Le médecin-chef du service de Médecine légale, du Centre hospitalo-universitaire (CHU), Nédir Mohamed de Tizi Ouzou, le Professeur Brahim Boulassel, ont estimé que l'évaluation de l'Incapacité temporaire du travail (Itt) chez la victime est, souvent, insuffisante. «Il est courant de constater une grande disparité dans le domaine de l'évaluation de la durée d'Itt», a-t-il indiqué. S'exprimant lors de la 2ème journée de médecine légale organisée à la maison de la Culture Mouloud Mammeri, par la Direction de la Santé et le service des sciences médico-légales du CHU Nédir Mohamed de Tizi Ouzou, sous le thème «le médecin et la justice», l'intervenant a mis en avant des facteurs subjectifs qui, a-t-il dit, influencent le praticien devant l'inventaire des victimes présumées». «L'expertise médicale est un moment crucial où, chaque poste de préjudice doit être examiné et évalué de façon équitable», a-t-il insisté. L' Incapacité temporaire du travail (Itt), a rappelé le Pr Boulassel, n'implique pas l'amputation totale de toute la capacité de l'individu mais qu'elle concerne l'amputation de la capacité totale qu'avait l'individu avant le fait traumatique. «L'Itt doit être comprise comme une amputation de la capacité totale de l'individu mais non pas comme une amputation totale de ses capacités», a observé le médecin-chef du service de Médecine légale du CHU de Tizi Ouzou. Pour cet expert, il s'agit de la durée pendant laquelle une victime éprouve une gêne notable dans ses actes de la vie courante et non pas uniquement de la gravité de ses blessures. «L'Itt doit être appréciée en tenant compte de la gêne fonctionnelle, des douleurs et du retentissement psychologique», a noté le Pr Boulassel dans sa communication intitulée «le médecin traitant et l'Itt, éléments subjectifs et objectifs.» Ce travail, a-t-il poursuivi, a pour vocation d'analyser les influences subjectives, leurs natures, leurs origines et leurs impacts auprès des médecins. Il propose également une réflexion sur les éventuelles façons de procéder qui seraient en mesure d'assurer plus d'objectivité, de rigueur et d'exactitude pour l'établissement de la durée de l'Itt. «Au plan pénal l'Itt déterminera la juridiction compétente pour juger l'affaire et le barème des sanctions pénales applicables. Tandis qu'au plan civil, sa durée est prise en compte parmi les critères utilisés par la justice dans le but d'évaluer le dommage subi», a encore observé cet expert. Pour le Pr Boulassel, la détermination de l'Itt dont l'utilité est, initialement, médico-légale, va entraîner fréquemment une insatisfaction de la part du client en particulier, quand le médecin est intègre. Une réaction qui va perturber la relation émotionnelle médecin-patient, et qui peut aboutir à l'altération, a-t-il dit, de la condition essentielle de notre exercice, la confiance. «Il suffirait, dans ces circonstances, d'appliquer les règles déontologiques de l'expertise pour que la boucle émotionnelle, source de ces éléments subjectifs, ne puisse se constituer», a suggéré l'intervenant. «Nul ne peut être, à la fois, médecin expert, et médecin traitant chez un même malade. Un médecin ne doit pas accepter une mission d'expertise dans laquelle sont en jeux ses propres intérêts, ceux d'un de ses patients, de ces proches.»