Ahmed Benbitour, économiste et ancien chef du gouvernement, qui a dressé hier à Boufarik (Blida), un constat très inquiétant de la situation politique, économique et sociale du pays, a plaidé en faveur des élites dans l'espoir d'un changement pacifique. « Notre pays a toujours été dirigé par un pouvoir autoritariste, patrimonialiste et paternaliste, qui vit de la rente», a dénoncé Ahmed Benbitour, invité par des associations à une conférence débat. Le conférencier a préféré commencer par la «mauvaise gouvernance», selon lui, il en a résulté un «Etat déliquescent en situation de pénurie et de de moyens de financement de son budget», car le prix du baril nécessaire pour équilibrer le budget est passé de 34 dollars en 2005 à plus de 115 dollars en 2013, alors que le prix à l'export ne dépasserait pas les 60 dollars en moyenne annuelle sur la prochaine décennie. Cette déliquescence se caractérise par cinq critères, à savoir l'institutionnalisation de l'ignorance et de l'inertie, le culte de la personnalité, l'institutionnalisation de la corruption, un nombre restreint d'individus prenant la décision à la place des institutions habilitées et l'émiettement des clans au sommet de la hiérarchie de l'Etat, a-t-il précisé. Revenant sur le sujet phare qui occupe les devants de la scène politique actuelle et sur le bras-de-fer opposant le Hirak au système, Benbitour a estimé que «malgré les résultats obtenus grâce à la pression qu'il a exercée sur les dirigeants pour obtenir leur démission, le mouvement populaire doit élaborer un programme et désigner les personnes qui sauront le concrétiser sur le terrain». Considérant que ce régime n'est pas apte à sortir le pays de la crise, l'ex-chef du gouvernement s'est dit prêt à proposer une feuille de route pour la concertation, mais sans prétendre représenter le Hirak : «le système de gouvernance qui a conduit le pays à cette situation ne peut organiser une élection présidentielle, raison pour laquelle nous devons nous diriger vers une période de transition». A ce sujet, Benbitour est longuement revenu, lundi, lors d'une conférence-débat tenue à Boufarik (Blida), indiquant qu'il y a nécessité de changer tout le système de gouvernance, celui où la grandeur des individus s'amenuise en face des institutions. Dans tous les pays développés, une importance primordiale est donnée à l'institution, il faut que le zaïmisme se plie au génie des compétences nationales et à la sueur des bâtisseurs. Pour l'ex-chef du gouvernement, techniquement parlant, il s'agit de désigner «cinq personnes qui auront deux missions : la première est de trois mois et consiste à expliquer à la population que le pouvoir en place a accepté de partir, pour qu'il n'y ait pas de soulèvement inutile. La deuxième est celle d'établir une feuille de route pour la désignation d'un gouvernement de transition de 12 mois». La composante de ce gouvernement sera «sélectionnée» au bout de trois mois parmi des candidatures à soumettre à un «audit complet», pour garantir d'avoir les «meilleures personnes». Insistant sur le fait que la rupture avec le régime ne représente aucunement une condition pour l'application de cette feuille de route, il explique que «les cinq personnes seraient membres du Haut Conseil de sécurité et auront pour mission de suivre le travail du gouvernement et de préparer une feuille de route pour l'élection présidentielle, en 12 mois. Les candidats doivent s'imposer la mise en œuvre d'un programme qui sera préétabli de façon à éviter de rester dans la crise. C'est à nous, peuple, de décider de ce que nous voulons et de mettre en œuvre les décisions nécessaires pour notre développement».