Face au yo-yo incessant des marchés boursiers et à une récession annoncée dans les pays développés, les Européens préparaient vendredi une stratégie commune en vue du sommet du G20 du 15 novembre à Washington visant à réformer le système financier international. Selon les prévisions du Fonds monétaire international (FMI) jeudi, les pays développés doivent s'attendre à une décroissance de 0,3% en 2009, du jamais vu depuis la Seconde guerre mondiale. Tous les grands pays seront touchés par la récession, que ce soit les Etats-Unis (-0,7%), le Japon (-0,2%) ou la zone euro (-0,5%, dont -0,8% pour l'Allemagne et -0,5% pour la France), avec le bonnet d'âne pour le Royaume-Uni (-1,3%). Seule exception, le Canada devrait voir son PIB progresser de 0,3%. Grâce aux pays émergents et aux pays en développement, l'économie mondiale devrait cependant croître de 2,2% en 2009, assure le FMI. Chine, Inde et Moyen-Orient seront toujours les moteurs de la croissance, mais le moteur sera au ralenti. Désormais abonnés aux montagnes russes, les marchés financiers poursuivaient leurs mouvements de yo-yo vendredi, au gré des prises de bénéfices ou des chasses aux bonnes affaires des investisseurs. Rebondissant après leurs pertes de jeudi, les Bourses européennes étaient dans le vert vers 12 h GMT, avec des gains de 1,89% à Londres, 1,10% à Francfort et 1,02% à Paris. La tendance a été plus mitigée en Asie, où Tokyo, en baisse de 3,55% à la clôture, a pris le sillage de Wall Street la veille (-4,85%), alors que Hong Kong et Shanghai ont terminé en hausse, de respectivement 3,3% et 1,75%, sur des espoirs de plans de relance en Chine. Reflet des craintes de récession, les cours du pétrole sont brièvement passés vendredi en Asie sous les 60 dollars --pour la première fois depuis mars 2007-- pour le «light sweet crude», le brent tombant lui sous les 53 dollars, avant de se raffermir à respectivement 62,43 dollars et 59,03 dollars à 11 h GMT à Londres et New York. Stabilité par contre sur le marché des changes où l'euro s'affermissait légèrement contre le dollar à 1,2827 dollar vers 10 h GMT à Londres. Sensibles à la moindre mauvaise nouvelle, les investisseurs ont été douchés par un recul de 3,6% de la production industrielle en Allemagne en septembre, alors qu'ils attendaient une baisse plus modérée de l'ordre de 2%. Après de mauvais chiffres dévoilés jeudi en Espagne (production industrielle en berne), en Allemagne (effondrement des commandes industrielles) et au Royaume-Uni (ventes de voitures en chute libre), la France a annoncé vendredi un déficit commercial record pour septembre et «le risque d'un déficit commercial record» sur l'ensemble de 2008. Les marchés attendaient également avec anxiété vendredi les statistiques mensuelles de l'emploi aux Etats-Unis (13h30 GMT), après la publication alarmante jeudi d'une hausse du nombre de chômeurs indemnisés bien supérieure aux prévisions, puis les données sur le crédit à la consommation en septembre (20 h GMT). C'est dans ce contexte pour le moins morose que les dirigeants des 27 pays de l'Union européenne tentaient vendredi à Bruxelles d'élaborer une stratégie commune avant le sommet du G20 de la mi-novembre à Washington. Pour ce sommet, la France devrait d'ailleurs céder un de ses deux sièges à l'Espagne, pays non membre du G20, a laissé entendre vendredi le président français Nicolas Sarkozy. La France y dispose de deux fauteuils en tant que membre du G8 et présidente en exercice de l'UE. Vendredi à Bruxelles la France devait soumettre à la discussion un projet de texte appelant à renforcer le contrôle des marchés financiers, pour qu'aucun secteur n'y échappe à l'avenir, y compris les paradis fiscaux off shore ou les fonds spéculatifs. «Face à la crise économique, la coordination des politiques économiques est une ardente obligation. Il n'y a pas d'autre choix que de se comprendre et d'écouter, et d'essayer ensemble de préserver la croissance», a affirmé Nicolas Sarkozy, quelques heures avant le conseil. «Il faut plus responsabiliser les acteurs du système, renforcer la transparence», a déclaré de son côté le Commissaire européen à l'Economie, Joaquin Almunia, selon qui «il y a une vision unique, un consensus très élevé (au sein de l'UE) sur les principes sur lesquels doit se baser la réforme du système financier international». Européens et pays émergents voudraient notamment donner au FMI un «rôle pivot» dans la régulation et la surveillance financière mondiale. Ils risquent pourtant de se heurter aux Etats-Unis, réticents à toute gouvernance mondiale et que la passation de pouvoir à la Maison Blanche pourrait inciter à l'immobilisme. Avant cette rencontre de Bruxelles la présidence française de l'UE a martelé qu'elle voulait des «propositions concrètes» sur la réforme du système financier «sous cent jours» après le G20. Berlin a fait savoir de son côté que pour l'Allemagne le sommet de Washington devait avoir pour «objectif minimum» un accord sur «un mandat et un calendrier» pour entamer une réforme du système financier mondial. La préparation du sommet de Washington se poursuivra durant le week-end à Sao Paulo, avec une réunion des grands argentiers du G20. Vendredi, tout le monde sera également à l'écoute du président élu américain Barack Obama, qui donne sa première conférence de presse à Chicago. Selon certaines informations il pourrait y révéler le nom de son futur secrétaire au Trésor, celui qui sera chargé de diriger l'économie de la première puissance mondiale.