Des soldats mutins ont attaqué la résidence du président bissau-guinéen Joao Bernardo «Nino» Vieira dans la nuit de samedi à dimanche mais cette tentative pour le renverser ou le tuer semble avoir échoué, rapportent des témoins. La fusillade autour du domicile du président, dans le quartier Tchon de Pepel, à Bissau, a duré plusieurs heures et fait au moins deux morts mais le calme semblait revenu dimanche matin dans la capitale. Le président sénégalais Abdoulaye Wade a déclaré à Radio France Internationale avoir reçu dans la nuit un coup de téléphone de Vieira faisant état de tirs de soldats sur sa résidence. Wade a déclaré avoir dépêché des soldats sénégalais à la frontière et avoir mis à la disposition du président bissau-guinéen un avion en vue de l'évacuer ainsi que sa famille, mais il a précisé que Vieira avait décliné l'offre. Wade a invité les militaires bissau-guinéens à regagner leurs casernes L'Union africaine a exprimé son inquiétude devant ces violences, qui interviennent à la suite de la publication vendredi des résultats des élections législatives du 16 novembre dans l'ex-colonie portugaise. Ce scrutin s'est soldé par une claire majorité pour l'ancien mouvement de libération, le Parti africain pour l'indépendance de la Guinée-Bissau et des îles du Cap-Vert (PAIGC). Le PAIGC, qui avait quitté en juillet le gouvernement d'union nationale de Vieria, a obtenu 67 des 100 sièges lors de ces élections que les observateurs internationaux ont jugé «libres, équitables et transparentes». Le Parti du renouveau social (PRS), qui s'appuie sur l'ethnie Balante et jouit de l'appui des chefs de l'armée, a obtenu pour sa part 28 sièges de députés, mais son leader, l'ancien président Koumba Yala a contesté la régularité du scrutin. Celui-ci a été marqué par la défaite du Parti républicain pour l'indépendance et le développement (PRID), formation se réclamant du président Joao Bernardo «Nino» Vieira, créée pour l'occasion et emmenée par l'ancien Premier ministre Aristides Gomes. Koumba Yala, renversé en 2003 par un coup d'Etat et candidat malheureux face à Vieira lors de la présidentielle de 2005, a réclamé durant la campagne une enquête internationale sur le trafic de drogue sous la présidence actuelle. Ces dernières années, la Guinée-Bissau, ses îles, ses côtes et son arrière-pays sont devenus l'une des étapes privilégiées des barons colombiens de la drogue pour faire parvenir leur production de cocaïne jusqu'au marché européen, via les vastes étendues sahariennes. Vieira, qui a présidé le pays de 1984 à la fin des années 1990 et a connu l'exil avant de revenir au pouvoir en 2005, doit remettre son mandat en jeu en 2010. Les organismes internationaux de lutte contre la drogue ont tiré la sonnette d'alarme, craignant que l'ancienne colonie portugaise, un des pays les plus pauvres de la planète, ne se transforme rapidement en «narco-Etat». Le chef de l'Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC), Antonio Mazzitelli, a déclaré récemment à Reuters qu'il espérait que la pression internationale pousserait le nouveau gouvernement à procéder à un «grand nettoyage» en «débarrassant le pays de la drogue et de l'argent du crime».