Tout est pratiquement à l'abandon au complexe sidérurgique El-Hadjar et dans les filières Pipes et Tube et celle des mines de l'Ouenza. La suspension des travaux de réhabilitation du haut fourneau n°2 a aggravé le laisser-aller. Les 6 000 salariés qui pointent quotidiennement, dans l'une ou l'autre des trois filières, sont voués à l'inactivité. Ils perçoivent leur salaire de poste sans plus. Bien que censées être à 100% propriété de l'état algérien depuis le début de l'année 2016, comme l'avait annoncé le ministre de l'industrie et des mines Abdeslem Bouchouareb, ces trois entités économiques de production sont toujours sous le contrôle du groupe indien ArcelorMittal leader mondial de l'acier. Bien qu'il ait cédé la totalité de ses actifs, du capital social au gouvernement algérien devenu propriétaire à 100% de toutes les filières, l'Indien poursuit toujours son cavalier seul dans la gestion de la société. L'annonce de la reprise totale du capital social par les Algériens avait été faite le 7 octobre 2015 par le ministre de l'Industrie et des Mines Abdeslem Bouchouareb. Il s'était exprimé lors de la conférence de presse qu'il avait animée au complexe El Hadjar. «A compter du 31 décembre 2015, ArcelorMittal agira uniquement au titre d'assistant technique. Le groupe indien a donné son accord pour qu'il en soit ainsi après avoir signé le contrat de cession à notre profit de la totalité des actions du capital social qu'il détenait», avait-il affirmé. Or, si à ce jour l'assistance technique indienne reste du domaine d'une vue de l'esprit du ministre algérien. Pour preuve, le groupe du Luxembourg n'a pas lâché d'un iota son emprise sur la gestion administrative, financière et technique des filiales ArcelorMittal Algérie (AMA), ArcelorMittal Pipe et Tubes (AMPTA), ArcelorMittal Tébessa (AMT). Il serait même à l'origine de la résiliation du contrat de la société Pirelli en charge de la réhabilitation du Haut Fourneau n°2. Celle-ci a été remplacée au pied levé par le groupe belge «Pirson» qui n'a toujours pas entamé les travaux. Or, les responsables algériens avaient programmé le haut fourneau n°2 pour entrer en production dès fin mars 2016, ArcelorMittal n'a pas également permis à Ali Lemboub, désigné par le groupe IMITAL au titre de cosignataire algérien, de siéger à la direction générale. Cet ancien directeur de la qualité et chargé de l'environnement au complexe El Hadjar a été considéré persona non grata non seulement par les Indiens, il l'est aussi par le syndicat de l'entreprise. Bien que le mandat de ses membres ait pris fin le 22 février 2015, ce syndicat active toujours. En contradiction avec la mission qui lui a été confiée de remettre en production dans les délais prescrits le complexe sidérurgique, ces deux situations n'ont pas été du goût de Kamel Djoudi. le PDG du groupe IMITAL qui a vu sa démission rejetée par le haut-lieu. Cet imbroglio fait l'affaire du groupe indien ArcelorMittal. Depuis la signature du contrat de partenariat en 2001, que ce soit au titre d'actionnaire majoritaire (70% des actions), de partenaire ( 49%) ou au titre d'une présence symbolique d'assistant technique, le groupe indien a constamment géré en solo toutes les filières. Il en a profité pour importer massivement divers produits à partir de ses unités de France, Portugal et de l'Espagne. Il avait argumenté la mise au rebut de la cokerie et la vétusté d'autres installations. Les douanes algériennes et le ministère du Commerce avaient dénoncé en temps utile ces importations massives et le préjudice commis au détriment du trésor public. Ce qui est devenu le feuilleton «ArcelorMittal» a permis de rendre visible une âpre bataille et précipiter l'éclatement l'un des fleurons de l'industrie nationale. Erreurs de calcul et amalgames entre décideurs indiens et algériens se sont multipliés jusqu'à faire torpiller le partenariat. La décision du gouvernement algérien de mettre un terme au contrat y afférent a permis de verrouiller les frontières aux importations de divers produits sidérurgiques réalisés par le groupe ArcelorMittal. Attendu pour des investissements dans le cadre du programme de réhabilitation des installations au complexe sidérurgique El Hadjar, le même groupe ArcelorMittal a imposé la facturation des importations de matières premières comme étant des investissements. Sa démarche obéit à la volonté de l'Indien de maintenir l'Algérie à la toute dernière place au moment où un peu partout dans le monde, les experts annoncent que la sidérurgie mondiale se reconfigure avec la montée en puissance de la Chine, l'Inde et le Brésil. Les mêmes sources ont affirmé que la question de la restructuration des filières risque encore de se poser pendant des années. C'est pourquoi, ils concluent que le contexte ne laisse pas vraiment place à trop d'illusions quant aux mesures censées avoir été prises par le gouvernement. C'est dire que ce thriller industriel devient plus poignant avec l'éventualité de voir le gouvernement algérien faire appel au tribunal international du commerce. Présent dans plus de 60 pays, le leader mondial de la sidérurgie risque de voir sa cote en bourse baissée d'une manière significative. Pour l'heure, mis dans l'impossibilité de décider par la volonté de la coalition DG ArcelorMittal/Syndicat entreprise, Ali Lemboub et son équipe chauffent la scène avant la tenue de la réunion du conseil des Participations de l'Etat. Celle-ci n'est toujours pas à l'ordre du jour du Premier ministre. Ce puzzle serait incomplet sans un directeur général du conseil d'administration pour lequel l'on a désigné Maâmar Habbache, le désormais ex-PDG du groupe «Construbat». Ceci n'a pas perturbé le long sommeil dont lequel est confinée depuis des années la sidérurgie algérienne. Ce qui est en contradiction avec la déclaration faite par le Premier ministre Abdelmalek Sellal : «Nous comptons sur vous pour une réelle relance de la production sidérurgique dès le mois de mai prochain», avait-il suggéré aux syndicalistes qui l'avaient entouré lors de sa dernière visite au complexe sidérurgique El Hadjar.