Aujourd'hui, à l'hôtel El-Aurassi à Alger, se réuniront les membres Opep et non-Opep pour mettre en œuvre l'accord issu de la réunion de Vienne en juin dernier. «Cette conférence d'Alger aura pour mission d'aller plus vers le concret», a expliqué, dans un entretien à l'agence officielle, l'expert pétrolier international et président du Cabinet Energy, Mourad Preure, qui s'est longuement étalé sur les enjeux de cette rencontre qui intervient dans une conjoncture assez «délicate». La réunion d'Alger d'aujourd'hui intervient quelques jours avant l'application des sanctions américaines contre l'Iran. En mai 2018, le président américain, Donald Trump avait annoncé le retrait de son pays du Plan d'action global commun rétablissant les sanctions américaines contre l'Iran. Cela dans un déali de 90 à 180 jours. Ces sanctions rétablis portent sur un embargo sur les produits pétroliers surtout. L'expert pétrolier a expliqué, dans ce sens, que «la réunion qui se tiendra à Alger a pour objet l'examen de la mise en œuvre de l'accord issu de la réunion de Vienne en juin dernier». En outre, il a précisé qu'«en principe, elle ne dépassera pas ce cadre». Pour rappel, l'accord de Vienne entre producteurs Opep et Non-Opep, à leur tête la Russie, a décidé d'une augmentation de la production de pays membres de l'accord pour compenser le déficit d'offre qui serait occasionné par la baisse de production de l'Iran, due à l'embargo, du Venezuela en crise, et de la Libye soumise à de violents risques géopolitiques. Des ministres de pays producteurs ont évoqué une augmentation entre 500.000 bj et 1 million de barils jour (mbj). Mais aucune augmentation de la production n'a été actée dans cet accord. «L'entrée en vigueur le 4 novembre de l'embargo contre l'Iran laisse dès lors présager une contrainte d'offre qui peut emballer les prix et déséquilibrer le marché», a expliqué Preure. «La réunion d'Alger répond en vue de l'OPEP de voir le marché retrouver un équilibre, considérant la robustesse relative de la demande et des risques de rupture d'approvisionnement attendues particulièrement du fait de la dispari tion des exportations iraniennes», a ajouté l'interlocuteur. Par contre, Preure a fait remarquer que le marché a plutôt réagit à la baisse des stocks américains qu'à la perspective de la conférence d'Alger. «Les prix testent le seuil des 80 dollars le baril considéré déjà par l'Arabie Saoudite comme un optimum. La présence de l'Iran à cette réunion sera source de tensions assurément sans que cela n'altère significativement, à mon avis, les consensus en vigueur», a expliqué le même responsable. Par ailleurs, Preure a noté que «la tentation de relever de manière explicite le plafond de production existe forcément, mais le réalisme devrait prévaloir car les pays producteurs n'ont pas encore surmonté les effets néfastes sur leurs économies de la guerre des prix menée par l'OPEP, à l'instigation de l'Arabie Saoudite, et de la dépression qu'elle avait occasionnée dans le marché pétrolier». Le Consensus d'Alger, issu de la conférence de septembre 2016, a consacré selon l'expert pétrolier «le retour de l'OPEP à une ligne de défense des prix et l'abandon de l'épisode malheureux de la défense des parts de marché». Ce consensus, auquel ont adhéré des pays producteurs significatifs comme la Russie, «a conduit à une réduction de la production de 1,8 mbj. Dans ce consensus, deux pays jouent un rôle clé: l'Arabie Saoudite et la Russie», a ajouté Preure. «Ces deux pays ont beaucoup de convergences du point de vue de leurs intérêts pétroliers», a souligné le même responsable. La Russie, dont l'économie est peu diversifiée, est très dépendante de ses exportations hydrocarbures et a beaucoup souffert de la baisse des prix. «L'Arabie Saoudite, tout autant dépendante et peu diversifiée, connait un déficit budgétaire dépassant les 100 milliards de dollars et une crise économique qui compromet la réussite de son plan stratégique à long terme», alors même qu'elle vit une période de succession dynastique porteuse de fortes incertitudes.