Le romancier Ahmed Redha Houhou «excellait dans l'art de critique satirique journalistique», a estimé mercredi à Constantine l'universitaire Fatima-Zohra Guechi, à l'ouverture d'un colloque national consacré à cet écrivain algérien. "Ses articles empreints d'ironie et de pamphlets" parus dans l'hebdomadaire "Echouala" reflétant le vécu algérien sous l'occupation française avaient suscité "des vifs débats", a précisé l'universitaire, dans sa communication "Ahmed Redha Houhou le journaliste". Elle a ajouté que l'écrivain et dramaturge, connu pour être l'auteur du premier roman algérien en langue arabe, avait intéressé un lectorat "vigile et sensible à la situation de la société algérienne". Soulignant que Rédha Houhou maîtrisait aussi bien la langue arabe que la langue française et s'intéressait aussi bien à la littérature d'Orient qu'à celle d'Occident, Mme Guechi a affirmé que l'écrivain martyr "possédait la force du verbe qui savait évoquer l'Algérien, sa réalité, ses souffrances et les injustices qu'il subissait pendant la colonisation". A travers un documentaire sur Redha Houhou, réalisé par Soraya Ammour, de l'Etablissement public de télévision (EPTV) de Constantine, l'homme du théâtre Lhacen Bencheikh Lefgoun et la grande comédienne Farida Saboundji ont témoigné du fait que l'adaptation théâtrale chez Rédha Houhou était "pertinente, d'une grande profondeur avec la spécificité d'algérianiser l'oeuvre originale". Le comédien Bencheikh, évoquant l'association théâtrale "Al Mezhar" que Houhou créée à Constantine, a souligné que l'homme de lettres avait créé "une troisième langue" entre l'arabe et le français que le citoyen lumbda pouvait saisir, précisant que Houhou adaptait la thématique de la pièce à la société algérienne et savait faire sortir les préoccupations de sa société. Le comédien a affirmé que pour les pièces de Rédha Houhou, les familles constantinoises faisaient une exception et "autorisaient" les femmes à y assister. Le petit fils de Rédha Houhou a évoqué, quant à lui, l'apport de l'association des Oulémas musulmans algériens dans l'écriture et son intérêt pour l'enseignement de la femme et l'amélioration de ses conditions sociales. Appel au rassemblement de l'ensemble de ses oeuvres Les participants à ce colloque ont appelé à la relance du projet relatif au rassemblement de l'ensemble des articles et des analyses journalistiques de l'écrivain, parus dans les journaux étrangers. Les universitaires et hommes de lettres ont considéré que ces articles contribueront à faire connaître davantage l'écrivain Rédha Houhou, ses positions et ses convictions et valoriseront l'histoire de la littérature algérienne. Ils ont également appelé à éditer les communications présentées au cours de ce colloque sur le chahid Ahmed Rédha Houhou, qui excellait aussi bien dans le journalisme, que dans la nouvelle, le théâtre et d'autres genres littéraires. De même, les institutions en charge de la recherche dans le domaine du patrimoine littéraire ont été invités à consacrer des travaux portant sur tous les aspects des oeuvres de Houhou considérés par les spécialistes comme étant le père fondateur du roman algérien en langue arabe. Durant deux jours, le colloque animé par des universitaires, des chercheurs et des hommes de lettres venus de Mostaganem, Sidi Bel Abbès, Saïda, Djelfa, Constantine, Tlemcen et Oran se sont relayés à la tribune pour parler de l'oeuvre d'Ahmed Rédha Houhou. Les communicants ont mis en exergue le fait que Rédha Houhou ait apporté du neuf dans la littérature algérienne, de même qu'il a eu une influence immédiate dans le Maghreb arabe, ainsi qu'en Arabie saoudite, au Hidjaz et dans le Golfe arabe, où il a passé une partie de sa jeunesse. Les participants au colloque ont également analysé et débattu le parcours du romancier, homme de théâtre, poète et militant de la cause nationale, exécuté par l'armée coloniale pour ses idées nationalistes et ses écrits indépendantistes réclamant la liberté, la justice, l'émancipation du peuple algérien et son droit à la dignité. A l'occasion de ce colloque national, l'ensemble des oeuvres et pièces théâtrales connues d'Ahmed Rédha Houhou ont été éditées et présentées à l'assistance. Organisé par le département du Livre et de la littérature de la manifestation "Constantine, capitale 2015 de la culture arabe", le colloque national sur Ahmed Rédha Houhou, a été tenu au palais de la culture Mohamed Laid Al Khalifa, avec la coordination de l'Ecole supérieure des enseignants. Pour rappel, Ahmed Rédha Houhou a été enlevé le 29 mars 1956 par les autorités coloniales et sommairement exécuté et enterré avec d'autres Algériens, dans une fosse commune, à Oued H'mimim près de Constantine, découverte après l'Indépendance. Véritable virtuose des arts et des lettres, Rédha Houhou a légué entre autres, "Ghada oum el-qora" (Nymphe, mère des villages, 1947), "Maâ himar El-Hakim" (en compagnie de l'âne d'El-Hakim, nouvelles satiriques, 1953), et "Sahibet el-wahy" (La voyante, nouvelles, 1954).