion dans l'économie mondiale, l'Algérie serait bien davantage ballottée par les vents des marchés avec le risque d'une marginalisation croissante. C'est que la nouvelle politique économique doit être marquée par l'adaptation à l'universalisation de l'économie de marché, le commerce international n'étant pas un jeu à sommes nulles. L'ouverture peut être douloureuse à court terme car elle impose des changements mais elle est bénéfique à moyen et long terme. -Deuxièmement, il y a lieu de garantir les grands équilibres macro-économiques par une monnaie stable, conditio n de l'attrait de tout investissement porteur à moyen terme et par la réduction des déficits publics. Ces deux conditions, sont une condition nécessaire mais non suffisantes, évitant la hausse des prix sur des structures de monopoles inchangées, l'économie de marché ne signifiant pas hausse des prix ce qui se passe actuellement, et donc aller vers les réformes institutionnelles et micro-économiques qui accusent un retard important au sein d'un monde de plus en plus interdépendant. Cela pose la problématique de l'Etat de Droit par la réforme de l'Etat, de la justice, de l'école (la mère des réformes qui conditionne le tout), de l'économie (surtout le système financier figé, lieu de distribution de la rente et favoriser un véritable marché du foncier). Le tout doit être harmonisé avec de nouveaux systèmes de protection sociale qui doivent s'adapter, s'intégrant à une économie dominée par le consommateur mondial et arbitrée par les marchés financiers. La compétition dans une économie globale fait que chacun a le monde pour marché et tous les consommateurs pour clients. La traduction d'un monde ordonné autour de la production est largement dépassée. Et l'introduction en lice de l'Inde et surtout de la Chine dans le commerce mondial représente une vraie révolution, caractéristique de l'unification des conditions de production dont la valeur ajoutée augmente mais dont les distances entre la production et la consommation diminuent avec là révolution dans le domaine du transport et des télécommunications. La libéralisation des mouvements de capitaux transgresse les frontières géographiques. Il y a lieu de revoir les concepts erronés de stratégie industrielle et d'imaginer une nouvelle politique de l'entreprise. Car à l'intérieur des entreprises se mettent en œuvre de nouveaux modes d'organisation éloignés du taylorisme, des grosses sociétés avec leurs lourdeurs bureaucratiques, fondés sur le raccourcissement des chaînes hiérarchiques, sur l'amélioration de la qualification, sur l'implication des personnes, sur la décentralisation interne et la gestion prévisionnelle des compétences. Troisièmement, la mutation nécessaire des services publics marchands. La conception passée sur une superposition forte entre secteur public, entreprise publique, monopole, activité limitée du territoire national doit faire place à l'efficacité de gestion, à la concurrence des services collectifs. Si certaines infrastructures peuvent continuer à être gérées par des monopoles les services de transport, eau, électricité, téléphone vocal doivent être libéralisés. Ainsi la plupart des pays émergents sans compter les pays développés ont des services collectifs caractérisés par de très nombreux acteurs privés et publics, puisque le commerce, l'agriculture et l'industrie sont presque totalement privatisés. Cependant, pour éviter les effets pervers du marché, l'action régulatrice de l'Etat est nécessaire pour assurer la cohésion sociale. Car, certes, la nouvelle politique socio- économique en Algérie devra être marquée en ce début du XXIème siècle par l'innovation, mais également éviter qu'une économie qui produit la richesse ne détruise les liens sociaux dans un univers où la plupart des structures d'encadrements, (familles, religion, syndicats) sont faibles surtout en Algérie où bon nombre d'organisations sont des appendices bureaucratiques sans impacts de mobilisation mais monnayant leurs soutiens contre une fraction de la rente pétrolière et gazière. Devoir d'équité à travers la symbiose des rôles de l'Etat et du marché L'Algérie a vécu sur un modèle égalitaire simple, l'Etat propriétaire gestionnaire régentant l'ensemble de l'activité économique et sociale réduction des inégalités, développement des prestations sociales pour tous, bien que certains contestent que ce modèle ait été équitable ( 60 milliards de dollars entre les subventions et les transferts sociaux en 2014 dépassant les 27/28% du PIB). Avec la baisse du cours des hydrocarbures qui sera de longue durée avec les mutations énergétiques, et la transition énergétique mondiale qui s ‘annoncent 2015/2030 dont la prise en compte du réchauffement climatique ( mix énergétique) , déterminant à 70% la valeur de la monnaie et du pouvoir d'achat des Algériens, ce compromis est remis en cause. Ayant fait plus de l'assistanat généralisé sans cibler les plus démunis, pour une paix sociale éphémère, le paradoxe est qu'en cette année 2015, alors que tout le monde veut actuellement sa part de rente et immédiatement quitte à conduire le pays au suicide collectif. L'adaptation étant une exigence en ce monde turbulent et incertain où toute Nation qui n'avance pas recule forcément, l'évolution d'une société plus ouverte, plus individualiste exige des traitements plus personnalisés, avec comme toile de fond une croissance plus sélective et rendant urgent de mieux articuler les rôles respectifs et complémentaires de l'Etat et du marché. De ce fait cela remet en cause le traitement statistique global qui correspond de moins en moins à la réalité plus complexe, supposant d'ailleurs une structure indépendante du Gouvernement comme l'atteste actuellement l'effritement du système d'information. La société de marché incitant naturellement à plus d'efforts et de dynamisme et la solidarité dans la compétition implique de cesser d'exclure sous peine de devenir une société de décadence. Ainsi les problèmes doivent être absorbés différemment et cela passe par une réflexion collective sur la justice au sens sociétal. L'universalité de la justice n'existant
pas, elle dépend du moment daté et du mouvement historique. Une société dynamique en forte croissance offre des espoirs individuels plus grands en tolérant certaines inégalités qu'une société dont l'économie en stagnation où l'avenir est incertain. Paradoxalement, en dynamique, certaines inégalités à court terme profitent aux plus défavorisés à moyen terme si l'on respecte les droits fondamentaux, bien qu'il faille éviter une domination excessive de l'argent sur la vie sociale. Dans un tel contexte il faut identifier lés inégalités qui doivent être combattues (inefficaces et injustes) et trouver le niveau acceptable d'inégalités nécessaires pour assurer le dynamisme de l'économie. Il ne sera plus question de la simple égalité d'accès à des prestations banalisées mais l'équité par la discrimination positive privilégiant le renforcement des relations professionnelles, la relance des négociations collectives branches par branches grâce à de nouvelles méthodes de travail fondées sur l'innovation continue. Il s'agira de favoriser de nouvelles structures sociales dynamiques pour impulser le changement et impulser celles traditionnelles par définition plus conservatrices. Ainsi s'impose une nouvelle politique axée sur trois facteurs devant les mettre en cohérence, une nouvelle politique de l'emploi et des salaires liés à l'éducation, une nouvelle politique de la protection sociale et enfin une nouvelle politique fiscale qui est au cœur de l'équité, sont nécessaires.


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