La crise syrienne entame sa quatrième année, sans qu'aucune lueur d'espoir pointe à l'horizon. Au contraire, la guerre d'usure vers laquelle s'acheminent les protagonistes menace d'hypothéquer définitivement l'avenir de ce pays. Après les pressions ininterrompues des puissances occidentales (Etats-Unis, Grande-Bretagne, France...) et leurs alliés moyen-orientaux (Turquie, Arabie Saoudite, Qatar), pendant plus de trois ans pour renverser le régime de Bachar Al-Assad, montré comme la principale source du mal, voilà que Paris, Washington et Ankara décident de changer de cap, et ne parlent plus que de la menace que représentent les terroristes de l'Etat islamique. Paris est la dernière capitale à décider des frappes aériennes contre les positions de cette organisation paraétatique qui contrôle tout de même plus d'un tiers du pays et dont l'influence s'étend jusqu'à Mossoul, en Irak. Devant l'urgence de freiner l'expansion des terroristes de Daech, les capitales occidentales ont même cessé de poser le «départ d'Al-Assad» comme une préalable à toute négociation pour une sortie de crise. Du coup, le conseil de l'opposition syrienne créé à Istanbul, et financé par le Qatar, pour emboîter le pas au fameux CNT libyen, mis en place pour légitimer l'intervention des forces multinationale en Libye et la destitution de Mouammar Kadhafi, n'est plus d'actualité. D'ailleurs, le cycle de pourparlers entamé dès 2012, sous la houlette des Nations unies à Genève, entre les représentants de ladite opposition et le gouvernement syrien n'ont abouti à aucun résultat concret. Ce conseil qui se voulait rassembleur s'est fixé comme principal objectif de «renverser» le régime de Damas «par les moyens pacifiques». Tout en se disant opposée à «toute ingérence étrangère», cette instance a été la première à presser la communauté internationale d'user de tous les moyens «légitimes» pour venir au secours du peuple syrien, victime, selon les membres du conseil, de massacres quotidiens. Un premier pas vers la légitimation d'une intervention militaire, sous couvert de protection des populations civiles, comme cela s'est passé en février dernier en Libye, lorsque les forces internationales, sur instigation de Paris et de Londres, avaient actionné leur arsenal militaire sous prétexte de sauver les populations des assauts barbares des troupes de Kadhafi. Le même schéma s'est reproduit pour le cas de la Syrie, où les médias internationaux décrivaient un régime aussi impitoyable, préparant ainsi l'opinion internationale à accepter et même à souhaiter une intervention militaire urgente. Le Conseil de sécurité des Nations unies ne trouverait aucune gêne à adopter une résolution dans ce sens, puisque Damas était déjà sous le coup de plusieurs accusations et de mesures de sanction. Aujourd'hui, les Occidentaux sont devant un dilemme : comment combattre l'organisation terroriste de l'Etat islamique en Syrie, sans prendre le risque de renforcer indirectement le régime de Damas dont ils ont juré la chute ?