Dieu a voulu en faire un mois de patience, de piété, de solidarité… les hommes en ont fait le mois de l'opulence, de l'amusement et de l'accumulation. Il est définitivement admis que, durant ce mois, où le repos est forcé, presque décrété, incapable, on s'éloigne de toutes les vertus, pour se livrer à tous les excès que nous connaisson, où nombreux sont interdits. Tout s'emplit, comme par miracle et tout prend la voltige. D'abord la prière : partant d'un principe populaire bien admis de tous «Il n'y a pas de jeûne, sans prière, tout le monde se met de la partie. Les mosquées se remplissent et les places pour les taraouih deviennent chères. Les mosquées sont assiégées, au point d'en devenir subitement exigües pour contenir toute cette masse de fidèles. Il cesseront, bien entendu, leurs pratiques dès l'Aïd !? Place au commerce et négoce tous azimuts, tout le monde se reconvertit également. Ça va de la botte de coriandre, diouls, ktaïef, metlouâ, lben, zlabia... tout un négoce conjoncturel qui naît durant le mois et s'éteint en partie avec la mendicité qui, désormais, en est devenue une forme commerçante nouvelle, qui se démultiplie, notamment lors de la distribution de la fitra, évaluée cette année à 80 DA. La bouffe, celle-ci vient de fait, après une journée (ou plutôt un somme) de retenue et d'abstinence sans aucune pensée aux pauvres. Il est évident que le ftour venu, on se lache et on passe en revue nos filets. On se régale de tout, en mettant le reste en sachets livrés à la voirie surchargée, à telle enseigne qu'on retrouve nos restes éventrés par les chats au matin. L'amusement et le divertissement prennent le relais. Dès que le ventre est plein et encombré, pour mieux digérer, il n'y a pas mieux. Toutes les places et les lieux où l'on offre dominos, loto cartes, théâtre, chants, rire, y sont assiégés. On y joue sans relâche, parfois qu'on oublie même ce shour ! Pour y rentrer ensuite se coucher jusqu'au ftour. Pendant ce temps, ce qui prend un sacré coup c'est le travail, déserté de tous, personne n'est à sa place, on dort et ne répond pas lorsqu'il est présent. Tout le monde trouve son compte. Tous les commerçants se remplissent les poches. Quant à tous les jeûneurs, ils déboursent plus que d'habitude et sans retenue, en clamant la baraka.