Le Groupe de soutien international à la Syrie (GISS), coprésidée par Moscou et Washington, s'est réuni sans succès en marge de l'Assemblée générale de l'ONU. L'offensive majeure lancée par les forces du régime syrien sur les quartiers rebelles d'Alep, jeudi 22 septembre, risque de donner le coup de grâce à l'accord américano-russe de cessez-le-feu du 9 septembre. Il était déjà en mort clinique. Mais malgré cette nouvelle provocation du régime, les diplomates, à commencer par les deux parrains du texte, l'Américain John Kerry et le Russe Sergueï Lavrov, se refusent à en signer l'acte de décès. Leurs positions restent pourtant inconciliables, à l'issue d'une réunion jeudi du Groupe international de soutien à la Syrie (GISS) qui regroupe vingt-trois pays, à la fois ceux qui appuient l'opposition syrienne – tels la France, la Grande-Bretagne, les Etats-Unis ainsi que l'Arabie-Saoudite, le Qatar, la Turquie – mais aussi la Russie et l'Iran, les deux principaux protecteurs de Damas. «La rencontre était longue, douloureuse et décevante», a reconnu Staffan de Mistura, l'envoyé spécial de l'Organisation des Nations unies (ONU) pour la Syrie. «La question est de savoir s'il reste encore une chance d'avancer parce qu'il est clair que nous ne pouvons continuer plus longtemps dans cette voie», a déclaré le secrétaire d'Etat américain. M. Kerry prenait acte de l'échec de cette rencontre de plus de deux heures qui a commencé au moment même où Damas annonçait le lancement de son opération dans la grande ville du nord de la Syrie. Et d'ajouter amer : «Nous ne pouvons pas être les seuls à tenter de laisser la porte ouverte. Les Russes et les Syriens doivent faire leur part des choses.» «Il ne s'est rien passé» En sortant de la rencontre, son homologue russe, le visage fermé, a simplement lancé devant les caméras : «Il ne s'est rien passé.» Puis M. Lavrov a repris ses invectives contre l'opposition syrienne et les terroristes, seuls coupables à ses yeux des violations de la trêve. Les discussions à huis clos dans un palace new-yorkais ont été encore plus tendues que celles de la veille au Conseil de sécurité de l'ONU. Longtemps conciliant et misant sur la bonne volonté du Kremlin, le secrétaire d'Etat américain a en effet fini par durcir ses positions, notamment après le bombardement meurtrier, lundi, d'un convoi humanitaire par des appareils syriens ou russes. «Le seul moyen d'avancer est que les pays qui disposent d'avions dans ces zones [Alep et sa région] cessent de les utiliser», a insisté M. Kerry. Encore plus explicite, le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Marc Ayrault, a exigé que «l'aviation syrienne reste clouée au sol» et a souligné que «la réponse russe est loin d'être satisfaisante». Sergueï Lavrov aurait, semble-t-il, accepté cette demande, mais seulement pour trois jours. Les Etats-Unis, avec le soutien de l'écrasante majorité des membres du GISS, veulent que cette interdiction de vol dure une semaine. Il s'agit notamment de permettre les livraisons humanitaires pour les quartiers assiégés d'Alep. Quarante camions sont toujours bloqués à la frontière turco-syrienne. La question du contrôle du cessez-le-feu Et la plus grande partie des victimes civiles vivant dans les zones rebelles ont été tuées par les barils d'explosifs – voire plusieurs fois de chlore – largués par les avions et les hélicoptères du régime. Une telle mesure d'interdiction, même temporaire, fait donc sens pour créer les conditions d'une trêve et elle est facilement vérifiable. Convaincus qu'il n'y a aucune solution militaire à cette guerre, les diplomates, à commencer par John Kerry, s'acharnent à ressusciter l'accord du 9 septembre. Le texte prévoyait une trêve de sept jours renouvelable, l'amélioration les conditions d'accès de l'aide humanitaire et, in fine, une possible coopération militaire russo-américaine contre des groupes djihadistes. La question cruciale, si le cessez-le-feu est rétabli, sera celle de son contrôle. Celui de février, qui avait permis d'amorcer à Genève les discussions sur la transition politique, s'est rapidement effondré en raison des violations répétées par le régime et de ses bombardements sur les civils. L'opposition a quitté la table des négociations, dénonçant le parti pris de la «task force» chargée du contrôle du cessez-le-feu qui était uniquement russo-américaine. «Il faut que l'ensemble des membres du GISS soit associé au contrôle de la mise en œuvre d'une trêve», a proposé le ministre français des Affaires étrangères. Une instance à Genève sous égide onusienne serait chargée de faire le tri et d'évaluer les informations fournies par ces pays mais aussi par des organisations de la société civile syrienne. Mais pour le moment, les combats font rage et aucun cessez-le-feu n'est en vue.