Le Seoud s'achèterait une virginité à peu de frais tandis que le soutien au djihadisme international serait officiellement (et hypocritement) réduit, ce qui ne peut que plaire au président américain qui n'a jamais varié sur ce sujet (c'est bien le seul...) Une entente Washington-Ryad, donc? Cependant, beaucoup d'éléments ne collent pas... Cette crise tue dans l'oeuf le projet d'OTAN arabe évoqué par le Donald il y a quinze jours. Soit il aime se tirer des balles dans le pied (pas impossible), soit il n'est pas réellement derrière cette rupture. Le Qatar accueille la principale base US au Moyen-Orient ; le Pentagone ainsi que le Département d'Etat sont loin d'être aussi ravis que leur commandant en chef. Par le biais de son porte-parole, le Pentagone a d'ailleurs remercié le Qatar et refusé de commenter les déclarations trumpiennes. Quant à Tillerson, il est bien embarrassé, qui appelle les membres du Conseil de Coopération du Golfe à «rester unis». Le Donald vient d'ailleurs de mettre de l'eau dans son coca, peut-être « fortement conseillé » par son entourage, et a appelé le Seoud pour tenter d'apaiser la situation. Car le CCG est la pierre angulaire de l'empire américain dans la région - un peu comme l'UE en Europe - et il est aujourd'hui au bord du gouffre. Après le Brexit, le Qatarxit ? A Washington, les stratèges impériaux ne doivent pas être aux anges... Le Koweït et Oman ont en tout cas refusé de suivre leurs collègues et de rompre leurs relations avec Doha, ce qui fissure encore un peu plus le CCG. Autre élément qui ne cadre pas : la Chine serait en train de modifier ses contrats pétroliers avec Riyad pour payer ses importations d'or noir en yuans, coup terrible porté à la puissance américaine. Dans ce sens certains observateurs avaient rappelé qu'une chose demeurait, stoïque et inébranlable : le pétrodollar. Saddam avait bien tenté de monter une bourse pétrolière en euros mais il fut immédiatement tomahawkisé. Kadhafi avait lancé l'idée mais les bombes libératrices de l'OTAN tombaient déjà sur Tripoli avant qu'il ait eu le temps de passer un coup de fil. Les stratèges américains pouvaient dormir du sommeil du juste, leurs charmants alliés pétromonarchiques du Golfe resteraient le doigt sur la couture du pantalon. Sauf que... Une info extrêmement importante, donc passée inaperçue dans la presse occidentale, est sortie il y a quelques jours. La Russie et l'Angola ont dépassé l'Arabie saoudite comme premiers fournisseurs de pétrole à la Chine. Chose intéressante d'après les observateurs, c'est le fait que la Russie (encore ce diable de Poutine !) accepte désormais les paiements en yuans chinois qui a motivé ce changement tectonique. D'après un analyste, si l'Arabie veut reprendre sa part de marché, il faudrait qu'elle commence à songer sérieusement à accepter elle aussi les paiements en yuans... c'est-à-dire mettre fin au pétrodollar. ( A suivre)