Le président Emmanuel Macron, au centre d'un grave moment que son pays traverse, tentera ce lundi de désamorcer la colère jaune qui s'est emparée des Français depuis plus d'un mois. Malgré l'abandon par son gouvernement de la taxe sur les prix du carburant, qui avait déclenché le mouvement populaire des «gilets jaunes», qui n'a pas de lien syndical ou politique, la colère ne s'estompe pas et les tensions restent vives. Lundi matin, le président Macron a réuni l'ensemble des forces politiques, territoriales, économiques et sociales «afin d'entendre leurs voix, leurs propositions et avec pour objectif de les mobiliser pour agir», a indiqué l'Élysée dans un communiqué. Pour trouver une issue à la crise des «gilets jaunes», un mouvement soutenu par 80 % des Français selon les derniers sondages, le chef d'Etat français s'est réuni dans la matinée, autour d'une grande table, avec 37 personnes, dont le Premier ministre Édouard Philippe et 12 membres du gouvernement, les patrons des principaux syndicats et du patronat, ainsi que les présidents de l'Assemblée nationale, du Sénat et des associations de collectivités locales. Cette réunion se tient au moment où la mobilisation de lycéens, rejoints par des étudiants, se poursuivait lundi contre des mesures gouvernementales, dont notamment la procédure qui donne accès aux études supérieures, la réforme du bac ou la mise en place du service national universel (SNU). Dans la soirée, le président Macron prononcera un discours à la nation afin d'apporter des solutions à une crise qui risque d'hypothéquer son quinquennat à peine 18 mois de son investiture à la présidence de la République. D'autant que les chiffres économiques annoncés pour le dernier trimestre de l'année ne lui sont guère favorables. Selon le gouvernement et la Banque de France, la croissance sera moins forte que prévu au quatrième trimestre, ce qui laisse les économistes prévoir une dégradation de l'emploi et des finances publiques imputable aux «gilets jaunes» mais aussi à un ralentissement au niveau européen. Pourtant, le gouvernement avait promis des effets «positifs» des mesures fiscales avant la fin de l'année. Ceci risque de compliquer encore la marge de manœuvre du président Macron censé apporter des mesures concrètes à la situation des Français qui se sont élevés, à travers les «gilets jaunes», contre l'érosion de leur pouvoir d'achat. La situation économique risque d'amplifier la crise Les économistes évoquent, comme conséquence de ce ralentissement de la croissance, un dérapage de la trajectoire du déficit public, au moment où l'abandon de la taxe dur les prix du carburant fera diminuer les recettes de 4 milliards d'euros pour 2019. Dans le sillage de la mobilisation des «gilets jaunes», le commerce a été également affecté à l'approche des fêtes de fin d'année, période où généralement les chiffres d'affaires atteignent le plafond. En effet, le Conseil national des centres commerciaux (CNCC) a indiqué lundi que la fréquentation des commerces a reculé de 17 % depuis le début du mouvement des «gilets jaunes», espérant que les annonces du président Macron «seront de nature à ramener les clients dans les sites commerciaux», avant la fin de l'année. Dans une note publiée lundi, la Fondation Jean-Jaurès, proche du Parti socialiste (PS), a estimé que les mesures adoptées, depuis l'arrivée d'Emmanuel Macron à l'Élysée, ont «dégradé» le pouvoir d'achat des Français. Pour cette fondation, les mesures prises pour les budgets 2018 et 2019 «ont dégradé le pouvoir d'achat des classes modestes et moyennes», précisant que la politique de transferts massifs engagée par le gouvernement depuis mai 2017 «s'est effectuée en faveur d'une minorité de contribuables, les 1% les plus riches». Dans cette France «proche de la déchirure», selon de nombreux analystes, le président Macron «doit savoir que la grogne s'est étendue à la gestion entière du pays par lui-même et son gouvernement». Les «gilets jaunes» réclament désormais une augmentation du salaire minimum pour redonner du pouvoir d'achat. La Fondation Jean-Jaurès évoque une augmentation de 500 euros, alors que des sources informés parlent d'une majoration entre 30 et 300 euros. Sur le plan politique, il revendique la convocation d'un référendum populaire pour les questions sensibles qui concernent les Français. Dans cette situation, estiment des observateurs, le président Macron se trouve dans l'obligation de satisfaire les revendications du mouvement populaire qui commence déjà à préparer l'Acte V de sa mobilisation pour samedi prochain, à moins de 10 jours de la fête de Noël.