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Partie intégrante des traditions vestimentaires
Publié dans La Nouvelle République le 19 - 02 - 2019

Comme tous les peuples conservateurs du monde, ceux de l'Afrique du Nord ont su garder leurs signes distinctifs comme la chéchia ou le turban qu'ils exhibent fièrement en tant qu'héritage des ancêtres.
Aujourd'hui, avec l'ouverture vers d'autres horizons, l'école, l'université, les voyages, la nouvelle génération adopte toutes sortes d'accoutrements étrangers à notre milieu, pour rompre avec des traditions que l'on dit rétrogrades. Heureusement qu'il y a encore des défenseurs du patrimoine qui perpétuent des éléments de tenues vestimentaires anciennes comme la gandoura à large échancrure à l'avant, le pantalon bouffant et la chéchia.
La chéchia dans tous ses états
Porter une chéchia ou un turban pour se couvrir la tête reste jusqu'à l'indépendance comme une exigence respectée sous peine d'être montré du doigt. A l'origine, ces coiffures étaient tricotées ou tissées par nos femmes très dévouées pour une cause sacrée. Cela donnait des chéchias de formes et de couleurs différentes. Puis vint le temps des chéchias industrielles mais d'origine artisanale. Au fil du temps, à l'image des boutiques d'ébénistes ou d'ateliers de forgerons, des unités artisanales ont vu le jour pour façonner des quantités suffisantes de coiffures qui puissent répondre à tous les besoins et à toutes les bourses, il s'agit donc de chéchias à porter chaque jour, à la maison, au travail, dans les champs, cela rappelle la chéchia blanche portant des dessins dorés de notre temps. Arrivent enfin les chéchias rouges sorties des mains de grands artisans soucieux de vendre à grande échelle et se faire ainsi une renommée.
Elles ont vu le jour d'abord en Tunisie, au XVIe siècle, chez des connaisseurs en la matière et dont le souci a été d'améliorer la qualité des chéchias rouges par la forme rigide et à la couleur. L'utilisation de la laine comme matière première rend inusable le produit. Et comme toute innovation séduit au point d'inciter à en acheter, la chéchia rouge s'est vendue en assez grande quantité même s'il y eut confusion au début avec le bonnet trouvé fort utile pour la tête et la production fut telle que les industries artisanales ont tourné à plein temps. Le bonnet était exporté vers les pays d'Europe qui l'ont vite apprécié. La production a été prolifique et la vente plus que satisfaisante. Ainsi, une concurrence s'est créée dans l'industrie du bonnet et de la chéchia rouge de l'Espagne, du Portugal, Italie et la Grèce. La France elle aussi s'est mise à la production de ces coiffures traditionnelles. Les écrivains de ces pays parlent de la chéchia à Livourne, Tolède, Palma de Majorque, Grenade, Valence, Barcelone.
Les Grecs d'aujourd'hui portent la chéchia rouge à la matière importée de la Libye, dans les zones conservatrices. En 1615, Cervantes qui a vécu en Algérie pour espionnage au profit de la couronne d'Espagne, cite des concurrents comme Jean Bertrand, Jean François Rozan, Juan Polanco. La Tunisie semble avoir été la première productrice de la chéchia et du bonnet rouge. Les Européens en ont fait l'imitation en usurpant l'invention. Léon l'africain et Thevent en 1663 avaient été expulsés d'Espagne et ce sont eux qui ont introduit à Fès (Maroc) le secret de fabrication des chéchias tunisiennes. Un document anglais du XVIe siècle fait état de l'exportation de chéchias rouges tunisiennes mais aussi de chéchias provenant d'une manufacture d'Alger.
La concurrence était rude et les meilleurs bonnets et chéchias étaient vite écoulés, souvent exportés. Un document atteste qu'un million de chéchias et bonnets ont été vendus à d'autres pays, par un producteur tunisien. Les Turcs ont introduit en Afrique du Nord une autre forme de chéchia appelée le tarbouch qui, au fil des générations, a eu beaucoup de succès comme nouvelle coiffure qui valorise toute personne que le porte. Pour se distinguer du commun du peuple, on a fait porter le tarbouche aux musiciens, chanteurs, notables. Qui ne se souvient pas du tarbouche de M'hamed El-Anka, le tarbouche a été aussi à la mode chez les instituteurs algériens de la période coloniale. Les anciens chauffeurs et receveurs de l'ancienne RSTA d'Alger ont porté le tarbouche comme marque de fonction exercée.
Le turban sous toutes ses formes
Il est fait enroulé différemment, s'il est en grosse toile, il en est de même d'un turban extrait d'un coupon très large et qui n'a pas besoin d'être trop long, à l'exception du turban des touareg qui se servent à bien se couvrir le visage en cas de tempête de sable. Ce que nous avons gardé comme souvenirs porte sur les couleurs et la qualité du tissu, les plus humbles parmi les enturbannés privilégient le blanc ou le jaune pour des raisons de choix personnels. Dans d'autres régions, on préfère le gris, sinon le noir.
Les films anciens réalisés en Algérie, à partir du XIX esiècle, donnent à voir des jeunes apprenants des écoles professionnelles portant des turbans faits en toile ordinaire connotant des conditions de vie misérables, cela remonte à la période coloniale où tout le monde portait la chéchia. Le turban est porteur de marque de richesse et de pauvreté, lorsque le chèche est simple, décoloré, la personne qui le porte est de rang social modeste s'il est en soie, polychrome, montant en forme de cône, la personne occuperait une haute fonction. Le turban doit remonter à des origines lointaines on le trouve dans les pays, du Moyen-Orient, à des milliers de kilomètres de distance, il n'a pas la même conception, la même façon de l'enrouler. Le Maghrébin n'a pas le même turban que le Pakistanais ou l'Egyptien dans certains pays, on lui ajoute une corde croisée d'une autre couleur pour une différence.


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